Macron en hausse grâce à la guerre : pourquoi c’est malsain, limité et trompeur

Il y a deux mois, exactement, la cote de popularité d'Emmanuel Macron s'était effondrée à un plus bas niveau historique de... 18 % : six mois après la dissolution, les Français lui imputaient l'instabilité gouvernementale qu'il avait lui-même créée. Le même institut de sondage (Elabe pour Les Échos) enregistre aujourd'hui une hausse de six points qui lui permet d'effacer cette chute : Emmanuel Macron retrouve sa popularité post-JO de... 27 %.
En hausse, mais toujours très bas !
Rien de bien glorieux, surtout si l'on ajoute que le chiffre des mécontents s'élève toujours à 68 % et qu'il ne s'est effrité que de 3 points. L'objectivité commanderait de conclure qu'Emmanuel Macron est enkysté dans une impopularité massive, et qui n'est affectée qu'à la marge par des événements pourtant planétaires : Jeux olympiques, guerre (ou paix ?) en Ukraine. Les observateurs honnêtes sont bien obligés d'en convenir : notre confrère des Échos souligne que « le niveau de défiance reste élevé et s'inscrit dans la moyenne observée depuis mai 2022 ».
Un rebond à fortement relativiser
Le spécialiste opinion Paul Cébille insiste sur le caractère très relatif de cette embellie :
+6 points de confiance pour E. Macron ce mois-ci
Un rebond lié à l'actualité mais qui reste à relativiser :
️40% continuent à n'avoir pas du tout confiance en lui
️1/3 de ses électeurs n'a toujours pas confiance
️Cela reste dans la tendance basse depuis sa réélection pic.twitter.com/ddy41VZjcC— Paul Cébille (@Ellibec) March 13, 2025
Un rebond, donc, mais qui rebondit de moins en moins haut, et qu'il faut relativiser à plusieurs niveaux, au-delà même de l'impopularité massive de Macron. Si l'effet drapeau est incontestable, Marc Baudriller a bien vu qu'il s'amenuisait à force d'être surexploité à outrance et à contretemps par Macron : le mot « guerre » instrumentalisé, d'abord contre un virus puis lors de l'invasion de l'Ukraine et maintenant quand il est plutôt question de paix depuis les initiatives de Trump, commence à perdre de sa magie sondagière.
« Ça fait quatre fois qu’Emmanuel Macron nous appelle aux armes. Il a l’habitude de faire monter la pression, pour profiter de l’effet drapeau et pour faire avancer son agenda européiste et mondialiste. »@BAUDRILLER pic.twitter.com/kzc0kadruw
— Boulevard Voltaire (@BVoltaire) March 10, 2025
Rappelons qu'avec le Covid-19, en 2020, la cote de Macron avait pris 13 points, pour dépasser 50 % ! Nous en sommes très loin.
Car - et c'est la définition de l'effet drapeau - toute inquiétude touchant à la sécurité des Français (guerre, terrorisme, crises internationales) les conduit automatiquement à serrer les rangs derrière le Président. Derrière la fonction. Hollande lui-même en avait bénéficié, après les attentats islamistes, avec des rebonds de popularité bien plus conséquents de 20 points ! On sait ce qu'il advint de cette popularité... Même François Mitterrand, qui avait bénéficié d'un bond de 19 points lors de la guerre du Golfe en 1991, avait très vite reperdu cet éphémère capital dès l'été 1991. L'effet drapeau constitue bien une réalité politique, mais sa loi est implacable : la chute sera symétrique.
Les Français ne sont pas dupes
Et elle pourrait d'ailleurs intervenir rapidement, si l'on observe plusieurs indices qui montrent, derrière ce timide effet-drapeau, la grande incrédulité des Français et leur inquiétude quant à la gestion d'Emmanuel Macron. Tout d'abord, malgré la dramatisation à outrance (en gros, les Russes sont à nos portes) - depuis l'allocution présidentielle d'il y a dix jours jusqu'à la remarque indécente de Gérald Darmanin sur la responsabilité russe dans les attentats islamistes -, les Français continuent de placer la menace islamiste en tête de leurs inquiétudes ! La même enquête des Échos livre ces chiffres qui scellent l'échec de la propagande macroniste : les « menaces qui inquiètent le plus les Français » sont le terrorisme islamiste pour 46 %, la politique américaine pour 43 % mais aussi l'immigration incontrôlée pour 39 %, alors que la menace militaire russe n'arrive qu'à 31 %, malgré le tintamarre russophobe du pouvoir. Autre signe de méfiance et de lucidité des Français : l'idée d'un financement exceptionnel de notre effort de défense qui se profile, avec un concours Lépine pour ponctionner l'épargne des Français, est clairement rejetée par l'opinion : un sondage Odoxa publié jeudi sur BFM TV indique que 58 % des Français y sont opposés. De quoi, là encore, relativiser le petit rebond d'un Président très impopulaire. Tous ces chiffres montrent que les Français sont très loin de « faire bloc », selon l'expression de Mitterrand dans son allocution de janvier 1991, derrière leur Président actuel.
