Macron n’a pas seulement humilié l’armée, mais aussi le Parlement
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Et de trois… Pour la troisième fois, le pouvoir politique vient d'humilier de façon disproportionnée un haut responsable militaire. Le général Bertrand Soubelet, numéro 3 de la gendarmerie nationale, le général Christian Piquemal, ancien commandant de la Légion étrangère, et maintenant, le général Pierre de Villiers, chef d'état-major des armées.
La République a toujours craint les soldats. Sous la IIIe, les militaires de carrière n'avaient pas le droit de vote, qu'ils n'ont obtenu que le 17 août 1945, un an après les femmes.
Les officiers supérieurs, généraux, maréchaux, amiraux ont toujours suscité de la méfiance à gauche, parfois non sans raison. Le retour du général de Gaulle n'aurait pas été possible sans Massu et Salan.
C'est pourtant ce général à deux étoiles qui a rétabli la République et préservé la démocratie, fût-ce en réprimant sévèrement les officiers factieux, qui en l'occurrence ne prenaient pas des risques par ambition, mais parce qu'ils étaient animés par "une certaine idée de la France" et de son honneur. Quelles que soient les opinions à ce sujet, les forces armées manifestent depuis 1961 une discipline républicaine irréprochable.
Au-delà de cette hostilité traditionnelle de la gauche à l'encontre de l'armée, il y a le discours juridique qui justifie d'imposer aux soldats un devoir de réserve exigeant. Les responsables militaires détiennent des secrets. Leurs révélations peuvent exposer la sécurité du pays. C'est cette logique qui prétend légitimer les trois humiliations inacceptables subies ces derniers temps par de hauts gradés. Elles sont scandaleuses pour trois raisons. La première s'appuiera sur un principe éminemment républicain qui est celui de l'égalité. Pourquoi interdirait-on à un militaire d'être un citoyen égal aux autres ?
Beaucoup de militaires se sont engagés dans la défense de la famille traditionnelle contre le mariage unisexe, et ils ont eu raison. Pourquoi permettrait-on aux policiers, aux juges comme aux autres fonctionnaires d'être syndiqués, d'exprimer des revendications professionnelles, voire des avis sur la politique suivie alors que, dans le même temps, les militaires seraient condamnés à la soumission et au silence, fût-ce au détriment des missions qu'ils ont le devoir d’accomplir ?
L'affront subi par le général Piquemal a été particulièrement ignoble. Après une carrière exceptionnelle, il n'était plus en activité lorsqu'il a manifesté à Calais contre une situation inacceptable pour notre pays. Il ne faisait là que son devoir : servir son pays. Arrêté et poursuivi sans ménagement, il a été relaxé par la Justice, mais condamné administrativement à la radiation et à l'interdiction de porter l'uniforme.
Comment accepter ici que le respect de la hiérarchie des normes permette, à des responsables qui n'ont guère donné les preuves de leurs talents au service du pays, de toucher à l'honneur et à la dignité de celui qui a consacré sa vie à la France ? C'est peut-être légal, mais c'est moralement abject.
Le renvoi du général Soubelet comme les propos excessifs de Macron à l'encontre du général de Villiers montrent qu'il n'y a même aucun respect du pouvoir législatif. Les deux généraux en effet ont souligné l'un et l'autre que les moyens octroyés par l'État à la sécurité intérieure pour le premier, à la défense nationale pour le second, étaient en contradiction avec les buts fixés et les missions dévolues, en commission de l'Assemblée, là où leur devoir imposait de dire la vérité aux représentants de l'autre pouvoir, aux élus du peuple. Fallait-il donc que leur devoir de réserve les obligeât à mentir ?
La réaction de Macron, dont la tête enfle à vue d'œil, a été déplacée à l'encontre d'un général qui a une vie d'actions et de décisions derrière lui, et non une élection facilitée par les circonstances, sans rien auparavant, pas même un service militaire. Beaucoup plus grave, sans que la presse ne s'en émeuve : Macron n'a pas seulement montré son arrogance à l'égard de l'armée, mais il a affiché son total mépris à l'encontre du Parlement : ces gens-là, "ma" majorité et "mon" opposition, encore moins, n'ont pas à savoir la vérité.
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