L’Italie réclame l’annulation de sa dette…

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L'air de rien, le gouvernement italien vient de jeter un énorme pavé dans la mare bruxelloise. Riccardo Fraccaro, secrétaire d’État à la présidence du Conseil, proche de Conte, vient de déclarer à l'agence Bloomberg que « la BCE devrait effacer les dettes contractées durant la crise du Covid, pour aider les nations à repartir du bon pied ».

Hypothèse aussitôt rejetée par Bruno Le Maire, en visite à Rome, qui a rétorqué qu'une dette, ça se rembourse, par la croissance et la maîtrise des finances publiques. Comme si Le Maire pouvait se permettre de donner des leçons de croissance et de maîtrise budgétaire à ses homologues européens, fussent-ils italiens... Certes, l'Italie croule sous une montagne de dettes souveraines, plus de 150 % de son PIB cette année. Une dette qui pèse lourd en termes d’intérêts et plombe sa croissance depuis vingt ans. Car la dette italienne est ancienne, elle remonte aux années de plomb, qui ont mis fin au fameux miracle italien.

Sauf qu'à y regarder de plus près, le gouvernement italien manœuvre en l'occurrence avec une habileté redoutable. D'abord, cette requête suit le plan de relance européen, où Conte s'est taillé la part du lion en obtenant, pour son pays, près du tiers des 750 milliards alloués aux pays en difficulté. Mais surtout, l'Italie dispose d'un atout majeur dans cette confrontation qui s'ouvre en catimini : elle est en excédent budgétaire primaire depuis vingt ans. Cela signifie que, mis à part le paiement des intérêts de la dette, son budget serait excédentaire. Donc, si l'Italie faisait défaut, elle survivrait grâce aux excédents dégagés... C'est le poids de la dette qui obère les finances italiennes. Dégagée de cela, elle respirerait bien mieux.

Un luxe que la France ne peut se payer : en déficit budgétaire primaire comme secondaire, la France serait aussitôt sans ressources si elle venait à être privée de financement. On comprend, dès lors, pourquoi Le Maire s'est totalement désolidarisé de l'initiative italienne : la France n'est pas prête à se débarrasser de sa dette, elle est accro au crédit et au déficit....

Or, c'est l'Italie qui a raison : une dette aussi lourde que la sienne, mais aussi que la nôtre, quoique moindre, est un boulet qui nous empêchera à jamais de retrouver les chemins de la croissance et de la prospérité. C'est aussi par la dette que les États entrent en soumission vis-à-vis des banques centrales, de l'Union européenne, bref, sont dépossédés de leur souveraineté. Avec de telles dettes, la France, comme l'Italie ou l'Espagne, sont enterrées, il n'y a plus rien à espérer.

Il est temps de se débarrasser d'une partie de la dette. C'est à dire d'affronter la BCE, l'Union européenne, les banques, les marchés, les fonds de pension, les fonds souverains étrangers... L'Italie s'y prépare depuis des années : elle est en excédent budgétaire primaire et en excédent commercial. La France, elle, est en déficit de tous les côtés : la soumission est aujourd'hui son seul choix. Sauf que cela ne pourra durer ainsi : ce sont des décennies de corvées qu'il nous faudra pour nous sortir de ce guêpier. Il est donc grand temps de changer de logiciel économique, de se mettre en situation d’être forts et de réclamer, nous aussi, l'effacement partiel de notre dette, sans risquer de nous retrouver poussés à la faillite du jour au lendemain...

Olivier Piacentini
Olivier Piacentini
Ecrivain, politologue

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