Longue vie à sœur André (qui prie pour que les journalistes soient raisonnables !)
Après le décès de la Japonaise Kane Tanaka à l’âge vénérable de 119 ans et 107 jours, c’est la Française sœur André qui monte donc - virtuellement - sur le podium.
La doyenne est morte, vive la doyenne ! Un mot au féminin, car depuis 1955, comme le montre la liste établie par le Gerontology Research Group à laquelle se fie le Livre Guinness des records, 57 des 64 doyens… sont des doyennes. Une inégalité entre les sexes que ne saurait combler aucune théorie de genre : se sentir femme dans sa tête n’y suffira pas. La France compte 6 victoires dans ce concours de longévité - dont la lauréate internationale Jeanne Calment. Preuve, sans doute, que l’on y vit, depuis longtemps, dans de meilleures conditions sanitaires qu’ailleurs. Preuve, aussi, de la rigueur de notre administration dans ce domaine, héritière des registres baptismaux, car sans acte de naissance formel, aucune certitude.
Née Lucile Randon à Alès, en 1904, sœur André a connu toutes les Républiques et avait 10 ans lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Fille d’instituteur, elle a perdu sa sœur jumelle à 18 mois – « elle me manque encore ! » confiait-elle dans un entretien à La vie, en 2018 - et l’un de ses frères aînés a été emporté, quand elle avait 16 ans, de la grippe espagnole. Elle s’en est occupée jusqu’au bout. Eu égard à sa génération et à sa vocation, elle n’a pas vécu dans le bien-être ni le care, comme l’on dit maintenant, mais la rusticité et l’oubli de soi lui ont plutôt bien réussi. Sa vie durant, elle a été infirmière, de ces infirmières à cornette qui tenaient les hôpitaux autrefois, dont on se prend à regretter aujourd’hui l’abnégation totale.
Née dans une famille protestante, Lucile Randon s’est convertie à 19 ans et est entrée chez les filles de la Charité - l’ordre fondé pour les pauvres par saint Vincent de Paul et sainte Louise de Marillac - à 30 ans. Elle choisit, dit-on, son nom en religion en pensant à son frère aîné André, ancien combattant du Chemin des Dames, qui, à sa conversion, « avait pleuré, [lui] en avait voulu. Puis avait accepté » (Famille chrétienne). Il est vrai que lorsqu’une jeune fille entre au couvent, son renoncement - et celui de sa famille - est aussi social. Un prêtre garde son patronyme pour œuvrer dans sa paroisse, et s’il devient évêque ou cardinal, participera à la gloire familiale. Pour la religieuse, rien de tout cela. Une pièce de plus dans le procès à charge contre l’Église, diraient certains… Et pourtant. Pourtant, sœur André, malgré son grand âge, est loin d’être effacée. À chacun ses talents. Son talent à elle, c’est sa longévité. Et elle le fait fructifier, au service du « Bon Dieu », comme on disait en son temps, et comme elle dit toujours, parfois pour se plaindre un peu : « Le Bon Dieu m’a oubliée ! » Tous les 11 février, date de son anniversaire en même temps que celui des apparitions de Lourdes, les télés viennent tendre le micro, dans son EHPAD Sainte-Catherine Labouré à Toulon, et lui donnent l’occasion de s’exprimer. En 2015, elle avait déclaré, non sans humour, à « Quotidien », « prier pour tous les journalistes, pour qu’ils soient raisonnables ». Eu égard au travail restant à faire, on comprend mieux son extraordinaire santé.
Elle a été testée par deux fois positive au Covid. A-t-elle été effrayée ? « Nooon ! Je n’ai pas eu peur. Parce que je n’ai pas peur de mourir. » Une leçon de vie à tout un pays transi. Elle a donc traversé la crise sanitaire comme une jeune fille. Et, de fait, elle paraît à bien des égards plus fraîche que bien des starlettes de quelque 60 ans ses cadettes que l’on a entendues ces derniers jours s’exprimer sur la présidentielle. Il est vrai qu’elles n’ont pas eu tout à fait la même vie… La magazine La Vie, justement, a posé la question à la sociologue Isabelle Jonveaux, auteur de Moines, corps et âme. Une sociologie de l’ascèse monastique contemporaine (Bayard) : « Les religieux vivent-ils plus longtemps que la moyenne ? » Selon cette sociologue, « c’est une vérité historique », et leur emploi du temps bien ordonné n’y est pas étranger. De quoi susciter des vocations ?
