Lois mémorielles : un exemple flagrant de deux poids deux mesures
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Un hommage vient d'être rendu, dans l'auditorium des Invalides, à Hamlaoui Mekachera, qui fut secrétaire d'État, puis ministre délégué aux Anciens Combattants auprès du ministre de la Défense entre 2002 et 2007. C'est à la Fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, des combats du Maroc et de Tunisie que l'on doit cette manifestation symbolique. Elle me conduit, à nouveau, à la réflexion sur les lois mémorielles qui sont, hélas, dans leur disparité de traitement, une preuve évidente du déséquilibre entre la gauche et la droite. La France est, intellectuellement, idéologiquement sinistrée.
La comparaison entre deux lois mémorielles en fait la démonstration. La première est celle que l'on doit à Mme Taubira : la loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité. La seconde est celle du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, dont j'avais activement soutenu l'élaboration et le vote. C'est M. Mekachera qui la présentait au Parlement.
J'avais enrichi l'article 4 de cette dernière loi de deux amendements qui aboutissaient à cette rédaction : "Les programmes de recherche universitaire accordent à l'histoire de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, la place qu'elle mérite", ce qui ne pouvait gêner personne, puis "Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit". Ce texte fut voté trois fois à l'Assemblée, et une fois au Sénat, et pourtant, il ne figure plus dans la loi. Avec un retard et par une procédure inhabituels, le Président Chirac le fit soumettre au Conseil constitutionnel, qui le censura. Alors que personne, dans l'opposition, n'avait émis la moindre critique pendant la procédure législative normale, une polémique fut soulevée par des historiens qui estimaient que le Parlement n'avait pas à dicter une histoire officielle. Le Parti socialiste se réveilla alors et déposa une proposition de loi d'abrogation, en justifiant notamment sa démarche par des considérations diplomatiques. Le pouvoir algérien n'avait pas aimé un texte qui remettait en cause les "horreurs" de la colonisation sur lesquelles il assoit sa légitimité historique. Le Parti socialiste avait saisi l'intérêt de s'appuyer sur les minorités d'origine étrangère dans certaines circonscriptions pour conquérir le pouvoir. C'est ce qui explique le troisième vote à l'Assemblée où la proposition de loi socialiste fut repoussée par 183 voix contre 94.
Le Parlement n'a pas à écrire l'Histoire. Il n'a pas à édicter des règles sur le contenu des manuels scolaires, car ceci est réglementaire, dépend de l'administration aux ordres du gouvernement et non du pouvoir législatif. Il n'a pas à voter des textes purement déclaratifs et qui ne sont pas des lois normatives. On peut admettre ces arguments. Mais il n'était pas anormal, dans un texte de reconnaissance envers les rapatriés, que l'on demande à l'enseignement scolaire de ne pas oublier ce que la France leur devait outre-mer, par exemple sur le plan médical. Lorsqu'un candidat à la présidence, élu ensuite, va parler de la colonisation comme un crime contre l'humanité, dans une ancienne colonie, on perçoit le déséquilibre injurieux à l'encontre des rapatriés qui règne dans notre pays.
Mais c'est la comparaison avec la loi Taubira sur l'esclavage qui est scandaleuse. Cette loi subsiste comme un tabou vénéré, alors qu'elle cumule tous les défauts. D'abord, et les historiens l'ont souligné, elle limite la traite et l'esclavage aux seules puissances occidentales dans l'Atlantique et l'océan Indien, et en évitant la Méditerranée et la capture d'esclaves chrétiens par les Barbaresques d'Alger ou de Tripoli. Ensuite, elle introduit un crime contre l'humanité par une loi rétroactive, ce qui suscite la réprobation des juristes sérieux puisque c'est parfaitement anticonstitutionnel. Encore, elle ouvre une suite pénale en limitant un peu plus la liberté d'expression encadrée par la loi de 1881. Un spécialiste de la question, M. Pétré-Grenouilleau, avait subi un dépôt de plainte, heureusement retirée. Enfin, elle intervient sur le contenu des programmes scolaires qui doivent évoquer l'esclavage.
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