Les loups, les ours et les requins sont-ils racistes ?
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Les loups remontent, nous dit-on, vers la capitale. Ils arrivent d’Italie, en vingt-cinq ans ont franchi les Alpes et le Mercantour et continuent leur route. On a, paraît-il, aperçu un loup dans la Nièvre en janvier de cette année, et certains assurent qu’il mettra peu de temps à "s’installer en forêt de Rambouillet ou de Fontainebleau, aux portes de Paris". Les loups, houhou, ouhouhou hou…
Et puis il y a les ours, les grands noirs des Pyrénées. Enfin, n’exagérons rien : pas des grizzlis, plutôt du genre plantigrade qu’on exhibait autrefois sur les marchés, dansant au son d’un tambourin. Danse qu’on leur avait apprise en les enfermant dans une cage au plancher brûlant.
Dans la Drôme, entre Gap et Valence, les fusils sont de sortie ; à Couflens aussi, dans cette Ariège où l’on compte les brebis que la trouille a fait « dérocher ».
Je rentre de vacances. J’étais à La Réunion, en famille. Entre le volcan qui "érupte" ses boyaux de feu et les baleines en route vers les Kerguelen, j’y ai vu cette fois un autre spectacle grandiose : une très forte houle venant s’écraser contre les falaises de lave, projetant des murs d’écume à des hauteurs inouïes. Et, comme toujours, la beauté de ce bout de France me coupe le souffle et me jette au visage ce qu’en ville on persiste à vouloir ignorer : la nature est puissante, indomptable, porteuse à parts égales de vie et de mort.
Sur cette côte où déferlaient des vagues hautes de six ou huit mètres, le préfet avait interdit les promenades en front de mer. Mais qu’importent les barrières, elles sont là pour être franchies, n’est-ce pas ? Interdits, aussi, "les sports nautiques". Une évidence, car qui serait assez fou pour se mettre à l’eau dans une monstrueuse machine à essorer ? Des fous, justement, qui ont pris la mer avec leurs planches. Par miracle, il n’y a eu qu’un mort.
Si je vous en parle, c’est parce que Le Journal de l’île nous a offert un vibrant plaidoyer en faveur de ces candidats au suicide. Dans son édito-fleuve, Philippe Le Claire fustige ceux qui dénoncent l’inconscience des surfeurs et autres paddle-boarders : "N’en déplaise aux racistes (sic) de service qui ne veulent voir que des “Brice de Nice” dans l’eau, ce sont des Créoles, majoritairement, qui connaissent leurs spots et ont envie d’en jouir car telle est leur conception de la vie", écrit-il. Assertion aussi stupide que fausse car les surfeurs sont essentiellement des "Zoreilles" et pas des Créoles.
Le Claire s’interroge : "Quelle est la morale de ce train de houle ?" La même que celle des ours et des loups, sans doute : la morale de la nature. Quant à respecter cette morale houleuse, pas question : "Les amoureux de la mer toujours joueront entre corail et déferlantes […] C’est une affaire de passion. Un mode de vie, un choix presque mystique parfois pour peu que l’on ressente cette étrange fibre panthéiste qui résonne au fond de notre inconscient collectif."
Quoi qu’en dise ce défenseur de la culture locale et des espèces endémiques, le surfeur et le rameur sur son paddle ne sont pas des espèces marines. La mer n’est pas leur milieu naturel et s’il faut les protéger, c’est d’eux-mêmes et de leur inconséquence. Mais rien ne tient face aux désirs de l’homme. Il a décidé, petit démiurge, que le monde lui appartient et que la nature doit se plier à sa volonté. Ainsi notre brillant éditorialiste conclut-il ainsi son papier : "Le respect de l’environnement ne peut se concevoir sans le respect de l’humanité. Il faut sécuriser nos plages et spots autant que faire se peut." En conséquence de quoi il faut, d’urgence, aller trouver le ministre car "La Réunion ne peut vivre plus longtemps sous la pression des requins qui affectent tourisme, économie et qualité de vie".
Monsieur Hulot, vous savez ce qu’il vous reste à faire : tuez-les tous ! Et tant que vous y serez, interdisez aussi la houle (mais attention, hein, gardez les baleines, ça, c’est bon pour le tourisme !).
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