[LIVRE] Une biographie de Jean Cau, journaliste-écrivain talentueux et libre

Capture d'écran © INA.fr
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Notre époque n’aime pas les non-conformistes. Jean Cau en est un. Passé du camp du Bien (auprès de Jean-Paul Sartre) au camp de la Réaction, cette plume exceptionnelle a aujourd’hui rejoint le Purgatoire des écrivains oubliés. Ludovic Marino et Louis Michaud ont eu la bonne idée et le mérite de lui consacrer un livre attachant, préfacé par Franz-Olivier Giesbert.

Dans les années 1960, les Français cultivés connaissent Jean Cau. Né dans un milieu très modeste dans l’Aude, le jeune garçon est pourvu de réelles capacités : son instituteur puis ses professeurs l’encouragent à poursuivre ses études. Ils ont eu du flair : Jean Cau intègre khâgne à Louis-le-Grand. Lui, la petite chose occitane, peine à supporter ses condisciples qu’il qualifie de « phraseurs puceaux ». Il veut devenir écrivain et découvrir le monde littéraire. Le jeune ambitieux prend un jour l’initiative d’adresser la même lettre à plusieurs figures littéraires en vue à l’époque : André Malraux, Albert Camus, François Mauriac, Henry de Montherlant, Louis Aragon et Jean-Paul Sartre… Seul Sartre lui répond, et c’est ainsi qu’il devient son secrétaire pendant une dizaine d’années. Il est ensuite journaliste et grand reporter à L’Express, au Nouvel Observateur, au Figaro et, finalement, à Paris Match jusqu’à sa mort. Ce brillant homme de plume est à l’origine de la célèbre signature de Match : « Le poids des mots, le choc des photos. »

Contre les écrivains « trafiquants »

Ce qui est reproché à Jean Cau, en plus de son évolution personnelle, même s’il conservera toute sa vie une certaine tendresse envers Sartre, c’est d’avoir du style : il est un écrivain tombé dans le journalisme. Un esprit qui fait mouche et refuse les faux-semblants. En lecteur avisé de Nietzsche, il adore déboulonner les fausses idoles. Un exemple de ses flèches : il oppose les écrivains « trafiquants » - Aragon, Hemingway, Malraux et Montherlant, à qui il reproche « de faire croire au lecteur que leur vie donne la pâte dont ils font leurs romans » - aux « saints », qui « n’ont jamais voulu faire croire aux lecteurs que leur œuvre était mariée à une action », tels Balzac et Homère.

On lui reproche également son indépendance d’esprit. C’est à la suite de certains de ses reportages sur la guerre d’Algérie qu’il fut congédié de L’Express. Jean Cau resta libre, quitte à en payer le prix. Et de droite : alors que la gauche a tendance à penser en fonction d’une idéologie, de chapelles et souvent d’un prêt-à-penser, la droite raisonne en termes de liberté et d’indépendance d’esprit. Sa liberté doublée d’un vrai éclectisme agace les belles âmes : il s’intéresse à tous les sujets et ne s’interdit rien. Le propre de l’honnête homme, mais un honnête homme enraciné. Un « somewhere », comme l’on dit maintenant, opposé aux « nowhere ». Dès qu’il obtient le prix Goncourt, il achète un appartement à Paris mais surtout une maison dans l’Aude. Car Jean Cau n’oublia jamais ses racines. Ni son goût pour la tauromachie, déjà décriée par l’intelligentsia. Il se fit également pourfendeur de la décadence qu’il voyait arriver à grands pas.

Tout lecteur de BV devrait se procurer cette biographie, écrite dans un style qui aurait plu à Jean Cau. L’occasion de parcourir, cet été, les bouquinistes, à la recherche des ouvrages de cet écrivain français : beaucoup n’ont pas pris une ride.

Patrick Beren
Patrick Beren
Ex-rédacteur en chef presse municipale, en retraite

Vos commentaires

5 commentaires

  1. Bonjour,
    Les auteurs sont Ludovic Marino et Louis Michaud. Le livre est édité par les Éditions Gallimard.
    Cordialement,
    Patrick Beren

  2.  » Le triomphe de la société  » Presse – Boutons  » : on achète, on consomme, on jette…. Jean Cau
     » Bientôt, l’âme liquidée, nous n’aurons même plus besoin de cerveau : les ordinateurs les remplaceront. C’est encombrant une âme…, c’est lourd une mémoire, et comme nos sociétés sont en perpétuelle fuite, vers la lune, l’espace, les vacances, les loisirs, les bouchons sur l’autoroute, le progrès et, bien sûr, le bonheur, j’allais l’oublier celui là, elles s’allegent pour que leur course soit plus rapide.
    Tout est léger, tout flotte ; l’amour, l’amitié, le devoir…. »
    Jean Cau.
    Quel visionnaire !

  3. Bonjour. Serait-il possible d’avoir le titre et l’éditeur de cette biographie de Jean Cau, grand journaliste et écrivain injustement oublié ?

  4. Très bon écrivain .je viens de relire croquis

    Très bon écrivain je viens de relire Croquis de Mémoire un régal ..je vous le conseille

Commentaires fermés.

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