Macron et la dissuasion : la leçon de Michel Debré
Et cela pose la question de la légitimité des décisions prises en ce moment par un aréopage européen de dirigeants impopulaires et en bout de course, comme Macron, ou mal élus, comme le nouveau chancelier allemand, sans compter l'illégitimité totale d'une Ursula von der Leyen. Problème décuplé dans le cas de Macron, Président du seul pays de l'Union européenne à détenir la puissance nucléaire. Lisons, à ce sujet, le préambule du premier Livre blanc sur la défense, publié en 1972 . Il est signé d'un certain Michel Debré, alors ministre d'État chargé de la Défense nationale. Un texte qui, dans le contexte actuel, prend une résonance nouvelle.
« Quelles que soient les modalités d'une défense, aucune politique n'a de valeur sans consentement national. À l'époque où le fait nucléaire remet le geste ultime à un seul homme, à savoir le président de la République, responsable suprême qu'a investi le suffrage universel, le pays doit adhérer à la défense, et pour qu'il adhère, il doit comprendre. La dissuasion, si elle est nucléaire, est aussi populaire : au-delà de l'adhésion, la participation est indispensable » (Livre blanc sur la défense).
L'impopularité massive d'Emmanuel Macron devrait l'inciter à la circonspection. Et ses soutiens aussi.
Une joie malsaine
Cela ne rend que plus déconnectée la satisfaction malsaine exprimée par les macronistes sur les réseaux sociaux à la lecture de ce mini-rebond : si la menace était si grave, le pays directement menacé, l'ennemi à nos portes, peut-être faudrait-il adopter une autre communication que ces sourires, ces airs satisfaits du Président avec des « +6 points » en arrière-plan. Mention spéciale pour les JAM, les « Jeunes avec Macron », qui multiplient les messages de ce type.
La cote de popularité d'EmmanuelMacron est en forte hausse : 37% (+6) des Français lui font confiance
On ne peut être qu'impressionné par l'énergie du PR qui enchaîne les voyages (, )
On ose pas imaginer qu'elle serait la situation s'il n'était pas aux commandes pic.twitter.com/4pNB61Qr7g— Lionel COSTES (@COSTESLionelEr) March 1, 2025
Un dernier chiffre, pour ramener ces irresponsables au réel : dans ce même sondage des Échos, Jordan Bardella, déjà très haut, gagne encore deux points.
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88 commentaires
Plus effrayant que la guerre = 1) Que la popularité de ce Pdt remonte auprès de certains Français même si, comme je l’espère, ce sont d’ex-électeurs) 2) Que cette même personne n’en profite pour « durcir son combat » par des initiatives hasardeuses 3) Qu’à ma connaissance aucun groupe parlementaire n’ait demandé un débat public sur l’Ukraine, notre engagement actuel, nos dépenses passées et en cours et l’impact pour nous des mesures de rétorsion contre la Russie. Pour l’instant, la Constitution de la V° est utilisée au bon plaisir présidentiel. Le domaine réservé de Pdt ne signifie pourtant pas qu’il puisse faire tout ce qu’il veut sans contrôle ni mandat du Peuple et de ses représentants. .
les sondages ne valent rien du moment que tout les français n’ont pas u droit au vote ce n’est pas possible qu’il y a des français qui croivent encore en lui ,il ferait mieux de démissionner il rendrait service au pays .
Bravo Monsieur Sirgant, j’apprécie beaucoup la phrase finale de votre article : c’est « la morale de l’histoire »…
« Macron retrouve sa popularité post-JO de… 27 %. » = oh, il y a encore 27% d’aveugles et sourds en france?