Livre : La Révolution nationale, de Georges Valois

révolution nationale

Les gilets jaunes représenteraient-ils la troisième voie attendue, celle qui tourne ostensiblement le dos aux échecs du libéralisme progressiste comme aux aberrations du sociétalisme libertaire, tous deux avatars du socialisme gauchiste mitterrandien et du capitalisme macronien de la séduction ?

Telle est l’hypothèse que pourrait suggérer la lecture ébouriffante de La Révolution nationale, publiée par Georges Valois en 1924. Personnalité atypique que ce condensé idéologique d’histoire des idées politiques depuis longtemps tombé dans un regrettable oubli. Pensez, celui qui mourra en déportation le 18 février 1945 sera passé par toutes les aventures intellectuelles de son époque. Né républicain, il évoluera vers l’antisémitisme, le royalisme maurrassien, le socialisme proudhonien, le syndicalisme révolutionnaire sorélien, le fascisme mussolinien, le corporatisme…

Les connaisseurs retiendront surtout du fondateur de La Nouvelle Librairie nationale – alors située au 11, rue Médicis, soit au siège de l’actuelle Nouvelle Librairie créée et dirigée par François Bousquet auquel l’on doit, précisément, la réimpression de La Révolution nationale – son adhésion puis sa rupture avec l’Action française (AF) et sa tentative quasi avortée de création d’un parti fasciste à la française, Le Faisceau (1925-1928). S’agissant de son compagnonnage avec le mouvement maurrassien, relevons qu’après avoir publié, son Enquête sur la monarchie et la classe ouvrière (1907), dans laquelle il concluait que « le régime républicain parlementaire est incompatible avec l'organisation syndicale, et que la République est essentiellement hostile aux classes ouvrières », il lancera en mars 1911, avec Henri Lagrange, le Cercle Proudhon, tentative de réunion des monarchistes et des syndicalistes qui fera long feu lorsque la guerre éclatera. Homme d’action, Valois expérimentera le corporatisme avant de comprendre que les institutions ne se transformeront guère par la base. Cette disposition à l’activisme sera une des causes de son départ de l’AF (1925), à laquelle il fera grief de son intellectualisme.

Dans La Révolution nationale, Valois se consterne de voir qu’entre les élites et les peuples, le malheur proviendra toujours de ce que les premières s’approprieront les victoires remportées par les seconds et, pis, les travestiront sous les masques des valeurs bourgeoises et mercantiles. On ne peut comprendre Valois si l’on méconnaît son abnégation au feu, lui qui, de simple soldat, finira sous-lieutenant après s’être porté volontaire dans les opérations les plus périlleuses (blessé au combat en 1916, il sera décoré de la croix de guerre et de la Légion d’honneur). De ce fait, il ne s’est absolument pas résolu à ce que les sacrifices des poilus des tranchées fussent réduits aux funèbres et contemplatives veillées commémoratives devant les monuments aux morts.

La figure du Combattant, antithèse du Bourgeois, est déterminante dans cet essai aux accents squadristes. C’est dire que Valois récuse l’esprit libéral, c’est-à-dire bourgeois et marchand, qui présidait au XIXe siècle, pour fonder une nouvelle hiérarchie des valeurs jaillies des fondrières sanglantes de 14-18. Sans bannir le bourgeois, il convient de lui ôter définitivement le pouvoir politique en le ramenant exclusivement à la fonction économique. Pour ce faire, il faut conduire une authentique révolution guidée et tournée vers les valeurs de courage, d’honneur, d’héroïsme et de grandeur, cette nécessaire « philosophie politique totale » qui subordonne le « capital matériel » et « visible » aux valeurs « immatérielles », « invisibles », « spirituelles et morales ».

Il faut en terminer avec la médiocrité structurelle qu’engendre l’esprit démocratique, libéral, ploutocratique, parlementaire, consumériste et bourgeois pour lui privilégier, par-delà droite et gauche, la supériorité naturelle du Combattant exemplaire et vertical qui s’appuierait sur la seule vraie élite de la nation, « gentilshommes, bourgeois, ouvriers et paysans ». Le Peuple.

Avec La Révolution nationale, les gilets jaunes ont trouvé leur doctrine. Reste à l’accomplir !

Aristide Leucate
Aristide Leucate
Docteur en droit, journaliste et essayiste

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