[LIVRE] Nicolas Gauthier nous livre un Le Pen comme vous ne l’avez jamais lu

On trouvera dans ces entretiens le vrai visage de Le Pen, tel qu’en lui-même enfin l’éternité le change...
jean-marie le pen

Notre excellent confrère Nicolas Gauthier est un homme complet. Il ne connaît pas seulement sur le bout des doigts la musique (du rock confidentiel à la variété radiophonique), le cinéma (de Kubrick à Max Pécas) et la littérature, mais il peut encore s’enorgueillir d’avoir été l’un des plus constants interviewers et amis de feu Jean-Marie Le Pen, et ce, depuis le milieu des années 1980. D'où son dernier ouvrage : Le Pen comme vous ne l’avez jamais lu, publié chez Déterna.

Nicolas Gauthier, le fidèle

Une anecdote personnelle résumera peut-être, mieux qu'un long discours, l’affection réciproque qui unit notre ami à la famille la plus haïe de France. Au cœur de la tourmente de 2022, alors que le phénomène Zemmour menaçait le Rassemblement national, toute la droite ou presque se trouvait réunie à l’anniversaire de BV. Vers neuf heures du soir, profitant de l’air frais, Nicolas Gauthier et l’auteur de ces lignes fumaient des clopes en buvant du rouge, quand on annonça Marine Le Pen. Fendant la foule, repoussant d’un sourire les droitards avides de selfies et les courtisans qui la croyaient déjà morte, elle ne s’arrêta qu’une seule fois avant d’entrer dans la salle : pour embrasser comme du bon pain son vieil ami, qui avait connu la trahison de Mégret, le séisme de 2002, la difficile passation de pouvoir entre père et fille et, désormais, les désistements vers Reconquête… et n’avait, lui, jamais trahi, jamais dévié... Jamais encarté non plus. Cela vous signe un homme, bien davantage que l’avant-propos de ce livre, dans lequel il confesse humblement avoir failli renier, dans les années 80, son amitié avec la bête immonde, devant un chauffeur de taxi « méditerranéen »… qui s’avèrera être un fan du Menhir !

Le vrai visage de Le Pen

On trouvera dans ces entretiens le vrai visage de Le Pen, tel qu’en lui-même enfin l’éternité le change, comme disait l’autre. Nuancé, subtil, cultivé, pas avare de phrases chocs qui déboîtent évidemment, mais citant volontiers les statistiques et l’actualité tout autant que les grands auteurs. Face à lui, Nicolas Gauthier, patient et amical, lui fait préciser certains points, lui offre certaines perspectives… et le laisse se comporter en prophète. Car s’il y a bien une chose qui marque le lecteur de cette remarquable compilation d’entretiens, c’est le caractère incroyablement prémonitoire des conclusions de Le Pen. Dès la campagne de 2002 et le match France-Algérie, il avait prévu les enclaves étrangères et la fin du mythique « vivre ensemble ». Construction de prisons, légitime défense des flics, magistrature partiale, fin nécessaire du paternalisme colonial, corrélation entre insécurité et immigration : sur tous ces sujets, il a eu raison trop tôt. Il a défendu la souveraineté des Etats contre la dictature atlantiste, la fraternité réelle plutôt que l’antiracisme des perroquets médiatiques, la France qui travaille contre le harcèlement autoroutier et les amendes distribuées aux braves gens… Il ne s’est jamais trompé. Et il faut lire son questionnaire de Proust ou l’interview de sa femme Jeannie qui parle de l’homme qu’elle connaît et qu’elle aime : le souvenir de ce Le Pen-là, entier, sincère, rigolard et romantique, droit et sympathique, excellent danseur, cultivé comme on ne l’est plus, optimiste et gai, qui chantait dès le petit déjeuner - ce souvenir-là serre carrément la gorge.

La presse nous reparle, chaque année, du personnage du « tonton raciste », mais celui que nous découvrons, dans ces pages pleines d’intelligence, de clarté et d’espérance malgré les vents contraires, est un personnage bien plus réel, bien plus familier : c’est un grand-père de légende, qui meurt très vieux mais sans avoir livré tous ses secrets, qu’on aime pour ses immenses qualités malgré ses immenses défauts, et à la hauteur de qui on espère se hisser un jour, avec l’appui des circonstances. Lisez vite ces entretiens lumineux : vous ne le regretterez pas.

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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

5 commentaires

  1. Énorme bourde de ma part : je me suis aperçu, trop tard hélas, que je m’étais mélangé les pinceaux dans les initiales, j’ai confondu JMLP et JLM, quelle horreur !!!… J’ai commencé ma phrase par « JLM c’est le pestiféré… » au lieu de « Jean-Marie Le Pen c’est le pestiféré de la politique comme Céline… » etc. Au temps pour moi !… JLM c’est plutôt M. le maudit de Fritz Lang ou Belzébuth en personne !

  2. Jean-Marie Le Pen était déjà un personnage hors normes pour ceux de sa génération mais au 21ème siècle, après son succès surprise au premier tour de la présidentielle de 2002, il est devenu plus que jamais l’homme qu’il fallait absolument haïr sous peine d’excommunication à gauche et de mise à l’écart ou au rebut à droite, sinon l’homme à abattre. Un homme hors du temps, inconcevable dans son existence même pour les dernières générations, celles des crétins et des pouffiasses qui sont allés « fêter » sa mort au Champagne sous le regard bienveillant, voire complice, des caméras. JLM c’est le pestiféré de la politique comme Céline est encore et toujours le pestiféré de la littérature. Leurs ennemis irréductibles leur ont collé une étiquette infamante sur le front, qu’il sera bien difficile de retirer si tant est que ce soit possible. Ils ont cristallisé sur leurs personnes toute la haine de leurs contemporains et, plus étonnant encore, celle de leurs descendants, une sorte de haine atavique.

  3. Ce que je remarque c’est que Mélenchon se permet de dire et de soutenir bien pires antisémistes et agresseurs que Jean Marie Lepen et cela ne dérange personne.Comme quoi !
    Je n’avais pas de sympathie particulière pour JMLP mais je lui reconnaissais un grand courage devant l’adversité et une propension à tenir un cap et ne pas se renier . Il n’a pas fait toute sa carrière sur l’antisémitisme mais on ne lui a reproché que cela sans voir qu’à côté il nous avertissait du pire à venir .Et c’était cela le plus important parce que le vrai antisémitisme était à venir et il est là. ironie de l’histoire .
    Tout cela ne.m’a pas empêché de voter pour lui en 2002 parce que je n’en pouvais plus ,justement de toutes ces trahisons et de cette cohabitation qui annonçait le front républicain, tout cela pour servir ,en fin de compte ,ce monstre bureaucratique européen pour lequel toute la classe politique s’est vautrée .
    En tout cas si on devait faire une biographie entre Lepen et mélenchon mon choix serait vite fait , melenchon n’étant qu’une pâle copie gauchiste de jean Marie Lepen ,et de plus une biographie écrite par l’excellent Nicolas Gauthier , alors, il ne faut pas bouder son plaisir .

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