Maxence de Rugy : « J’ai découvert un droit spécifique qui s’applique pour une communauté particulière des gens du voyage, consacré par le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel »
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Afin de préserver la biodiversité d'un endroit protégé, une petite commune de Vendée, Talmont-Saint-Hilaire, a été contrainte de racheter un terrain à des gens du voyage. L'occasion pour le maire, Maxence de Rugy, de découvrir l'existence d'un droit spécifique et exclusif accordé par le Conseil d'État aux gens du voyage qui ont le droit de s'installer dans des endroits interdits aux autres citoyens.
Explications.
Vous êtes maire de Talmont-Saint-Hilaire, en Vendée, et vous avez racheté une parcelle de terre à 125.000 euros. Cette parcelle ne valait que 12.000 euros. Pourquoi avoir fait cette opération immobilière assez étrange ?
Effectivement, de prime abord, cela peut paraître assez étrange. Talmont-Saint-Hilaire est une commune très préservée avec un cadre naturel patrimonial riche et protégé. Sur le bassin du port de la Guittière, bassin ostréicole classé au titre de l’environnement et de l’urbanisme, une parcelle a été cédée à la communauté des gens du voyage. Le risque, d’un point de vue environnemental, était trop grand pour accueillir cette communauté sans assainissement, alors qu’à proximité, on y trouve des marais à poissons, des marais salants et tout un bassin ostréicole. La commune a donc fait le choix de racheter plutôt que de subir l’arrivée potentielle d’une centaine de caravanes.
Il faut savoir que ce terrain agricole de 6.500 mètres carrés acheté 12.000 euros par des particuliers issus de la communauté des gens du voyage était réservé pour l’accueil des gens du voyage. On a l’impression que ce rachat a été fait pour éviter l’implantation de gens du voyage dans votre commune. On serait presque tenté d’apparenter cela à de l’exclusion…
Absolument pas. Je souhaite deux choses. Premièrement, la préservation de notre biodiversité. Nous sommes sur le bassin du port de la Guittière, site inscrit et proche du rivage. Toute la réglementation française protège ces terrains parce qu’il y a une biodiversité, une richesse de la faune et de la flore. Des oiseaux viennent notamment nicher ici. Ce terrain est absolument protégé, mais pas pour tout le monde.
Deuxièmement, tout citoyen ordinaire ne pourrait pas y faire grand-chose puisque ce terrain est naturel et classé comme tel. Un droit spécifique s’applique pour la communauté des gens du voyage établi par le Conseil d’État et par le Conseil constitutionnel.
Les gens du voyage ont le droit d’utiliser un terrain, de s’y installer et d’y vivre, alors que les citoyens lambda n’appartenant pas à cette communauté ne peuvent pas le faire.
Ces espaces sont protégés, mais pas actés dans la mesure où un droit particulier s’applique pour la communauté des gens du voyage. Les caravanes sont assimilées à leurs habitats permanents et, à ce titre, ils ont la possibilité de pouvoir s’installer même dans une zone naturelle protégée ou des espaces forestiers. Ce qui est interdit pour tout citoyen ordinaire est autorisé pour la communauté des gens du voyage. C’est ce qui explique aussi la différence de prix. 12.000 euros pour la communauté des gens du voyage et 125.000 pour la commune.
Le conseil municipal a voté massivement pour. L’opposition s’est abstenue dans l’intérêt de la commune. Un seul élu a voté contre et s’inquiète pour l’argent public. En rachetant ce terrain une fortune, risquez-vous de créer des opportunités pour des gens malintentionnés ? Ils pourraient avoir l’idée de racheter des terrains, de menacer de les vendre à la communauté des gens du voyage et provoquer un rachat de dix fois le prix » ?
Alors que, pour tout citoyen, aucun projet n’est possible sur ces terrains classés naturels, un droit spécifique s’applique pour la communauté des gens du voyage. Je souhaite saisir les parlementaires pour qu’ils puissent résoudre cette difficulté juridique. C’est la porte ouverte à des campements sans réseaux, sans électricité, et d’autant plus dans un secteur particulièrement fragile et respecté où la biodiversité a toute sa place. J’ai proposé au département d’avoir une politique à travers les espaces naturels sensibles. Nous y travaillons pour, justement, répondre à cette problématique. Nous devons nous débattre pour protéger cet environnement avec nos propres outils juridiques.
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