L’indigence du Conseil constitutionnel dans sa motivation juridique du passe vaccinal est ahurissante !

Conseil_constitutionnel,_Palais_Royal,_Paris_1

Quatre jours ! C’est le délai (record) qui a suffi au Conseil constitutionnel pour valider le projet de loi instaurant le « passe vaccinal », une des lois les plus importantes adoptées ces dernières années au vu des conséquences qu’elle entraînera sur notre modèle de société.

Alors saisi par trois groupes de parlementaires, soutenus par 26 contributions extérieures, dont celles du Cercle Droit & Liberté, du Conseil national des barreaux ou encore des professeurs Cassia et François, le Conseil constitutionnel a rejeté l’intégralité des argumentaires concluant à l’inconstitutionnalité du « passe vaccinal ».

Pourtant, la jurisprudence récente du Conseil laissait présager une solution différente : lors de l’examen du « passe sanitaire », les sages avaient validé cette mesure au motif qu’elle ne constituait pas une obligation vaccinale. Même solution pour le Conseil d’État qui a, lui aussi, retourné sa veste à l’occasion de son avis préalable à la transmission du projet de loi au Parlement.

Placés dans une position délicate par le gouvernement qui a avoué publiquement que le « passe vaccinal » n’était qu’une obligation vaccinale déguisée, les sages ont ressorti leur raisonnement couteau suisse. En effet, le Conseil constitutionnel a validé la quasi-intégralité des mesures en affirmant que celles-ci poursuivaient « l’objectif à valeur constitutionnelle de protection de la santé publique » en se gardant bien de préciser en quoi le « passe vaccinal » permettait d’atteindre un tel objectif.

La motivation de la décision est tout aussi lacunaire quant à la vérification d’identité concomitante à la production du « passe vaccinal ». Sans vérifier si, en pratique, cet acte constituait un contrôle d’identité, le Conseil constitutionnel valide cette mesure au motif qu’elle permet « l’effectivité du passe vaccinal ».

On peut noter que trois limites ont été posées à la mise en place du « passe vaccinal », qui ne pourra être demandé à l’entrée d’un meeting politique ou encore pour emprunter un transport public pour effectuer de « longues distances ». Enfin, par une réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel impose qu’il soit mis fin à cette obligation « lorsque les données épidémiologiques le permettront ». Cette dernière condition sera bien difficile à vérifier en pratique…

Devant un Parlement qui vote les lois proposées par le gouvernement les yeux fermés et des juges qui obéissent au doigt et à l’œil du pouvoir exécutif, la sonnette d’alarme doit être tirée concernant l’état de délabrement de nos institutions, qui ne garantissent même plus la séparation des pouvoirs.

Guillaume Leroy
Guillaume Leroy
Chargé d'enseignement en droit constitutionnel à l'Université et responsable du pôle affaires publiques du Cercle Droit et Liberté

Vos commentaires

50 commentaires

  1. Cette décision apprend (ou confirme) qu’en France, y compris quand les droits et les libertés sont en jeu, il n’y a plus guère de contre pouvoir :
    – la majorité parlementaire marche au pas cadencé
    – le Conseil constitutionnel rejette allègrement ( v. sa motivation) les recours ayant pour enjeu les libertés
    – et le Conseil d’Etat en fait autant avec les recours déposés sur des questions essentielles comme la liberté des médecins (v. décision n° 440129 du 28 janvier.

  2. Quand viendra le temps du Nuremberg II, beaucoup de ces juges seront tout étonnés de se trouver de l’autre côté de la barrière. Je me demande quel effet ça fait .

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