Masure injurie ses confrères : l’étau médiatique craque, il ne le supporte pas

Capture d'écran
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Mes premiers souvenirs de Bruno Masure ? Quelques images sur le poste de télévision familial, il y a très longtemps, quand François Mitterrand était Président : le dîner est terminé, je traînaille à côté de mes parents sur le canapé, reculant le moment de finir mes devoirs. Avec sa face ronde, on dirait un placide nounours en cravate. Il lit son prompteur sans ciller, dévidant le fil d’une information unique à laquelle la France rassemblée prête une absolue objectivité. Elle est parole d’Évangile. C’est une grand-messe à laquelle tout le monde communie. On y arrive à l’heure - 20 heures - dans cette petite église qu’est le salon. Il n’y a, d’ailleurs, que deux paroisses, TF1 et France 2 - les chaînes d’information continue ne sont pas encore nées - qui distillent le même son de cloche. Et on boit les propos du présentateur : il est le chemin, la vérité et la vie. Bruno Masure finit souvent son JT par un jeu de mots oiseux qui fait paraître le bonhomme encore plus inoffensif.

« Débile mentale »

Comment aurais-je pu imaginer que ce monsieur, à l’âge de 77 ans, m’insulterait, un certain 28 décembre 2024, me traitant (sur X) de « débile mentale », affirmerait « avoir tellement honte de me voir proclamer journaliste », m’accuserait de « salir profondément la profession » et « de n’exercer que dans des médias putrides » ? Et ce n’est pas fini : peu lui importe ma carte de presse, je ne suis « évidemment pas journaliste », je « ne bosse que que pour des sites hyper foireux militants d’extrême droite, style Boulevard Voltaire » et, même, « c’est une injure pour la profession des vrais journalistes ». Fermez le ban.

Quel crime ai-je donc commis pour m’attirer ce torrent d’insultes ? Noter, sur X, le soutien fébrile de l’extrême gauche à « Wokipedia », mis en cause par Elon Musk.

Disons-le tout de go : j’ai cru, un instant, que le compte X de Bruno Masure, non certifié et à la présentation provocatrice jouant l’autodérision, était parodique. Tenu par un usurpateur. Las, il n’est en rien. Ses amis de Libération, par la voix d’un article signé CheckNews, rapportent que le compte Twitter (devenu X) de Bruno Masure « parfois graveleux » (sic), au « langage pour le moins fleuri (voire grivois, et parfois clairement insultant) », est bien le sien. Celui-ci, contacté par leurs soins, assume, persiste et revendique sans complexe ses propos.

Pour voir les bons côtés en cette période de Noël, je pourrais considérer que cette charge violente vaut titre de gloire, Bruno Masure ayant attaqué les plus grands : feu Jean-Pierre Pernaut (qualifié de « gros con »), Laurence Ferrari (« pétasse », l’animatrice de CNews l’a d’ailleurs bloqué), Gérard Holtz (« handicapé » et « tocard chauvin »), Bernard de La Villardière (« pauvre aristo fin de race qui produit des émissions racoleuses, consternantes et vulgaires ») ou encore David Pujadas, qui rapporte ne plus compter les « messages insultants » et « orduriers » de la part de l’ancien présentateur. Même Aphatie (!) en prend pour son grade, à l’occasion d’une interview de Marine Le Pen sur RTL : « Avec ses questions débiles, ce pauvre Aphatie a encore ouvert un boulevard à Marine Le Pen. »

Neutre et objectif

Mais le vrai sujet est ailleurs : voici donc l’individu supposé parfaitement neutre, qui a présidé pendant près de quinze ans aux choix éditoriaux présentés, sans contradiction, à toute la France communiant dans la même information biaisée et orientée ?

On comprend mieux pourquoi l’ancien présentateur hait tout particulièrement les chaînes d’info - « Les chaînes "d’info", écrit-il, éjaculent avec Pétain, ils ont le buzz pour toute la soirée voire plus si affinités » - et ceux qui les incarnent : dans une photo du plateau de Face à l’info (CNews), il dit avoir « une vision d'horreur ». Cette haine est assez logique, puisque celles-ci ont mis un terme au monopole de l’information dont il était, avec une poignée de ses comparses du même tonneau idéologique, le roi omnipotent. Bruno Masure vient, finalement, confirmer ce qu’il prétend nier : à l’instar, plus tard, de Wikipédia, le JT des deux chaînes de la télé française (il est passé de l’une à l’autre) ont profondément modelé, orienté, influencé sous couvert de neutralité et d’expertise, servant un prêt-à-penser tous les soirs façon Pravda, une vérité incontestable et incontestée.

