Loi agricole : un trompe-l’œil pour calmer les colères syndicales

La loi agricole votée in extremis par le Parlement, la veille de l’ouverture du Salon de l’agriculture, avait pour but de donner des gages à la FNSEA et à la Coordination rurale pour éviter les incidents de l’an dernier. Et comme il fallait qu’après leurs imposantes manifestations, les syndicats donnent à leurs troupes le sentiment d’avoir gagné quelque chose, les déclarations d’intention du gouvernement ont provisoirement suffi à calmer le jeu. En fait, la nouvelle mouture de cette loi qui a franchi les épreuves de trois gouvernements successifs en moins d’un an a négligé l’essentiel : la chute du revenu des agriculteurs, l’ouverture inconsidérée de nos marchés à la concurrence extérieure et la sur-transposition française des normes européennes.
Résister au terrorisme écologiste
Et sans être naïf, peut-on croire à l’engagement du gouvernement qu’il n’y aura pas plus de régression de souveraineté alimentaire que de régression environnementale ? Pour réglementer cet équilibre introuvable, on souhaite bien du plaisir aux juristes des Assemblées ; ils devront traduire en décrets cette contradiction sous la surveillance agressive des écolos pour qui le gouvernement a entrelardé la loi de mesures qu’ils lui ont dictées ; qu’en sera-t-il, aussi, de la reconnaissance d’une présomption d’urgence pour autoriser les bassines sans qu’un conflit n‘embrase les campagnes ?
Un second volet de la loi a réuni une unanimité facile : la formation des jeunes agriculteurs. Elle ne fait qu’enfoncer des portes ouvertes, car la plupart de ceux qui s’installent sont diplômés, ingénieurs ou titulaires d’un bac agricole. Et depuis la loi d’orientation de 1960, chaque département est pourvu d’un lycée agricole qui développe maintenant une formation aux métiers de l’environnement pour faire son plein d’effectifs. Serait-ce pour former des agents de biodiversité, alors qu’ils sont déjà 3.000 à contrôler les paysans ?
Plongée des exportations
Sous couvert de cette loi agricole limitée dans son objet et sans portée réelle sur les causes de son effondrement, déclarer « ériger l’agriculture au rang d’intérêt général majeur » est une provocation au regard de la plongée abyssale des exportations agroalimentaires françaises. Ce volontarisme de pacotille donne l’image d’un pompier qui veut éteindre un incendie avec un arrosoir.
C’est affligeant. En réaction il conviendrait de profiter du calme relatif pour ouvrir d’urgence trois chantiers : le premier serait de faire voter une loi générale rectificative des 137 sur-transpositions françaises du droit européen qui créent des distorsions de concurrence en défaveur de nos paysans. Voilà plus d’un an que la promesse a été faite de revoir à la baisse les normes françaises… sans suite.
Le deuxième chantier serait d’apporter une réponse à l’effondrement du revenu agricole. À chacun sa part de soutien ; à l’État la sienne, financière en interne, plus volontaire sur la scène européenne, plus agressive sur les marchés mondiaux. Aux organisations professionnelles d’y apporter leur concours. Pour cela, les grands groupes coopératifs doivent privilégier la rémunération de leurs adhérents plutôt que de mobiliser, voire gaspiller, leurs ressources à des acquisitions de sociétés dont on s’interroge sur le bénéfice que leurs coopérateurs peuvent en attendre. Dans le même sens, le Crédit agricole fondé par les paysans et encore par eux maîtrisé ne pourrait-il pas consacrer une part significative de ses 9 milliards de résultats annuels au soutien des jeunes agriculteurs nouvellement installés, plutôt que de financer le Qatar par PSG interposé ?
Un défi pour François Bayrou
Le troisième chantier est de la responsabilité de François Bayrou, zélé promoteur de l’Europe fédérale. Il n’a pas d’autre choix que de croiser le fer avec la Commission européenne pour reprendre l’acquis perdu de notre souveraineté agricole. C’est déjà trop tard pour le Mercosur, aucun État membre ne pourra s’opposer à sa mise en œuvre : il suffit de lire les textes donnant toute autorité à la Commission pour s’en convaincre. En revanche, le retour à une politique agricole conquérante est possible, sous réserve de revenir à la PAC qui donnait toute satisfaction… jusqu’aux accords sur le commerce international de Marrakech et le traité de Maastricht. Pour cela, François Bayrou, Premier ministre, dispose de deux atouts majeurs. Un droit de veto en appel au compromis de Luxembourg tel qu’il a été appliqué dans le passé ; un état de contributeur net de la France au financement de l’Europe qui l’autorise à parler haut et à peser lourd dans les décisions à prendre.
