Marine Le Pen : malgré un grand oral sans grand moral, le combat continue
Jeudi soir sur France 2, Marine Le Pen fait son grand retour à la télévision dans "L’Émission politique" pour une sorte de débat, quoiqu’il puisse y avoir désormais des mots qui fâchent au Front national. Nonobstant, l’auteur de ces lignes persiste et signe : celui de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle fut, à mon sens, un grand moment télévisuel, même s’il m’a ensuite valu un intense pic de grande solitude auprès de mes confrères, « journalopes » et/ou « gauchiasses », pour reprendre la sémantique si délicate de la réacosphère.
Oui, ce débat restera dans les livres, au même titre que le concert californien donné par les Rolling Stones à Altamont, en 1969, l’est toujours sur disque, dans les oreilles, les yeux et les mémoires. Deux philosophies s’affrontaient alors - en 2017, on précise. La quintessence de deux pensées antinomiques. Pour le premier, la France vue comme un open space ; pour la seconde, une réalité charnelle puisant aux tréfonds de notre histoire commune alors que l’autre ne l’était que dans les livres de comptes - comptes passablement truqués, tant qu’à faire.
Marine Le Pen y était telle qu’en elle-même, bravache et brute de décoffrage. Emmanuel Macron, vainqueur par défaut de la "Star Academy" politique, n’a pas non plus démérité dans le genre qui est le sien : le registre de la séduction froide, propre à ceux qui, bien nés, ont suivi les filières qu’il faut. Passons. On ne saurait refaire le match.
Hier soir, l’ambiance est tout autre. En un mot comme en cent, on s’y ennuie – restons polis –, un peu vautrés dans le canapé du salon en se grattant le nez – restons polis, on vous dit –, en attendant que quelque chose se passe enfin. Et il ne se passe rien.
Dans cette affaire, Marine Le Pen est évidemment la plus à plaindre. Ce n’est pas qu’elle soit bonne ou mauvaise, mais que Léa Salamé, l’intellectuelle qu’on sait, ne lui donne ni l’occasion d’être bonne et encore moins celle de se montrer mauvaise. Pour donner une réponse intéressante, encore faut-il que la question soit à la hauteur. Hier, il aurait donc véritablement fallu être le roi Midas pour transformer le plomb en or et éviter que le téléspectateur ne se change en zombie. Telle hausse de 0,2 % de la taxe immobilière serait-elle socialement plus juste qu’une baisse de 1,7 % des prélèvements municipaux après déduction de 0,8 % à ceux dont le revenu médian n’excède pas le dixième des trois quarts des contribuables imposables après déclaration forfaitaire ? Ou un truc du genre. Idem pour l’Europe, passée à la fois en pertes et profits et à la moulinette administrative, sans qu’il soit possible de creuser plus avant l’affaire.
Gérald Darmanin, ministre de l’Action et des Comptes publics, avec sa tête de premier de la classe et ses airs de sacristain attrapé par le bedeau pour avoir dissimulé des photos olé-olé dans son missel, en rajoute évidemment. Ce n’est plus 2,3 % mais 3,2 %. Deux milliards et pas un. Un impôt plus qu’une taxe. C’est peu dire que Marine Le Pen n’est pas particulièrement à l’aise dans ce genre d’exercice. Et alors, la belle affaire ? Le général de Gaulle, pas plus que François Mitterrand, n’excellait en ce type d’exercices, sachant qu’il y a toujours un ministre des Finances pour ce genre de choses. Louis XIV ne savait pas compter. Colbert, si. Et les Français savaient à peu près ce qu’il y avait dans leur assiette, qu’elle soit fiscale ou pas.
Finalement, le meilleur de l’émission, c’est quand tout s’arrête. Il reste à l’invitée quelques minutes pour exprimer le fond de sa pensée, livrer la vision qu’elle a de la vie en général et de la France en particulier. Évoquer l’enracinement et la transmission de ce que nous sommes, dire que si nous travaillons pour vivre, nous ne vivons pas forcément pour travailler.
Bref, le combat continue. De plus belle et malgré tout.
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