[L’ÉTÉ BV] Maudit, ce sacré rabbi Jacob ?
3 minutes de lecture
Cet article a été publié le 19/10/2023.
Tout l'été, BV vous propose de relire certains articles de l'année écoulée. Ici, nous voulons célébrer la France éternelle.
Sauf si vous avez passé le dernier demi-siècle au fin fond de la jungle de Papouasie – et encore ! -, vous connaissez sans doute par cœur Rabbi Jacob, mille fois, ou presque, regardé en famille devant votre téléviseur. Donc, on vous épargnera un résumé des aventures de Victor Pivert, ce chef d’entreprise acariâtre et quelque peu raciste, comme on devait l’être encore à l’époque en France, incarné par Louis de Funès. Film qui fêtait, ce 18 octobre, les cinquante ans de sa sortie. C’était donc en 1973.
Au moment de sa sortie, attaques et détournement d'avion
Quelques jours avant la sortie du film, le 6 octobre, Égyptiens et Syriens avaient attaqué par surprise Israël, en lançant leurs troupes simultanément dans la péninsule du Sinaï et sur le plateau du Golan. Passée la surprise, Israël reprit rapidement le dessus et, le 24 octobre, après une de résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, un cessez-le feu intervenait entre les belligérants. À cette époque, le « machin » servait visiblement encore à quelque chose. On s’éloigne de Rabbi Jacob, me direz-vous, mais il n’est peut-être pas inutile de « recontextualiser », comme on dit de nos jours. D’autant que, à l’époque, un drame vint assombrir la sortie du film, justement à cause de ce conflit israélo-arabe. Une jeune femme âgée de 35 ans détourna un Boeing d’Air France sur la ligne Paris-Nice. L’affaire se termina mal à Marignane car la femme fut abattue par les policiers du GIPN. Pourquoi ce détournement ? Cette femme, pourtant convertie à la religion israélite après son mariage avec un Juif, voulait protester contre la sortie de Rabbi Jacob. Dans une lettre rédigée dans l’avion et remise à une hôtesse, elle exigeait que « toutes les bobines de Rabbi Jacob soient mises sous scellé et projetées lorsque les Israéliens et les Arabes ne mourront plus ». Le mari de cette femme n’était autre que Georges Cravenne, né Cohen, un publicitaire, chargé par le réalisateur du film, Gérard Oury, d’assurer la promotion du film. Le film sortit quand même et, depuis, Israéliens et Arabes continuent de mourir dans cette région du monde, grande comme à peine la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, une région que l’on appelle Terre sainte et qui est aussi celle du Talion. Et cinquante ans après, quasiment jour pour jour, le Hamas a lancé une attaque terroriste sans précédent sur Israël. Un conflit qui s’invite chez nous de multiples manières, comme on a pu le voir ces derniers jours : entre drame d’Arras, multiplication des actes antisémites et éclatement de la NUPES.
Rabbi Jacob, victime collatérale du conflit Hamas-Israël ?
Rabbi Jacob lui-même fait désormais partie, comme il faillit l’être en 1973, des victimes collatérales de ce conflit Hamas-Israël. Ainsi, à La Ciotat (Bouches-du-Rhône), l’exposition de photographies, d'affiches et correspondance consacrée aux cinquante ans du film a été annulée (on dit « reportée »), nous apprend La Provence sans trop d’explications. On devine que c’est « en raison du contexte », comme on dit aujourd’hui. Le quotidien régional a chopé au vol la réaction de quelques passants : « On n’a pas tellement envie de rire avec ces horreurs. » Donc, on fait quoi : on arrête de rire partout en France ? Faudra leur dire qu'on risque de plus beaucoup rire, si ça continue comme ça... « Mourir de rire, c'est possiblement vrai, d'ailleurs la preuve en est que les gens n'osent plus trop rire ! », chantait Jacques Brel... Sinon, c'est tout, pas d’autres réactions ? Personne pour dire que les raisons n'ont peut-être rien à voir avec une question de décence, avec ce qui pourrait ressembler à ce qu'on appelait autrefois un délai de viduité ? Aucun de ces passants pour faire remarquer que c’est peut-être dangereux, dans ce pays, d’organiser une exposition qui pourrait être la cible d'islamistes ? Et pour reconnaître qu'avec ces petits renoncements, ces islamistes ont déjà gagné. Personne, vraiment ?
Alors, maudit, ce sacré Rabbi Jacob ? Comme les quelque 7.295.727 spectateurs qui ont vu le film en salle, sans compter ceux qui l’ont vu, revu. Ou qui le verront encore à la maison comme, par exemple, dimanche prochain, sur France 2. Sauf si…
Thématiques :
Rabbi JacobPour ne rien rater
Les plus lus du jour
LES PLUS LUS DU JOUR
Un vert manteau de mosquées
31 commentaires
Quand on pouvait encore rire de tout…
Ou les 11 millions d’électeurs qui ont porté leur voix sur le RN. Ca commence à faire beaucoup de maudits non ?
C’était avant !!!
A sa sortie, ce film a été un succès populaire et on garde en mémoire la scène culte de Louis de Funès dansant sur une chorégraphie décoiffante et déjantée. Mais un tel succès ne serait plus possible aujourd’hui. J’en veux pour preuve que la comédie musicale « Les aventures de Rabbi Jacob (inspirée du film), mise en scène par Patrick Timsit en 2008 a été un échec commercial. Malgré la chanson « hip hop » interprétée par MC Solaar, intitulée « Rabbi Muffin », qui a pourtant remporté un grand succès, la critique a éreinté cette comédie musicale. Ce spectacle ne sera pas resté très longtemps à l’affiche malgré un budget de 6 millions d’Euros.
Et, pensez-vous que « La cage aux folles » passerait de nos jours ? Et tant d’autres succès. On se contente de la 7ème compagnie, et c’est bien faible !