L’ombre de Sarkozy plane sur le gouvernement Attal

L’ombre portée de Nicolas Sarkozy plane sur la nomination du gouvernement de Gabriel Attal. C’est ce que constatent de nombreux commentateurs, à commencer par le JDD. Catherine Vautrin, fidèle de l’ancien Président, prend la tête d’un vaste ministère du Travail et de la Santé (le travail, après tout, c’est la santé, n’est-ce pas). Surtout, Rachida Dati récupère le ministère de la Culture. C’est la grande - la seule - surprise de ce nouveau casting. L’ancien garde des Sceaux de Sarkozy, experte en punchlines, flingueuse de plateaux télé, ennemie historique d’Anne Hidalgo, a finalement basculé dans le camp d’Emmanuel Macron. Jordan Bardella, face à elle, avait affirmé, il y a quelques mois, que LR serait la roue de secours du macronisme. Rachida Dati s’était insurgée en affirmant qu’elle serait toujours dans l’opposition. Il faut croire, comme le constatait Georges Michel dans ces colonnes, que la mairie de Paris vaut bien quelques sacrifices.

Quand on regarde de plus près la couleur politique de ce nouveau gouvernement, on n’est pas très loin d’une tournée « Âge tendre et tête de bois » de la défunte UMP. Restent Gérald Darmanin, issu de l’écurie de Xavier Bertrand et soutenu dans la presse par l’ancien Président, Bruno Le Maire, ancien candidat à la primaire de l’UMP, Sébastien Lecornu, ancien élu de droite sur le terrain. Et, donc, deux anciennes fidèles de Sarkozy rejoignent ce « nouveau » gouvernement, qui fait en réalité du neuf avec du vieux.

Le PS, et maintenant LR au tableau de chasse de Macron

En somme, malgré des sondages catastrophiques, Emmanuel Macron a réussi son pari de 2017. Après avoir tué le PS pendant son premier quinquennat, il a tué les Républicains au cours du second. Le parti, jadis si nombreux et si puissant, qui a hérité du RPF, puis du RPR, puis de l’UMP, tient désormais dans une cabine téléphonique. Ciotti, inaudible parce que frileux, a tout perdu. Laurent Wauquiez semble définitivement trop loin pour faire quoi que ce soit. Il reste bien François-Xavier Bellamy, certes très pugnace au Parlement européen, mais pas assez énergique pour quitter l’astre mort qu’est devenu son parti et poursuivre le combat ailleurs. Sa place serait bien davantage chez Reconquête, ou éventuellement au RN. Une sorte de conformisme semble l’en empêcher.

Dans cette affaire, paradoxalement, celui qui, dans l’ombre, a ourdi la mort d’une droite « classique » est son dernier dirigeant à succès : Nicolas Sarkozy. On se perdrait en conjectures sur cet acharnement fratricide. Est-ce parce qu’il n’a pas réussi à revenir en politique qu’il a décidé de tout brûler ? Est-ce parce qu’il sent que le vent tourne qu’il se rallie à la mode du moment ? Est-ce parce que, dans un accès de sénilité précoce, il veut continuer à peser coûte que coûte sur la marche du monde, fût-ce en faisant n’importe quoi ? L’amitié entre Sarkozy et Macron n’est pas nouvelle, leur respect mutuel est évident. Macron avait même délégué à Sarkozy la charge de le représenter auprès de l’empereur du Japon. Selon Europe 1, l'ancien et le nouveau Président se sont parlés avant le remaniement.

INFO EUROPE 1 - Emmanuel Macron et Nicolas Sarkozy se sont appelés pour évoquer la composition du gouvernement https://t.co/nwLRaTi5lM

— Europe 1 (@Europe1) January 11, 2024

Au train où vont les choses, il ne restera, en 2027, qu’une sorte de monstre macronesque attrape-tout contre Marine Le Pen ou Jordan Bardella. Et, avec un peu de talent, Gabriel Attal, s’il réussit à se faire passer pour un Premier ministre ferme, convaincra la droite « et en même temps » la gauche. Il ferait alors un candidat tout trouvé à l’élection présidentielle – et même un vainqueur crédible. Sarkozy, lui, sera loin. On lui trouvera une place : peut-être président du Conseil constitutionnel ? Chapeau, l’artiste !