[L’œil américain] Le Parti démocrate, considéré comme extrémiste, décroche

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À en croire les spécialistes de la communication politique, la meilleure façon de gagner une élection consiste à raconter une bonne histoire. À l’orée de cette nouvelle année, les démocrates semblent pourtant avoir renoncé à faire de Joe Biden le héros de cette histoire. Ce n’est pas faute d’avoir tenté, en cherchant notamment à vanter son bilan économique et écologique. Mais malgré ces efforts, sondage après sondage, le président octogénaire est apparu de plus en plus en difficulté avec la coalition électorale qui lui a permis de l’emporter il y a quatre ans. « C’est sombre », confiait, début décembre, au New York Times, un sondeur démocrate interrogé sur la situation.

Faire baisser la popularité de Trump

À défaut de parvenir à faire remonter la cote de popularité du président candidat, son équipe s’attèle désormais à faire baisser celle de son adversaire en recyclant une bonne vieille... histoire, dont Donald Trump est l’anti-héros. Une histoire effrayante, à dire vrai.

Lors de son premier grand discours de campagne, le 5 janvier dernier, Joe Biden a commencé par replonger son auditoire au XVIIIe siècle en évoquant le combat du général George Washington contre l’Empire britannique. L’armée américaine avait une mission, à l’époque, expliquait-il : la défense de la liberté et de la démocratie.

246 ans plus tard, à la veille du troisième anniversaire de l’émeute du Capitole, la question était alors de savoir si la défense de la démocratie était toujours « la cause sacrée de l’Amérique ». Joe Biden l’affirmait : « C’est l’enjeu des élections de 2024. » « Les attaques de Trump contre la démocratie ne font pas seulement partie de son passé. C'est ce qu'il promet pour l'avenir », ajoutait-il.

Joe Biden contre Donald Trump, la démocratie contre la dictature. C’est l’histoire pour la présidentielle de 2024. Mais cette histoire-là pourrait finir par lasser. Surtout, elle masque un tout autre récit, celui vécu au quotidien par nombre d’électeurs, ces dernières années. Pour le raconter, nul besoin d’aller chercher un fan de Donald Trump. Ce sont les démocrates qui en parlent le mieux.

Une autre histoire

Comme Will Marshall, président d’un groupe de réflexion de centre gauche, interrogé lui aussi par le New York Times, le mois dernier, qui présente le problème électoral de Biden de la façon suivante : non seulement il perd les électeurs de la classe ouvrière blanche avec des marges énormes, mais il perd aussi les électeurs de couleur sans diplômes universitaires.

Or, d’après lui, cette désaffection grandissante de l’électorat populaire est la conséquence de l’arrivée en nombre de Blancs diplômés qui ont entraîné le Parti démocrate du côté de la gauche dogmatique. « Les jeunes progressistes, explique-t-il, ont identifié le parti avec des positions sur l’immigration, la criminalité, le genre, le changement climatique et la résistance palestinienne qui sont si éloignées du sentiment dominant qu’elles peuvent même éclipser l’extrémisme MAGA [Make America Great Again, slogan de Trump]. »

Une analyse à contre-courant qui insiste donc non pas sur la radicalisation du Parti républicain mais sur celle du Parti démocrate. Et, de fait, en septembre dernier, un sondage Morning Consult a montré que les électeurs américains percevaient le Parti démocrate comme plus extrême, idéologiquement, que le Parti républicain, avec un écart de 9 points. L’enquête a également révélé une forte augmentation de la part d’électeurs démocrates considérant que leur parti est trop à gauche. Cette part a pratiquement doublé depuis 2020, passant de 11 % à 21 %.

« Des questions d'idéologie à celles de la compétence générale, les démocrates ont perdu la confiance des Américains depuis 2020 et le Parti républicain a le vent en poupe », notait l’enquête. On est donc bien loin d’un problème se réduisant à l’attractivité de Joe Biden. Or, ce qui est intéressant, c’est le point de départ de cette perte de confiance de l’électorat à l’égard des démocrates : 2020.

Le tournant des émeutes Black Lives Matter

Même si Biden est parvenu, cette année-là, à stopper l’hémorragie de l’électorat blanc populaire, en jouant notamment sur ses origines modestes, les démocrates ont néanmoins subi une forte baisse du soutien de l’électorat populaire de couleur. Comme l'a montré David Shore, un spécialiste des données électorales venu de la gauche, le point d’inflexion de cette baisse est lié aux émeutes qui ont suivi la mort de George Floyd, au cours de l’été 2020, et à l’exposition médiatique des éléments les plus radicaux du Parti démocrate réclamant, aux côtés des militants Black Lives Matter, le « définancement de la police ».

« Ce qui s’est passé en 2020, c’est que les conservateurs non blancs ont voté pour les républicains à des taux plus élevés », note Shore, et particulièrement les Hispaniques ayant des opinions conservatrices sur la criminalité, le maintien de l’ordre et la sécurité publique. Depuis, la tendance à l’effritement de la base électorale du Parti démocrate n’a cessé de se renforcer. D’après un récent sondage USA Today, le soutien des électeurs noirs à Biden est, en effet, passé de 87 %, en 2020, à seulement 63 %. Celui des électeurs hispaniques de 65 % à 34 %.

Et ce n’est pas uniquement lié à des préoccupations économiques, comme le montrent d’autres sondages. L’immigration devenue hors de contrôle et l’explosion de la délinquance depuis 2020 sont également considérées par les Américains comme des enjeux majeurs. Une enquête Democracy Corps de novembre dernier dans les États clés a constaté que les électeurs noirs, hispaniques et asiatiques considéraient la criminalité comme leur deuxième principale préoccupation.

Alors que les électeurs s’inquiètent surtout du coût de la vie, de la violence et de l’immigration, les démocrates parlent d’économie forte et des points qui s'améliorent, notaient les auteurs de l’enquête. « On dirait qu’ils parlent d’un pays différent », ajoutaient-ils. Désormais, Joe Biden parle de Trump contre la démocratie. Un pays différent, une histoire différente.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 17/01/2024 à 23:16.
Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

Vos commentaires

25 commentaires

  1. Quoi que nous disions ou pensons, Quoi qu’en disent nos politiciens nationaux ou européens, les américains s’en fichent et voterons comme bon leurs semble, car ne l’oublions pas les américains dans leur grande majorité ne votent pas pour un parti mais pour une politique et si celle ci n’est pas appliquée elle est sanctionnée lors des élections de mi-mandat , hé pis c’est tout

  2. « « Joe Biden a commencé par replonger son auditoire au XVIIIe siècle en évoquant le combat du général George Washington contre l’Empire britannique. L’armée américaine avait une mission, à l’époque, expliquait-il : la défense de la liberté et de la démocratie.« « 
    ce type est à l’origine du Bussing interdit aux Noirs et quelqu un le lui rappelle en direct à la Primaire démocrate : elle courrait à pied derrière le bus scolaire : KAMALA HARRIS !!
    c est trouvable puisque je l ai vu en direct comme tout le monde !!
    Le Français a toujours eu l Œil de Chimène !

  3. Je préfère 1000 fois mieux un président comme Trump(qui a refusé d’être payé) que des gamins qui ne connaissent rien en politique et qui se sont vendus,pour anéantir le pays,au moins Trump défend son pays contre les migrants venant de tous les pays et provoquant ce racisme anti-blanc.

  4. les USA s’apprêtent à élire un Président de 77 ou 81 ans ! …….. Comment se fait-il que n’émergent pas des homme bien plus jeunes ?

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