Macron et le G5 Sahel : échec d’une défense européenne et du couple franco-allemand ?

Le dimanche 2 juillet s'est tenue une réunion du G5 Sahel à Bamako. Il s'agissait de valider le déploiement, d'ici la fin de l'année, de la force militaire des cinq pays qui composent ce G5 (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad) afin de lutter contre le terrorisme islamique dans la zone sahélienne aux côtés de l'opération française Barkhane. L'engagement supplémentaire africain est vital car les attaques djihadistes dans cette immense zone restent quasi quotidiennes. Il y a quelques jours, l'ONU a voté à l'arraché une résolution apportant un soutien politique au déploiement de cette force, sans soutien financier, les USA et la Grande-Bretagne s'y étant opposés.

Conséquence : le Tchad, partenaire majeur des opérations militaires dans cette zone, a menacé de se retirer de ce projet pour des raisons budgétaires. Le président guinéen Alpha Condé, président en exercice de l'Union africaine, a mis ses pairs au défi d'assumer ce combat et les partenaires internationaux à financer les opérations du G5 Sahel. Force est de constater que les pays africains ne sont jamais parvenus à jeter les bases d'une défense commune. Pour l'Europe, le soutien de cette initiative n'est pas un choix mais une nécessité.

L'Union européenne s'est engagée, pour sa part, à hauteur de 50 millions d'euros sans calendrier précis, pour montrer l'exemple, alors que 400 à 500 millions sont nécessaires. La France, en situation de déficit budgétaire aggravé, apportera... 8 millions d'euros. Quelques pays européens comme l'Allemagne, la Belgique et la Hollande ont fait des déclarations d'intention... sans autre précision. Notre Président « jupitérien » assistait à cette réunion du G5 et a déclaré compter sur la dynamique de l'accord, tout en implorant les chefs d’État concernés à prouver l'efficacité des troupes afin de convaincre les partenaires lors d'une conférence des donateurs d'ici quelques mois.

Plus de quatre ans après l'absence totale de soutien apporté à la France par l'Union européenne lors de l'opération Serval au Mali, rien ou presque n'a donc changé. Ce projet G5 Sahel semble devoir rester une affaire française. L'Union européenne a manqué, une fois de plus, l'occasion d'affirmer sa cohésion face à l'enjeu du terrorisme djihadiste et cet épisode confirme l'absence de vision stratégique européenne commune. Ce positionnement timoré de l'Union européenne est, par ailleurs, contraire à sa volonté affichée de lutter contre l'immigration incontrôlée africaine en maintenant les populations chez elles par plus de sécurité et de développement, objet même de la création du G5 Sahel en 2014. Il ne sert à rien de sauter comme un cabri en criant "Vite, une défense pour l'Europe !" s'il n'y a pas de volonté de s'inscrire dans une véritable politique de sécurité et de défense commune (PSDC), dont l'objet est aussi d'assurer le maintien de la paix, la prévention des conflits et la sécurité internationale en dehors des frontières de l'Union (articles 42 à 46 du traité de Lisbonne).

Plus grave encore : le couple franco-allemand a, lui aussi, raté l'occasion de s'affirmer en matière de défense commune contre le terrorisme islamique. Et il ne pouvait pas en être autrement, quand on connaît la réticence allemande à financer des projets concernant les armées africaines et les opérations extérieures. Notre Président n'a donc rien obtenu de la part de Mme Merkel mais « a bon espoir » de pouvoir annoncer mieux, après le Conseil franco-allemand de Paris le 13 juillet prochain. L'espoir fait vivre, mais cela n'est pas de bon augure pour les autres échéances européennes en attente. Jupiter en a pris un coup !

Philippe Franceschi
Philippe Franceschi
Consultant en sécurité

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