Me Gilles-William Goldnadel, sur l’affaire Sarah Halimi dont le meurtrier ne sera pas jugé : « La Justice a mal traité ce dossier, le sort des victimes passe après »
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La Cour de cassation a confirmé que le discernement de Kobili Traoré était aboli au moment de l'assassinat de sa voisine de confession juive Sarah Halimi en raison, notamment, de sa consommation de cannabis. Il est donc « pénalement irresponsable ».
Réaction de Me Gilles-William Goldnadel, l'avocat de la famille de la victime.
L’islamiste meurtrier de Sarah Halimi, battue puis défenestrée car elle était juive, ne sera pas jugé. Vous qui êtes l’avocat de la famille, on vous imagine choqué.
Je ne sais pas si le mot choqué est le plus adéquat, car dans cette affaire, dès le début, la Justice a mal traité ce dossier. Je constate que lorsqu’il s’agit d’antisémitisme islamique, par une sorte de déni idéologique, le sort des victimes passe après l’obséquiosité avec laquelle on traite les soi-disant nouveaux damnés de la Terre. Je n’ai pas d’autres explications empiriques à vous donner. La juge d’instruction a toujours refusé de recevoir les avocats de la famille Halimi, a refusé la reconstitution du crime alors même que la défense était d’accord. J’attends que l’un de mes confrères soulève la jurisprudence Halimi lorsque l’un de ses clients, pris de delirium tremens alcoolique, écrasera des enfants sur un passage piéton…
En quelque sorte, le message envoyé est : « Si vous voulez tuer quelqu’un, fumez un joint ou buvez un verre » et ça passe....
Les explications judiciaires sont plus complexes que cela ! Mais le message risque, en effet, d’être entendu comme cela. Ce qui est entendu par une grande partie de la communauté juive, c’est que la justice est rarement au rendez-vous. Sans être paranoïaque, je constate que quand je défends un rabbin président de l’Association d’amitié judéo-musulmane, battu en sortant de la synagogue, le procureur d’Évry m’explique que ce n’est pas de l’antisémitisme. Lorsqu’un autre sort de la synagogue un vendredi soir et est pris à partie par des Maghrébins, ce n’est pas non plus de l’antisémitisme ! Les assassins de la rue des Rosiers coulent des jours tranquilles à l’étranger sans que la France ne se préoccupe de les faire venir. Le principal suspect de l’attentat de la rue Copernic est reparti tranquillement au Canada. On n’est pas près de le revoir.
En sortant de mon judéo-centrisme, je constate que nos neuf militaires de Bouaké ont été traités avec une indifférence particulière par les pouvoirs publics par M. de Villepin et le ministère de la Défense. Le sort de certaines personnes désintéresse une partie des élites médiatiques et judiciaires françaises. Ce matin, excepté des personnalités de la droite assez franches comme Éric Ciotti, Valérie Boyer, Marine Le Pen ou Nicolas Dupont-Aignan, le corps politique n’a pas exprimé son émotion, Et encore moins la gauche. Je vais faire du mauvais esprit : si, par pure hypothèse intellectuelle hardie, un policier français avait torturé puis défenestré un M. Traoré et si ce policier avait été considéré comme inapte à recevoir un châtiment pénal, je gagerais que certaines banlieues seraient prises du syndrome décrit sur M. Traoré.
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