Puisque Bruno Masure défend Wikipédia, on suppose que les informations que l’on y trouve à son sujet sont exactes : il y est décrit comme « bisexuel », athée, voire, selon ses dires, « bouffeur de curé » et « membre du comité d’honneur de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité ». On est dans le sujet : l'information unique est en train de trépasser, mais n'a pas la dignité de mourir en silence. Ses promoteurs beuglent décidément très fort, et avec vulgarité.

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Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

218 commentaires

    • En effet, comme disait De Gaulle qui savait de quoi il parlait… car la seule excuse qu’on pourrait lui trouver pour avoir laissé tomber les harkis entre les pattes du FLN, horriblement torturés, la seule excuse donc qu’on pourrait lui trouver c’est la vieillesse. Mais hélas, ce n’est pas la cause et ras-le-bol d’entendre parler de lui comme d’un grand homme (si ce n’est pas la taille) . Tout cela pour en arriver au fait de la gauchisation de la presse puisque c’est lui qui a donné le ministère de la culture au cryptococo Malraux que même CNEWS porte aux nues (cf l’extrait complètement hystérique passé il y a quelques jours et qu’on était obligé d’admirer alors qu’on était plutôt gêné !

  1. Je comprends votre envie et besoin de répondre et remettre à sa place ce triste petit homme, mais vous savez très bien Mme CLUZEL, que vous ne jouez pas dans la même division que ce personnage, mais êtes bien largement au-dessus de ce celui-ci. Belle fin d’année à vous.

  2. une masure, c’est une maison plus ou moins en ruine…
    visiblement, ça peut être aussi une ancienne gloire des médias virée gâteux

  3. Bravo Mme Cluzel de dénoncer ces comportements. Mazure : un pseudo journaliste juste bon à lire son prompteur et à debiter la grand messe pré digéré comme les medias publics en produisent tant . mais tout cela est terminé ,les réseaux sociaux et les chaines info ont ouvert les yeux des francais .

  4. C’est exactement là le problème… Bruno Mazure « a présidé pendant près de quinze ans aux choix éditoriaux présentés, sans contradiction, à toute la France communiant dans la même information biaisée et orientée ». « le JT des deux chaînes de la télé française (il est passé de l’une à l’autre) ont profondément modelé, orienté, influencé sous couvert de neutralité et d’expertise, servant un prêt-à-penser tous les soirs façon Pravda, une vérité incontestable et incontestée. »
    l’ORTF avec uniquement 2 chaines + la 3 régionale à partir de 72, nous n’avions que les infos que l’état voulait laisser passer au petit écran. C’était la télé d’état qui formatait la pensée du citoyen…la pensée unique avec l’info censurée. On voit aujourd’hui où cela nous a conduit. Les médias tous à gauche difficile à déboulonner, les institutions, les associations, le monde artistique… tous à gauche alimenté à coup de subventions. Notre société a été verrouillée à gauche par la gauche depuis ces années là… Une société à part, déconnectée des réalités des citoyens lambdas, ne se remettant jamais en question et surtout bien accrochée à son idéologie : ceux qui ne pensent pas comme elle sont des mauvais…
    Merci Gabrielle

  5. Pour moi madame la seule vérité qui compte au delà de tout c’est la liberté de penser et pour moi vous êtes son garant.
    Bravo pour votre courage.
    Un admirateur

  6. Masure exagère beaucoup. De son temps, on trouvait des opinions plus radicales encore au Figaro Magazine. Gabrielle, c’est la nostalgie du Ouest-France des années 80 et des élus UDF de province.

  7. Où va-t- on si mai tenant les speakers se mettent à décerner des brevets de bon ( ou mauvais) journalisme à de vrais professionnels ( enfin pour Apathie je ne suis pas sûr). Catherine Langeais, Denise Fabre et Anne Marie Peysson étaient plus discrètes et savaient rester à leur place, même s’il y avait dans leur petit doigt mille fois plus d’intelligence que dans la caboche de ce monsieur.

  8. la pauvreté du discours de ce type aux portes de l’Epadh, heureusement qu’il y a les réseaux sociaux pour que ce personnage antisocial puisse s’exprimer, il n’a donc aucune ambition du reste de son existence pour tenir des propos aussi orduriers.

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