Macron en Suède : vers une dissuasion nucléaire européenne ?

E Macron dissuasion nucléaire Suède

Les réseaux sociaux bruissent de réactions farouches, souvent appuyées sur des passages inexacts, à la suite du discours d’Emmanuel Macron en Suède. La France insoumise elle-même, généralement peu encline à un gaullisme cocardier, embouche le clairon de la patrie en danger et s’alarme des propos présidentiels. Alors, de quoi est-il précisément question ? Et Emmanuel Macron a-t-il trahi le pays dont le corps électoral lui a confié la garde pour dix ans au total ? Voyons.

Il faut d’abord revenir au verbatim avant de se faire une opinion. Sur le site officiel de l’Élysée, à 21’32", Emmanuel Macron est interrogé par un journaliste dans les termes suivants : « Y a-t-il un sentiment particulier en ce qui concerne la protection de l'UE ? Avez-vous le sentiment d'avoir une responsabilité particulière à cet égard ? » La question est osée, mais flatte évidemment (est-ce voulu ou non ?) les instincts narcissiques de Jupiter, qui se sentirait volontiers une responsabilité particulière envers tout et n’importe quoi. Alors, en prime, s’il s’agit de l’UE, dont on dit qu’il guigne la présidence après ses deux mandats, vous pensez bien...

Le Président français répond en anglais, avec un accent lamentable – l’accent de l’inspecteur Clouseau, selon Gaspard Proust - qui semble être légèrement fait exprès, peut-être pour faire plus français. Ça doit être l’idée qu’il se fait de ces gros cons de Gaulois. Voici ce qu’il dit : « Cela ne fait aucun doute. Pas pour provoquer une escalade, mais le fait que nous travaillions avec nos alliés, nos partenaires européens, afin de préserver ce que j'appellerais la liberté et la souveraineté et les libertés fondamentales qui sont garanties par l'ordre juridique international. » Bon. Ça ne veut rien dire. Une introduction qu’on pourrait qualifier de réponse d’attente.

Puis, Emmanuel Macron se fait plus précis : « Oui, nous avons le sentiment d'avoir une responsabilité particulière. Par ailleurs, je l'ai dit à l'issue de mon discours et il y a de ça quelques années, je l'avais dit sans ambages : nos intérêts vitaux, ce que nous définissons comme nos intérêts vitaux, sont en partie quintessentiellement européens, ce qui nous confère une responsabilité particulière en ce qui concerne ce que nous possédons, et notre capacité de dissuasion pour dire les choses clairement. » En d’autres termes : notre capacité de dissuasion (nucléaire, tout le monde a compris) est dictée par nos intérêts vitaux (jusque-là, c’est conforme à la doctrine française) et… une partie de ces intérêts sont européens. La France, selon Macron, aurait donc une responsabilité particulière vis-à-vis de l’Europe dans la mise en œuvre de sa dissuasion au profit de celle-ci. Ce n’est pas dit aussi clairement, mais c’est ce que tout le monde entend, et c’est fait pour.

Une trahison ?

Emmanuel Macron a-t-il trahi l’esprit de la dissuasion nucléaire française ? Évidemment, puisque celle-ci a vocation à nous placer dans une position « à part » vis-à-vis de ceux qui ne l’ont pas. Évidemment, encore, car la dissuasion nucléaire a pour vocation essentielle de sanctuariser le territoire du pays qui la détient. On n’attaque pas frontalement un pays qui possède l’arme atomique. En première approche, donc, oui, Emmanuel Macron est un traître. Ça ne fait pas un pli.

Mais il y a plus grave. Si, si. La dissuasion nucléaire, en France et ailleurs, repose sur un mixte ambigu : une grande clarté des moyens de frappe, qui doivent être foudroyants, couplée à un flou doctrinal imprévisible, qui ne définit pas explicitement de « ligne rouge » afin de laisser planer la menace de la manière la plus inquiétante possible. C’est la vieille formule de l’amiral Labouérie : incertitude et foudroyance.

