Logement social : LR s’oppose à la préférence nationale voulue par le RN

Capture écran Assemblée nationale
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« Derrière chaque LR se cache un traître ». Cette réaction vigoureuse de Julien Odoul (député RN de la 3e circonscription de l’Yonne), sur son compte X le 29 janvier, fait suite à un échange courtois mais rugueux, le jour même, lors d’une séance de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale.

Des travailleurs sans accès au logement

A l’ordre du jour figurait une « proposition de loi visant à prioriser les travailleurs dans l’attribution de logements sociaux », texte déposé par le groupe LR le 3 décembre 2024. La proposition, si elle était adoptée, modifierait l’article L. 441-1 du code de la construction et de l’habitation, en ajoutant à la première place des candidats prioritaires à un logement social les « personnes en activité professionnelle ». Et comme l’expriment ses motifs, cette disposition permettrait ainsi de venir en aide aux « Français aux revenus modestes » pour qui « accéder à un logement abordable est devenu un véritable parcours du combattant, notamment dans nos grandes métropoles. À Paris, Lyon, Marseille, mais aussi dans de nombreuses villes de taille moyenne. Un jeune actif au salaire minimum de croissance (SMIC) peut se voir contraint de consacrer plus de 50 % de ses revenus à son loyer ».

Priorité aux Français ?

Premier à poser une question lors de cette séance en commission, Frédéric Falcon (député RN de la 2e circonscription de l’Aude) estime que cette proposition de loi « apparaît bien loin de ses objectifs et se focalise sur une modeste révision des conditions d'attribution ».  Et il s’'interroge sur les critères actuels d’attribution des logements : « Comment expliquer que tant de nos compatriotes, qui travaillent, qui cotisent, se retrouvent relégués en bas des listes d'attente ? Cette situation est le fruit d'une gestion laxiste, aveugle aux priorités nationales, et d'un refus idéologique d'affirmer que les Français doivent être prioritaires dans leur pays ». Pour lui, « il est temps d'instaurer la priorité nationale dans l'attribution des logements sociaux, alors que deux millions de nos compatriotes sont sur liste d'attente ».

Invité à répondre, le rapporteur de la proposition de loi, Vincent Jeanbrun (député LR de la 7e circonscription du Val-de-Marne), étonnamment, se garde de partir sur le terrain de la probable non-constitutionnalité de la préférence nationale appliquée au logement social. Veut-il ainsi éviter d’emboîter le pas au socialiste Laurent Fabius, encore président du Conseil constitutionnel jusqu’au 7 mars prochain ?

Une préférence nationale inconstitutionnelle ?

Dans un entretien accordé au quotidien Le Monde le 6 mai 2024, Fabius, interrogé sur la « préférence nationale » figurant dans le programme électoral du RN, avait répondu : « Il n’entre pas dans mes fonctions de me prononcer sur le programme de tel ou tel mouvement politique. Je me bornerai à dire, puisque c’est constant, que la préférence nationale – appliquée de façon systématique – est contraire à la Constitution ». Appliqué à l’attribution d’un logement social, ce principe rendrait ainsi inconstitutionnelle l’introduction de la nationalité française dans la liste des critères prioritaires d’attribution.

Le rapporteur Jeanbrun s'y oppose. Il fait une allusion à la Constitution, en invitant « à ne pas fermer ce qui fait la beauté de notre République, à savoir qu'elle est universaliste et qu'elle regarde comment vous agissez et non pas d'où vous venez ». Prenant en exemple les métiers de santé, il pointe une nécessité économique : « Nous n'arriverions pas à attirer du personnel dans ces hôpitaux sans pouvoir les loger à proximité ». Et poursuivant son raisonnement, il fait remarquer que « quand vous êtes soigné d'un cancer, vous vous moquez bien de savoir si la personne est de nationalité française depuis quatre générations ou si elle arrive d'un autre pays pour vous soigner, vous ou vos proches ». Et le député LR de dévoiler enfin le fond de son argumentation : « la question est donc de savoir si ces personnes qui travaillent sont utiles à notre pays et non pas de savoir quel est leur arbre généalogique ».

La guerre des "métiers en tension"

Nous y voilà enfin. Les métiers en tension. L’exemple hospitalier n’a évidemment pas été choisi par hasard. Si les propos sont restés feutrés, à la mesure de l’atmosphère ronronnante qui est de mise en commission (du moins tant qu’un élu LFI ne décide pas de mettre le bazar), il n’en ont pas moins mis en relief deux conceptions antagonistes : préférence nationale contre préférence économique, véritable pierre d’achoppement entre le patriotisme social du RN et le fond de libéralisme, à l'occasion immigrationniste, auquel est resté attaché LR.

Alors que monte la tension, avec menaces de censure à la clé, autour des dispositions que pourrait contenir le texte budgétaire concernant l’admission au séjour de clandestins travaillant dans des métiers dits « en tension », on comprend mieux le coup de sang de Julien Odoul.

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Jeanbrun doit souffrir du syndrome de Stockholm. Il a visiblement oublié que sa famille et lui-même ont été menacés et que sa maison a failli être incendiée lors des émeutes de « Nahel » . Pas étonnant que la France aille si mal avec une telle « casse » politique !

  2. « la préférence nationale – appliquée de façon systématique – est contraire à la Constitution » ??? Et moi qui croyais bêtement que la constitution avait été soumise par le Général au peuple Français qui l’avait ratifié très largement. Oui ! Ratifiée par le peuple Français ! Autrement dit, la préférence nationale est implicite dans la constitution ! Mais je ne suis pas aussi subtil que Fabius et ses amis…

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