Pour lui, c’est une épreuve de vérité entre son militantisme européen et son devoir d’homme d’État.

Pour ne rien rater
Les plus lus du jour
LES PLUS LUS DU JOUR

15 commentaires
Il faudrait déjà commencer par virer tous les écolos des ministères. celà fait 20ans qu’on dit qu’il faut dénormer et, tous les ans, on en créées de nouvelles.
Que du vent, l’ue avant tout et à n’importe quel prix pour les nations d’Europe qu’ils faut mater.
Toute la Macronie entourée au Salon par les habituels courtisans, FNSEA et affiliés. Tous complices de la destruction de l’agriculture française et de son exceptionnelle qualité. Et ils ont le front de venir faire leurs kékés au salon où est justement présenté ce que notre agriculture fait de mieux, et qu’ils regarderont disparaître en nous disant après coup « qu’ils n’y pouvaient rien ».
La politique du remembrement de l’après-guerre… On a poussé les agriculteurs à raser les talus et les haies qui permettaient de gérer l’humidité des terres, qui protégeaient les bêtes du soleil, qui favorisaient le développement d’une biodiversité (oiseaux, abeilles,…) indispensables au développement des ressources naturelles. On a incité, voire obligé, les éleveurs à pratiquer l’élevage intensif en créant des conditions de vie des animaux innommables… Tout ça pour voir aujourd’hui des agriculteurs arroser des champs à perte de vue, en plein été, sous un soleil de plomb, pendant des heures… Quid de la gestion raisonnable et intelligente de l’eau ? Laquelle eau serait bien mieux à attendre de servir, en restant à l’abri dans les nappes phréatiques pour être pompée en temps que de besoin, plutôt que de stagner dans des « bassines » sous le même soleil de plomb, avec l’évaporation, donc la perte d’eau qui en découle… Toute cette eau pour, de surcroit, cultiver du maïs qui en demande beaucoup, pour – mal – nourrir des bêtes la plupart du temps entassées dans ce qu’on ne peut plus qualifier d’étables. Que les agriculteurs français reviennent à une agriculture raisonnée, comme ce fut le cas pendant des siècles. De vraies richesses sont encore possibles sur nos terres, comme la culture du lin qui a fait la richesse, en particulier en Bretagne avec les « toiles fines » issues de la culture florissante de ce lin. C’est un produit écologique et très demandé par l’industrie textile du monde entier…. Que nos « gouvernants » prennent enfin des décisions à la hauteur des enjeux pour notre pays : refus du Mercosur et autres achats de produits de mauvaise qualité et relance d’un modèle agricole français basé sur la qualité des produits tant pour les hommes que pour les animaux et, bien sûr, rémunérateur comme la culture du lin. Les bonnes méthodes existent dans certaines de nos régions comme en Savoie où les bêtes, particulièrement bien nourries, été comme hiver, et dans un environnement agréable, donnent un lait permettant la production de délices comme le Beaufort ou la Tome de Savoie. Pas de maïs dans les alpages mais du foin pour l’hiver et des espaces fleuris pour les vaches l’été. Quant aux porcs et aux volailles présents près des chalets d’alpage où s’activent les fruitiers qui produisent le fromage, ils sont élevés en plein air avec tout ce que ça peut leur apporter en bien-être. Tout le monde doit s’y retrouver, les hommes comme les bêtes.
Je n’ai pas l’habitude de donner mon avis, mais je dois dire que votre commentaire me va droit au coeur, en tant que fille d’agriculteur (de Haute-Savoie). Dieu merci, mon père n’est plus là pour voir ce désastre, lui qui nous a quittés à 67 ans sans avoir pris sa retraite, et dont les seuls jours de vacances de toute sa vie de paysan ont été les 3 jours partis à Nice avec ma mère pour leur voyage de noces…
J’ai connu de près un agriculteur et éleveur de vaches laitières , vous caricaturez un peu le tableau , celui ci cultivait les céréales dont le maïs qu’il donnait à ses bêtes . Il diversifiait sa nourriture par le fourrage , et il sortait ses bêtes aux beaux jours ce qui est logique, il me semble , dans certaines régions.