Ainsi, en laissant entendre que la dissuasion française a une responsabilité vis-à-vis de l’Europe, Macron se charge d’un fardeau que personne ne lui avait demandé de prendre. Il affiche, par ailleurs, clairement des intentions stratégiques jusque-là non dites (et c’était très bien comme ça). Surtout, il assume une escalade rhétorique, un durcissement de la « grammaire nucléaire », face à des ennemis qui connaissent bien le rapport de force et le manient bien mieux que nous. Comment compte-t-il sécuriser toute l’UE avec notre force de frappe nucléaire ? Au nom de quels principes, avec quelle légitimité et grâce à quels outils ?

C’est pire qu’un traître : c’est un guignol.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

72 commentaires

  1. La « force de dissuasion nucléaire française » a bien été un pilier de notre souveraineté. Grâce à quelques sinistres rigolos la dissuasion a perdu bonne partie de sa force. Néanmoins elle a le mérite d’être encore en vie. De quoi parle donc Monsieur Macron ? La conforter au bénéfice de notre Pays ou d’en brader les restes au bénéfice d’une souveraineté européenne qui n’existera jamais. Les mots de l’article dont bien faibles à cet égard.

  2. Il est impensable que les Européens puissent vouloir être protégés par une personne qui a déjà si peu de respect pour la France et ses habitants.
    De plus, nous n’allons pas risquer de mourir pour un pays européen, pas plus que les Américains prendront ce risque pour l’Europe, cela, de Gaulle l’avais parfaitement compris.

  3. C’est tout ce qu’il sait faire : trahir la France et ses électeurs.
    Il fait de la France un bout de terre à l’ouest de l’Europe sans âme ni consistance .
    Laquelle Europe dont il rêve d’en devenir le souverain suprême !
    Alors, le 9 juin, tous aux urnes pour éviter le pire : c’est la seule solution démocratique.

  4. En classe, on apprenait à ne pas utiliser des mots qui ne servent qu’à rallonger la longueur du devoir à rendre. Lui, c’est tout l’inverse, il a dû apprendre à utiliser le plus de mots ronflants possibles pour éviter de dire quelque chose de sensé.

  5. En Suède, comme ailleurs, on sait très bien à quoi s’en tenir avec le blabla macronien . Il ne rate jamais une occasion de nous faire honte .

  6. Depuis quelques années, certains d’entre nous sont fusillés du regard par leurs interlocuteurs s’ils osent mettre en doute l’intelligence et l’équilibre mental de Macron…Et pourtant…

  7. Nous sommes sous la dissuasion nucléaire US et personne ne bronche. Une dissuasion nucléaire française, pourquoi pas, quel est le souci,si les moyens sont présents ? Personne ne demande, oui effectivement. A une certaine époque notre sécurité était assurée par les Légions romaines, personne n’avait demandé mais tout le monde trouvait cela fort bien, au point de s’engager volontairement dans ces troupes un peu partout dans l’Empire.

  8. Oui une trahison! Une de plus! Mais celle-ci est monstrueuse. Après la trahison du trafic honteux et dangereux des avances technologiques de Dassault et autres Alsthom… Quel scandale ! Mais celle-ci lui éclatera au nez sans tarder. Il n’aura que ce qu’il aura mérité.

  9. Donner le nucléaire à l’étranger, c’est de la haute trahison. Prions pour qu’il n’appuie pas sur le bouton rouge. Ce président apparaît de plus en plus instable et par conséquent extrêmement dangereux pour le pays.

  10. Le traître en chef a toujours des idées pour détruire la souveraineté Française , ce qui me choque c’est que ce dangereux possède les codes de l’arme nucléaire et que dans un moment de folie , il soit capable d’actionner mais qui peut nous débarrasser de ce monstre .

  11. C’est un guignol, c’est à dire une marionnette manipulée. Mais pas pour faire rire. Il est sérieux comme le Pape.

  12. Cet homme a un ego surdimensionné qui le rend dangereux. Et cela ne date effectivement pas d’hier. Il ne faut pas confier ce genre d’outil (dissuasion nucléaire) à n’importe qui ! Tout cela est fort préoccupant, pour ne pas dire très inquiétant.

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