Loi immigration : la énième loi et les éternels problèmes

« On veut ceux qui bossent, pas ceux qui rapinent. » Dans l’Hémicycle, Gérald Darmanin affûte ses arguments face à son aile droite qui redoute l’appel d’air, et son aile gauche qui le craint trop répressif. Trier le bon grain de l’ivraie, voilà le cap fixé par le locataire de la Place Beauvau qui tient à laisser son empreinte dans la législature. « 22 lois en trente ans » sur l’immigration, rappelait Benoît Hamon sur France Info.

Là encore, le ministre de l’Intérieur fait ce qu’il sait faire : débattre, piéger, refermer les angles de tir, mimer un repli pour mieux contre-attaquer… Régulariser ceux qui bossent : un appel d’air ? Cette loi ne s’appliquera qu’à ceux qui sont déjà là et pas aux nouveaux arrivants. L’insécurité provoquée par ces nouveaux arrivants ? « Toute personne étrangère en France qui a un casier judiciaire ne pourra pas être régularisée, et sera donc expulsée du territoire national » ! Faut-il donc sortir de l’Assemblée nationale pour régler ce problème ? C’est ce que pense Marine Le Pen. « Il est urgent et surtout démocratique que le peuple français puisse enfin se prononcer par référendum sur cette question fondamentale. »


Sauf que, dans les faits, Gérald Darmanin ne répond pas à la question la plus prégnante. Le problème le plus insoluble. Le détail qui aurait épargné la vie de tant de nos compatriotes, à commencer par la jeune Lola, les victimes de la basilique de Nice, celles du commissariat de Rambouillet : comment expulser les indésirables ? Pourtant, Darmanin en a parlé hier : « Trop de règles » empêchent « d'expulser les criminels » étrangers de France, affirme le ministre de l'Intérieur à la tribune de l'Assemblée nationale. Comme l’aveu d’échec, au moins d’impuissance, d’un observateur oubliant qu’il est acteur. Mais la question mérite d’être posée : comment expulser les indésirables ? Comment rendre effectifs les 95 % d’OQTF en souffrance ? « Tout droit d’asile refusé vaudra OQTF », a-t-il ajouté. Toujours la même question.

L’impasse consulaire

Selon les chiffres du ministère de l'Intérieur français, l'Algérie a délivré, entre janvier et juillet 2021, un total de 31 laissez-passer consulaires pour 7.731 obligations de quitter la France (OQTF) prononcées, et 22 expulsions réalisées, soit un taux d'exécution de 0,2 %. Ce taux est de 2,4 % au Maroc et 4 % en Tunisie. Une première impasse, donc.

L’impasse des centres de rétention administrative (CRA)

Trop peu nombreux, pas assez de place, durée maximale d’enfermement inopérante, les CRA sont accusés par La France insoumise d’être une prison qui ne dit pas son nom. Les clandestins qui y sont retenus ne sont censés y rester que 90 jours. Théoriquement le temps que l’administration organise leur expulsion. Mais, comme vu plus haut, elle n’est jamais effective, « les centres nous assurent au moins qu’un multirécidiviste nous fichera la paix pendant trois mois lorsqu’il y sera enfermé », soupire un cadre de la police bordelaise. S’ils poussent comme des champignons, ils restent toujours aussi peu nombreux pour répondre à la demande mais permettent de prononcer des paix en sursis pour les victimes des délinquants étrangers qui y sont retenus.

La CEDH : l’expulsion de notre souveraineté

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a plusieurs fois condamné la France pour sa politique migratoire (pourtant peu restrictive) : en août 2022, elle condamne la France pour l'expulsion de Tchétchènes vers la Russie. Dix ans auparavant, elle l’avait condamnée pour l’absence de recours effectif contre les mesures d’éloignement.

Au fond, les aspects négatifs de l’immigration incontrôlée ne font plus débat. Ce qui pose question, aujourd’hui, c’est l’absence de volonté politique qui nous conduirait à la confrontation à l’encontre des pays émetteurs de cette immigration. Mais pouvons-nous risquer une crise diplomatique avec l’Algérie lorsque cette dernière a des centaines de milliers de ressortissants sur notre sol ? Cela, aussi, c’est une éternelle question.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

29 commentaires

  1. Pourquoi Marine ne demande-t-elle pas la destitution de Macron, alors qu’elle a le nombre de députés nécessaire ?
    Fait-elle partie de l’opposition contrôlée ?

  2. N’est ce pas une sorte d’extrémisme que de déclarer que les O.Q.T.F. (Obligations de Quitter le Territoire National), doivent quitter le Territoire National, et de les y laisser ? Si ce n’est pas un extrémisme c’est bien une compétence, ou tout au moins d’une hypocrisie de politique anti Républicaine…..Autant de ne pas les inscrire dans la liste O.Q.T.F. ! Ils sont là ils y restent et leur république assumera !

  3. L’OQTF c’est comme le droit de vote .On vous le donne mais on ne vous interdit pas d’être abstentionniste à perpétuité.

  4. Abandon de l’AME, abandon de toutes les aides sociales qui profitent actuellement plus aux immigrés, quittons l’Europe pour toujours , quittons l’Otan définitivement…. ET c’est sûr tout ça par référendum, je serai curieux de voir les résultats !!!!

  5. Un référendum d’initiative partagée ne peut il être organisé à la demande d’une fraction législative ? Cela permettrait aux français de s’exprimer sur un sujet que nos gouvernants ne se saisissent qu’avec des pincettes . Je pense que même si ,visiblement ,la dernière élection présidentielle a démontré que la majorité d’entre nous avait des œillères, au moins, sur ce sujet précis, nous n’en avons pas.

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