[LIVRE] Révolution française et violence : un processus systémique

© Paris Musées CC0
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Nombreux sont les livres écrits sur la Révolution française. Celui de l’historien Hervé Luxardo met le doigt sur la violence systémique de cette période de l’Histoire de France, avec de nombreux faits à l’appui. Une violence célébrée joyeusement lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris cet été, devant un milliard de personnes.

Ce livre n’est pas un plaidoyer pour la monarchie de l’Ancien Régime : il cherche à rendre témoignage aux faits historiques mis sous le boisseau. « L’invocation de la violence dite révolutionnaire fut le paravent de bien des cruautés commises au nom de l’idée abstraite de la Révolution », explique l’historien. Ce ne fut pas une dérive ou un excès de zèle, mais la logique même de cette Révolution, malgré la clémence récurrente des contre-révolutionnaires dans les guerres de Vendée. Luxardo n’occulte pas la violence qu’ont pu avoir ces derniers, qui cependant n'était que dérive.

Tout au long de la Révolution, la liste des personnes à abattre - celles qui n’acceptaient pas la Révolution et ses idéaux ou qui manquaient de zèle - fut longue. Aujourd’hui, on les rangerait, mécaniquement, en dehors de l’arc républicain dans « l’extrême droite ».

La manipulation par la langue et les menaces

La novlangue, déjà, constitue une pierre angulaire du processus : « Ils abusent cruellement du mot peuple », déclarait Antoine Dulaure, historien du XVIIIe siècle. C’est en son nom que Marat invitait ses partisans à « lapider [les] représentants [de la Convention] s’ils n’allaient pas à sa fantaisie ». C’est au nom du « bonheur des peuples » que les révolutionnaires massacrèrent le « peuple », explique l’historien. Le « complot » faisait aussi partie de la prose révolutionnaire pour justifier la répression la plus arbitraire, quand aujourd’hui le terme de « complotisme » est utilisé par le pouvoir pour discréditer les voix dissidentes. Enfin, les Vendéens, au sens large, fidèles à Dieu et au roi, étaient criminalisés par le terme de « brigands » pour justifier les actes les plus barbares.

À l’Assemblée, les menaces de mort à la guillotine et les menaces physiques directes de la gauche montagnarde faussaient les votes. Le député François Granet de l’Oise portait en permanence un gros bâton « dont il ne cessait de menacer ceux qui ne votaient pas comme lui » ! La mort du roi a ainsi été obtenue à une voix près, au moyen de menaces de mort, de soumissions physiques et de coups de crosse à l’encontre des députés votants pensant mal.

Quand ils n’étaient pas exterminés, les suspects étaient perquisitionnés, arrêtés ou déportés. C’est ainsi que la Convention vota, en 1793, la « loi des suspects ». Tout le monde pouvait y passer : les directeurs de théâtre aux pièces ambiguës, les patriotes, les administrations pas assez dures avec les suspects et même les modérés jugés « dangereux » ! Pour cela, on pouvait compter sur le chargé de mission, Maignet et surtout Joseph Le Bon, ancien prêtre qualifié d’« ogre de Robespierre », qui traquait tous les faux patriotes déguisés.

Pas de quartier : un impératif cynique

« Je sais qu’il peut y avoir quelques patriotes dans ce pays : c’est égal, nous devons tout sacrifier », dit le général Grignon à ses soldats, en Vendée, en 1794. À La Jumellière (Maine-et-Loire), les républicains et les prêtres assermentés ont été tués par le général Cordelier. Dans toute la Vendée, les femmes, les enfants et les bébés à naître ont été fusillés ou passés au fil de la baïonnette. En pleine Terreur menée tambour battant par le Comité du salut public, David, du Comité de sûreté générale, déclara cyniquement : « Sous un gouvernement si beau, la femme accouche sans douleur. » Hervé Luxardo explique que les exactions de la Révolution répondent à la définition du génocide telle que présentée par l’Assemblée générale des Nations unies en 1948, puis par la Cour pénale internationale en 1998.

Un siècle après la Révolution, Clemenceau fait cette tirade dans l’Hémicycle qui en dit long : « Que nous le voulions ou non, la Révolution est un bloc […] Un bloc dont on ne peut rien distraire parce que la vérité historique ne lui permet pas. » Elle serait donc l'équivalent de la Révélation chrétienne dont la vérité ne saurait être négociée ! Précédant l’ancien ministre de l’Éducation nationale Vincent Peillon, il ajoute, en 1891 : « Cette admirable Révolution […] n’est pas finie, elle dure encore, [ayant toujours] les mêmes ennemis. »

Gabriel Decroix
Gabriel Decroix
Étudiant journaliste

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