L’hôpital malade de l’incurie de nos dirigeants
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Au moins 20 % des lits disponibles dans les hôpitaux français sont actuellement fermés, faute de personnel soignant pour les faire fonctionner, a révélé le quotidien Libération qui cite les conclusions d'une enquête réalisée, début octobre, par le Conseil scientifique et le Comité consultatif national d'éthique, présidé par le professeur Jean-François Delfraissy.
Boulevard Voltaire nous informe, le 27 octobre, que Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, a déclaré, à l'issue du Conseil des ministres, qu’une enquête était lancée auprès de l'ensemble des établissements de santé pour objectiver la situation et pouvoir y faire face.
Il serait temps de s'en inquiéter, surtout après que le ministre de la Santé a voulu faire preuve d'autorité en suspendant les soignants qui n'étaient pas vaccinés. Il a, cependant, déclaré devant le Sénat, le 26 octobre, que les deux tiers des soignants suspendus « sont revenus au travail une fois vaccinés ». Ouf !
On pouvait espérer que, suite à la crise du Covid, le gouvernement prendrait toutes les mesures nécessaires pour augmenter le nombre de lits et renforcer les équipes soignantes. Il n'en a rien été, et c'est ainsi que plus de 5.700 lits d'accueil et d'hospitalisation ont encore été fermés, l'an dernier.
Pour expliquer cette fermeture massive de lits, les causes sont multiples et fortement aggravées par la crise sanitaire.
En premier lieu, bien sûr, la réduction du nombre de lits qu'implique la gestion à flux tendu des établissements hospitaliers publics ; cette politique qui, en vingt ans, nous a privés de 100.000 lits a encore été accentuée en 2009 par la loi HPST (Hôpital Patient Santé Territoire) qui favorise une gestion des hôpitaux axée sur la rentabilité au détriment de la qualité des soins, et s'est poursuivie en 2020 et 2021 malgré la crise sanitaire que nous subissions et qui obligea, en plus, pour limiter les phénomènes de contagion, à transformer des chambres à deux lits en chambres à un lit, ce qui a réduit d’autant les capacités d’accueil.
Ensuite, et ce n'est pas nouveau, nous manquons de personnel soignant, et tout particulièrement de médecins, conséquence du numerus clausus mis en pratique dans les années 80 afin de limiter soi-disant les dépenses de santé et dont nous subissons maintenant les conséquences directes, alors que nous avions vécu jusque-là sur l’acquis des années où le nombre de médecins était suffisant pour répondre aux besoins de la population. Si on ajoute à cela que les directeurs d’hôpitaux préfèrent embaucher des médecins à des postes sous-payés d’assistants ou d’attachés, qu’acceptent surtout les médecins étrangers, plutôt que proposer des postes de praticiens hospitaliers, on comprendra facilement que ces derniers préfèrent s’inscrire dans des agences d’intérim où, pour un travail identique, ils sont correctement rémunérés. Vouloir limiter cette rémunération, comme l’envisage le ministre, aggravera encore la situation dans les services où le manque de médecins se fait le plus sentir.
Le personnel paramédical manque lui aussi à l'appel : démotivation, démissions, arrêts de maladie... autant de causes que l’épidémie a aggravées, et il n’était pas forcément judicieux de vouloir suspendre ceux qui n’étaient pas à jour de leur vaccination anti-Covid, même si l’impact sur le fonctionnement des services reste limité.
Contrairement aux médecins en sous-effectif, le manque de personnel paramédical dans les hôpitaux est davantage lié à une détérioration des conditions de travail et à une rémunération insuffisante, que la crise n’a fait qu’aggraver, qu’à un manque global de personnel.
Le porte-parole du gouvernement, dans ses dernières déclarations, a rejeté la responsabilité de cette crise sur la politique de santé des gouvernements précédents ; c’est oublier que, depuis quatre ans, le gouvernement actuel n’a rien fait pour infléchir cette politique et en proposer une nouvelle.
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