Loi fin de vie : ce sont les Belges qui en parlent le mieux…

« Il n’y a aucun besoin d’être un catho réac pour être contre l’euthanasie » : lors d'un débat organisé par Le Figaro, jeudi 3 avril, l'écrivain Michel Houellebecq jetait le pavé dans la mare et bousculait quelques certitudes. Après une interruption - dissolution oblige -, le sujet revient de plein fouet dans l'actualité avec, ce mardi 8 avril, l'examen en commission des affaires sociales à l'Assemblée nationale des deux textes sur la fin de vie. À peine déposé, celui sur la légalisation de l'aide active à mourir soulève déjà de nombreuses contestations. Des personnalités s'alarment d'une telle proposition de loi déterminée sur des critères « flous et subjectifs », objet d'une « procédure trop expéditive », parmi lesquelles Jean Leonetti, coauteur de la loi actuelle sur la fin de vie, et deux ex-ministres de la Santé groupés au sein d'un nouveau collectif « Démocratie, Éthique et Solidarités ». L'occasion, pour BV, de revenir sur les pratiques euthanasiques belges dans un pays qui pratique le droit à mourir depuis plus de 20 ans avec, à l'appui, un témoignage privilégié, celui d'Alain Destexhe, médecin et sénateur honoraire belge qui, à l'occasion de son mandat, a participé aux travaux préparatoires de la loi belge.
En Belgique, pas de réelle opposition mais des pressions militantes extrêmement fortes
C'est en 2002 qu'en Belgique, la loi légalisant l'euthanasie a été votée après une année d'examen « sans réelle opposition », se souvient le sénateur honoraire. Car contrairement à ce qui s'observe en France, explique-t-il à BV, « il n'existe pas (chez nous) d'opposition structurée militante et organisée face à l'euthanasie. À l'époque, seuls les élus des deux partis sociaux-chrétiens ont voté contre. » En revanche, il a été particulièrement marqué par la pression extrême que faisaient peser les associations militantes, et particulièrement l'ADMD (Association du droit à mourir dans la dignité, également très active en France), qu'il décrit comme « présentes en permanence dans les couloirs à toutes les auditions de la commission ». Un activisme qui a porté ses fruits mais qui laissera les militants insatisfaits désireux d'aller toujours plus loin, jusqu'à l'euthanasie des mineurs.
Euthanasie des mineurs et autres cas limites
Ce sera chose faite en 2014, année où la Belgique devient le premier pays à permettre l'euthanasie sans condition d'âge. Alain Destexhe, qui précise n'être pourtant « pas philosophiquement et catégoriquement opposé à l'euthanasie », avoue à BV avoir été très choqué par cette revendication « car, à l'époque, nul parlementaire, nul professionnel, nulle famille ne réclamaient cet élargissement ». Lors des débats, le docteur Sariban, chef de la Clinique de cancérologie à l'Hôpital des enfants Reine-Fabiola à Bruxelles, avait pourtant témoigné devant les parlementaires qu'il « n'y avait aucune demande, que les demandes d'euthanasies de mineurs étaient extrêmement rares ; quand elles se présentaient, ça se gérait entre la famille et le médecin... » Une parole forte qui n'a pas empêché le vote. Moins de deux ans plus tard, le premier mineur belge était légalement euthanasié.
Cet élargissement de la loi devrait interpeller nos parlementaires. D'autant que le bilan global de la Belgique est objectivement inquiétant. Le nombre d'euthanasies (33.615 depuis 2002) ne cesse de progresser, augmentant de 15 % entre 2022 et 2023. Parmi elles, « des cas très limites au regard du cadre de la loi », s'inquiète Alain Destexhe, qui cite deux exemples : celui de cette femme condamnée à la prison à perpétuité pour avoir égorgé ses cinq enfants et qui a obtenu le droit à mourir « pour souffrances psychologiques » ou celui de Shanti de Corte, 23 ans, rescapée des attentats de Bruxelles, euthanasiée en 2022 parce qu'elle ne supportait plus son syndrome post-traumatique.
Des chiffres... terrifiants
On est peut-être encore loin du compte. Car selon le rapport bisannuel de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie de janvier 2022, dans 19 % des cas euthanasiques répertoriés, le décès des patients n’était pas « attendu à brève échéance ». En Belgique, les médecins ne sont pas tenus de faire une déclaration officielle lorsqu'ils prélèvent un organe sur le corps d'une personne euthanasiée, mais malgré tout, cette déclaration a été faite pour 12 patients. Or, parmi ces 12 personnes euthanasiées sur lesquelles on a prélevé des organes, 9 n'étaient pas condamnées à brève échéance. Par ailleurs, cette commission de contrôle interroge, dans la mesure où, à la publication de chacun de ses bilans, elle prend soin de préciser « n’avoir pas la possibilité d’évaluer la proportion du nombre d’euthanasies déclarées par rapport au nombre d’euthanasies réellement pratiquées ». Le docteur Alain Destexhe ne se fait guère d'illusion quant à son efficacité : « C'est une chambre d'enregistrement qui ne contrôle rien, je n'ai même pas souvenir qu'il y ait jamais eu de signalement. »
Un peu plus loin, au Canada, vingt ans après également, la situation euthanasique n'est guère plus encourageante. En témoigne le professeur d'éthique Theo Boer, pourtant ancien partisan du droit à mourir, dans les colonnes du Monde. De quoi pousser un peu la curiosité au-delà de nos frontières.