Je refuse que les petits hommes gris d stigmatisent des gens qui sont très au fait de ce qu’ils font et qui consacrent des heures à leur métiers par amour de leur bêtes et du lait qu’elles produisent , même si la personne en question ne manquait une occasion pour se faire une bonne côte au barbecue « n’en déplaise à Sandrine » de temps à autres arrosé d’un bon bordeaux Il avait confiance en ce qu’il produisait en viande comme en lait .
J’ai bu un litre de lait complet venant directement de sa traite, une merveille , pas de maux de ventre ni rien , alors que je supporte modérément les produits laitiers à 69 ans !
Et ses côtes de bœufs , je ne crois pas en avoir mangé d’aussi bonnes . Mis à part cela , il détestait les écolos donneurs de leçon mais pas donneur de leur temps de travail !
Je n’en dirais pas tant des produits stérilisés ou pasteurisé qui abondent sur le marché et mis en place par une UE qui a aseptisé presque totalement notre production fromagère qui est liée au terroir qui détermine le cru de l’endroit où ils sont produits et donc ne peuvent supporter la standardisation .Tout cela au nom de l’hygiénisme , et avec des verts et écolos très présents au parlement européen.
Les » somewhere » ancrés dans leur terroir contre les « anywhere » du relativisme et du tout ce vaut !
J’ai connu cette France des haies et bosquets ( l’Ouest breton, angevin et normand ayant été les plus longs à résister), et je me souviens des visages décomposés, navrés,atterrés de mes grands’oncle et tante à l’annonce du remembrement, ses magouilles, ses marchandages et ses paperasses..
L’Europe et nos gouvernants ne se contentent pas d’agir… Ils parlent !
Toutes les lois et mesures en faveur , mais plutôt e défaveur des agriculteurs sont le fait des gros exploitants céréaliers et homme d’affaire et de la Commission bruxelloise . Le petit paysan n’a plus qu’a disparaitre ( et malheureusement c’est ce qui est en train de se passer ) et nous européens condamnés à manger de la m…. mondiale
bayrou , européiste forcené depuis le début de sa carrière politique va s opposer a l ue ??? pour cela il ne fallait pas accepter que la compétence des traités commerciaux soit réservé a l UE….
comme pour l immigration tous ceux qui acceptent de rester dans l europe savent qu ils mentent aux Français…
l exemple de meloni et de l immigration en italie est clair pourtant…
Il est très surprenant ce silence de nos agriculteurs, en discutant avec eux on s’aperçoit qu’ils ne sont pas dupes, malgré leurs syndicats achetés ils sont prêts,le mercosur signe ça va éclater
Monsieur « l’ancien ministre », vous avez fait de votre conclusion la nécrologie de Bayrou en écrivant :
« Pour cela François Bayrou, Premier ministre, dispose de deux atouts majeurs. Un droit de véto en appel au compromis de Luxembourg tel qu’il a été appliqué dans le passé ; un état de contributeur net de la France au financement de l’Europe qui l’autorise à parler haut et à peser lourd dans les décisions à prendre.
Pour lui c’est une épreuve de vérité entre son militantisme européen et son devoir d’homme d’État. »
Il faut oser écrire « Pour lui c’est une épreuve de vérité en parlant de « devoir d’home d’Etat » en le mettant en miroir avec ses convictions pour une UE fédérale » ! …
Si vous avez encore des « espoirs » ou des doutes , allez regarder précisément ce politicard qui cherche un verre d’eau qui est devant lui et qui ne sait même plus dire quel est « l’intitulé » de son comité interministériel des contrôles de l’immigration » ! …
En France, il n’y a pas « un TRUMP » mais il y a bien un « Biden » ! …
Parfait. Pour deux qui y croyaient.
L’Europe a tué l’industrie automobile avec l’aberration du tout électrique, dont personne de raisonnable ne veut. Mais elle a tué aussi notre agriculture. Il ne lui reste donc plus rien à tuer, sauf elle-même, en se faisant Harakiri. Le plus tôt sera le mieux.
Vœux pieux