Macron : les raisons d’une « droitisation »

MARINE LE PEN

Le jour où Emmanuel Macron abandonnera la politique, il pourra toujours se recycler dans le stand-up, ou le « seul en scène », pour causer la langue de Molière et de Georges Brassens. Quelle énergie, quelle endurance. Pourtant, c’était long, très long, aussi long qu’un film soviétique d’autrefois sous-titré en islandais. On aurait néanmoins tort de croire que le numéro présidentiel était improvisé. Au contraire, tout y était soigneusement millimétré, afin d’y faire passer un message « de droite » : régulation de l’usage des écrans pour nos enfants, uniformes à l’école, apprentissage de La Marseillaise dès les classes de primaire. De là à ce qu’il exige que l’Éducation nationale adopte les méthodes du collège Stanislas, celui des enfants de son ministre de tutelle, Amélie Oudéa-Castéra, il n’y a qu’un pas. Toujours dans le même registre droitier a-t-il assené à plusieurs reprises : « Je revendique de lutter contre l’immigration clandestine. »

Socialistes, écologistes et mélenchonistes ne s’y sont d’ailleurs pas trompés. « Macron achève sa mue réactionnaire », affirme Olivier Faure (PS). « Un discours de technocrate réactionnaire », renchérit Marine Tondelier (EELV devenu LE). Enchaînement de « poncifs réactionnaires », s’indigne Manuel Bompard (LFI).

« Tout pour empêcher l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen »

Alors, pourquoi une telle dérive ? La réponse est simple : il « fera tout pour empêcher l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen ». En effet, si tout semble « prioritaire » pour Emmanuel Macron (violences faites aux femmes, cessez-le-feu à Gaza, redressement de l’école, transition énergétique, insécurité, construction européenne, sans oublier le cancer du genou et la protection des ornithorynques), la priorité la plus « prioritaire » semble demeurer la lutte contre le Rassemblement national.

Autrefois, on sortait les arguments moraux du placard, allant jusqu’à exhumer la dépouille du maréchal Pétain de sa sépulture de l’île d’Yeu, telle le Premier ministre sortant, Élisabeth Borne. Des arguments qu’Emmanuel Macron s’est toujours refusé à utiliser, non sans raison. Aujourd’hui, changement de stratégie : l’hydre lepéniste à deux têtes (Marine et Jordan) n’est plus, à l’en croire, « d’extrême droite », mais « d’extrême gauche ».

Et monsieur Trogneux de nous assurer : « C’est le parti de l’appauvrissement collectif. […] Le parti du programme qu’il a complètement piqué à l’extrême gauche. » Bref, derrière chaque lepéniste, il y aurait désormais un mélenchoniste qui s’ignore. Quelle imagination ! On croirait entendre le Valéry Giscard d’Estaing de l’élection présidentielle de 1981. Lequel prétendait en substance que si François Mitterrand était élu, les chars de l’Armée rouge ne tarderaient pas à camper sur les Champs-Élysées, tandis que Georges Marchais remettrait les goulags à l’ordre du jour.

Mobiliser l'électorat bourgeois

Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit d'essayer de mobiliser l’électorat bourgeois, ce socle aujourd’hui macroniste qui fut jadis giscardien, mitterrandien, puis balladurien et même fillonniste. D’où les nouvelles postures présidentielles « réactionnaires » plus haut évoquées et destinées à rassurer ses électeurs des beaux quartiers, tout en tentant, en même temps, de les persuader qu’avec la néo-gauchiste Marine Le Pen à l’Élysée, on leur ratiboiserait leurs comptes en banque.

Ce retournement sémantique est sous-tendu par deux objectifs plus ou moins cachés. Le premier ? Sauver les meubles aux prochaines élections européennes. Le second ? Achever de siphonner les voix de ce qui demeure des Républicains. Sur le papier, ça peut éventuellement fonctionner. Mais on sait, en politique comme en matière militaire, que les échecs les plus magistraux ont souvent été dus à ces plans d’état-major concoctés loin des réalités du terrain.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

24 commentaires

  1. MLP ne sera sans doute jamais Présidente de la République : le barrage réactionnaire islamo-gauchiste fonctionnera et qu’ils appelleront arc républicain pour les gogos . Ce qui est au contraire à considérer , c’est l’arrivée d’une majorité RN – LR ,+ … suffisamment importante pour avoir Bardella Comme 1er Ministre.