Souhaitons longue vie à sœur André, tous les médias français n’étant pas encore complètement, autant que l’on puisse en juger, convertis…
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27 commentaires
Quelqu’un qui vit jusqu’ à un age aussi avancé, qui est en bonne santé, et qui possède encore toutes ses facultés ne peut que forcer le respect. longue vie à sœur André et RIP Kane Tanaka.
Merci pour cet article, Mme Cluzel. Je n’ai pas de télé, je ne lis que BV et ne visionne que TV Libertés sur mon smartphone. Je ne connaissais pas cette dame.
Longue vie ma sœur vos charges sont immenses et comme vous madame Cluzel je regrette les petites sœurs des pauvres et les les dominicaines qui faisaient aussi le métier d’infirmière.
et d’institutrices et de professeurs… Nos deux plus jeunes ont été au collège et au lycée chez elles et cela leur a plutôt bien réussi…
J’ai encore la vision du dispensaire de mon quartier à Tourcoing où officiaient 2 « religieuses a cornette » ,je vois encore leur sourire et leurs gestes précis , j’entends encore la seringue une fois utilisée , tinter dans le récipient en tôle émaillée , l’odeur de l’éther et l’ustensile qui servait à stériliser les seringues en verre et les aiguilles réutilisables…c’était au début des années 60 !
Une vie d’abnégation et de prières mérite bien plus que le respect.
Ou si ce n’est que du respect, alors il est teinté d’un peu d’amour envers sa prochaine, Sœur André !
Il y a une quinzaine d’années Dieu a mis mes pas dans ceux de Sœur Judith, notre amitié est très importante, Sœur Judith a toujours les mots justes, afin de me donner force dans les aléas de la vie.
Ces femmes et ces hommes sont des Êtres d’exception.
Bon anniversaire Sœur André.
Quelle chance elle a eu *
Bénie et choisie de Dieu pour vivre la vraie vie telle que Dieu en avait fait le projet .
(* de ne pas croiser vers le démarrage la route d’un prédateur-parasite à l’affut à qui elle aurait » cédé » par gentillesse ou par pitié, pour être embarquée dans un tourbillon de 20 années prolongées ad vitam de galères , lutte et esclavage
Et si, pour vivre très longtemps ,il suffisait de n’avoir jamais à se demander « qu’est-ce qu’on mange ,ce soir? «
« […] sœur André a connu toutes les Républiques […] ».
Objection, chère Gabrielle, elle n’a connu que les 3 dernières. En revanche, vous auriez pu ajouter l’État Français.
En tout état de cause, si « Dieu l’a oubliée », cette sainte femme ne passera probablement pas par la case « Purgatoire » : son dévouement à prier pour les journalistes lui assurera un accès direct parmi les Élus.
Les Soeurs vivent eut être plus vieilles parce qu’elles passent leur temps à prier et qu’elles ont une vie plus calmes que nous autres qui sommes fatiguées par la vie à deux .(j’adore néanmoins mon mari)
j’ignore si la prière fait vivre plus longtemps, mais je pense que en effet se dévouer aux autres et ne pas passer son temps à se regarder le nombril est un facteur de longévité et d’une vie utile et certainement hautement instructive ! Vivre et grandir en sommes, et non pas vivre et régresser…
Longue vie et bonne santé à vous ma soeur mais sachez que les vrais et bon journalistes se font rares .Nombreux sont ceux qui ne méritent plus ce titre .
entièrement d’accord avec vous .
118 ans et pas de botox…!
Encore longue vie à Sœur André et que Dieu pardonne à certains (voir beaucoup) de journalistes.
Bravo ,madame pour votre vitalité,vous êtes la preuve tangible que la générosité et l’ amour du prochain sont plus salutaires que la haine et la violence!
Que nous puissions encore longtemps citer Soeur ANDRE comme exemple de dévouement, de courage et d’abnégation – Le bon dieu ne l’a certainement pas oubliée comme elle le dit si bien mais sans doute veut-il que par ses paroles elle éclaire les esprits et les consciences.
Sœur André qui prie pour que les journalistes soient raisonnables !
Par tous les Saints ! Sœur André vous prenez une charge bien lourde ! Même Dieu, d’après ce qu’il se murmure, a abandonné…
belle vie..