Pour ne rien rater
Les plus lus du jour
LES PLUS LUS DU JOUR

39 commentaires
Quand la vie devient une souffrance, il n’y à parfois pas d’autre issue que de la quitter… Cette possibilité est très encadrée en Belgique et je pense qu’il n’y à aucun abus. Quand on veut mourir, mieux vaut le faire dans le confort d’un hôpital, entouré de ses proches que se suicider seul et de façon parfois douloureuse. En Suisse, la possibilité existe aussi et beaucoup moins encadrée…
Instaurons à nouveau la peine mort pour les cas extrêmes qui ont tué afin de libérer des places dans nos prisons et cela sans tenir compte de l’age ni du sexe.
Je me demande si les avortements ne sont pas une fourniture gratuite de tissus vivants pour certains laboratoires
Avec l’euthanasie à tout âge on va rajouter les organes….
Facile de débattre sur un sujet lorsqu’on n’est pas concerné. Il y a trente ans, en Belgique, l’euthanasie n’était pas légalement possible; cependant elle était parfois appliquée dans certains établissements (à la demande du patient). Voici trente ans, subissant d’intolérables douleurs, après six tentatives de suicide, ma maman – que j’avais sauvée à chaque essai – a réussi, en allant se jeter une nuit d’hiver dans le cours d’eau le plus proche. D’après l’autopsie, la mort aurait été instantannée par hypothermie. Lorsque la possibilité d’euthanasie a été légalisée, j’ai éte ravie, d’autant plus que les formalités à remplir permettent de choisir ce que l’on veut et ce que l’on refuse. Et ces documents sont remplis en plusieurs exemplaires (un pour le médecin traitant, un pour l’administration de la ville, etc.). J’y ai inscrit TOUTES mes volontés, parce que je refuse d’être à charge de mes enfants ou de la société. Actuellement octogénaire, je jouis d’une excellente santé (5€ par mois chez le pharmacien), mais personne n’est à l’abri d’un attentat, d’un coup de couteau ou d’un conducteur ivre. Réfléchissez, tous.
Melvin, personne ne vous blâme pour cela mais beaucoup de gens on peur des dérives.
» J’y ai inscrit TOUTES mes volontés ». Actuelles. Etes-vous certaine qu’elles n’auront pas changé si vous êtes au pied de la décision?
avez vous remarqué cette frénésie de mort qu’a la macronnie? Pendant la COVID, la préoccupation principale du ministre de la santé était que le nombre d’avortements ne baisse surtout pas ( plus de 200000/an…. il est vrai compensé par 500000 entrées allogènes sur la même période!)? la possibilité d’avorter jusqu’à la naissance de l’enfant pour » détresse morale ou sociale »… et maintenant l’élimination des vieux et des malades. La macronie aura suicidé la France avec une frénésie incomparable!
La république des vampires.
Toutes ces lois soi-disant éthiques n’ont qu’un seul but: supprimer les interdits du décalogue,l’un des fondements de notre civilisation. Le « tu ne tueras point » est en train de devenir: tu peux tuer mais donne l’impression que c’est raisonnable. L’avortement devait être une loi d’exception, bien encadrée. Tous les « verrous » ont sauté et depuis la légalisation de l’avortement 10 MILLIONS d’enfants ne sont pas nés. Parmi eux, certainement des Staline, mais tout aussi certainement des Einstein et des Mozart. Ces dérogations au « bien commun » ne devraient même pas être pensées.
l’ADMD est une officine d’obédience maçonnique. Ce qui explique ses positions et son activisme.
Par deux fois elle m’a « invitée » dans ma région, par le biais de la MGEN, à voir un film sur l’euthanasie ! Elle peut toujours courir ! Les mutuelles ont-elles compris qu’elles vont supprimer leur fond de commerce ?
Qu’est devenue la Belgique, ce plat pays autrefois si agréable et si aimable à vivre ? Sous la poussée de quelques politiques déjantés, voire même complètement fous, généralement de gauche voire plus,on commence à y entrevoir les portes de l’enfer. Et ce n’est pas le brave petit Roi, timide, apeuré et dessaisi de tout pouvoir qui peut y remédier. La seule solution ne peut venir que du peuple lui-même mais il faut, tout comme en France d’ailleurs, qu’il se réveille avant qu’il ne soit trop tard.
Pourquoi caricaturer ? Si le contre-argument réside dans ce qui concerne les mineurs, limitons la réforme aux majeurs. Votre article annonce l’évocation de « (gros) intérêts financiers » sans que vous les développiez. Mais, à supposer même que les mutuelles exercent des pressions pour obtenir la légalisation du suicide assisté, ces pressions retirent-elles quoi que ce soit à la légitimité des individus qui réclament cette réforme ? La demande de suicide assisté exprimée par une personne condamnée à une lourde peine de prison vous semble-t-elle un argument pour s’opposer à cette réforme ? Préféreriez-vous lui imposer de souffrir durant des années, et au nom de quoi ? L’augmentation du nombre des candidats au suicide assisté que semble connaître la Belgique ne vous semble-t-elle pas le symptôme d’une justification de la réforme ? Je ne réponds pas aux autres commentaires : je dis seulement très respectueusement à leurs auteurs que la passion qui s’exprime à travers ces propos (décadence, loi assassine, carnage, acharnement à tuer les vieux, …) ne répond pas à ceux qui revendiquent le droit au suicide assisté pour eux-mêmes et personne d’autre.
On ne détruit pas soi-même ce que Dieu et/ou la nature a bâti !
je peux comprendre que des personnes puissent vouloir cesser de souffrir (ce qui n’est pas la même chose que vouloir mourir, comme le souligne si pertinemment M. Houellebeq. Mais ça ne leur donne pas le droit d’exiger que la société les approuve et surtout le droit d’exiger que la société les y aide. C’est une décision purement personnelle et privée.
On oublie de préciser ce qu’une survivante du programme canadien MAID explique. La première injection sert à vous paralyser, afin que personne ne voie que la deuxième injection vous fait vous noyer dans des souffrances horribles .