  2. Mr Macron est la marionnette intelligente d’un Pouvoir « Grand Marchand » qui domine tout l’Occident et qui est prêt à tout pour assurer ses Super-Profits. Le problème est que l’écart ne cesse de se creuser entre les super riches et le peuple tout à fait moyen…. Il paraît que cette distorsion aurait provoqué des « Révolutions » dans le passé !?

  3. « Emmanuel Macron « fera tout » pour empêcher l’arrivée au pouvoir de Marine Le Pen ». Y compris truquer les élections?

  4. Le couplet sur le RN d’extrême gauche montre seulement à quel point Macron prend les Français (sauf lui) pour des imbéciles. Il est réconfortant de voir que, compte tenu de la grande majorité des Français (j’en fais partie) qui ont éteint leur télévision pour ne pas subir le baratin de Jupiter, selon un sondage 78% des Français n’ont pas été convaincus par sa prestation. Peut on espérer que Macron prenne conscience de l’nanité de ce qu’il croit être des idées géniales ?

  5. se faire traiter d’incapable et de dangereux par un incapable qui cause, qui répète , et qui ne fait jamais rien parce qu’il ne comprend rien n’est-ce pas , pour celui qui reçoit l’insulte, une forme de reconnaissance de sa supériorité

  6. « Mobiliser l’électorat bourgeois ». le problème est que les vrais bourgeois (et pas les « parvenus qui se croient bourgeois, genre les « marie chantal » d’autrefois », ce qu’on appelle les bobos aujourd’hui), en principe (tout se dégrade à notre époque) sont cultivés, ont appris à raisonner (et non à résonner), et ne se laisseront pas prendre par ce discours (que je n’ai pas écouté ni regardé, lisant seulement les compte-rendus). Il est vrai que les vrais bourgeois et petite noblesse, sont de moins en moins nombreux depuis 1789 et 1793!

  7. Etait-il dans le rôle de Président de la République ou dans celui de 1er Ministre où les Institutions l’ont « fourré » depuis l’élection au suffrage universel gaullien et le quinquennat chiraquien aggravant?
    De grâce, revenons à une République « apaisée » avec un Chef de l’Etat « pour tous », non partisan comme en Grande Bretagne ou en Italie et avec un Premier Ministre élu par tous les français et soumis aux aléas et campagnes traditionnelles!

  8. En commercial ,une règle, ne jamais critiquer un concurrent car indirectement c’est le valoriser car on le craint !! Donc Mr MACRON n’a jamais fait de commercial car de « taper » sur le RN en permanence ,cela risque d’avoir l’effet contraire !!
    Cela conforte les Pro-RN et donne envie aux autres de se renseigner si ils ne connaissent pas !! Donc Mr MACRON merci de continuer à taper sur le RN

  9. « Plus il en dit , moins il en fait » , proverbe normand ,paraît-il pour dénoncer les petits faiseux .

    • Rassurez-vous, très chère, les électeurs qui ont mal voté en 2022 comprennent leur erreur… je pense, j’espère, que nous serons très nombreux et nombreuses à commencer à régler des comptes le 9 Juin …! Qu’en pensez-vous ?

  10. Il a peur et c’est tant mieux , quand aux LR s’ils lui accordent encore ne serait ce qu’une voix ils sont vraiment minables .

    • Madame Steiner… les LR sont cuits, archicuits ! Vous devriez vous en rendre compte, surtout dans votre belle Région… Bien à vous…

  11. A part cracher son venin sur son meilleur concurrent et cabotiner à outrance avec des mensonges qui ne passent plus , que sait faire cet individu qui nous tient lieu de Président ? j ‘espère que son stupide combat contre le RN va se retourner contre lui et ce gouvernement de trompe l ‘oeil .

    • Conservateurs de la Patrie, du beau, du bien v/s destructeurs tous azimuts en bandes ( organisées ou conjoncturelles)

    • Plus précisément, la Droite est toute entière chez les macronistes, ouvertement élitistes ; la Gauche est fascisante avec LFI (l’extrême gauche est fasciste ou communiste, ce qui revient au même) ; le Centre, démocrate, est toujours patriote, puisque seule la nation (un territoire, une culture, un peuple) permet la démocratie. – – – – –
      Aujourd’hui, le vrai clivage est bien « mondialistes-élitistes-extrémistes » contre « patriotes-démocrates-centristes ».

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