Méchant, gentille : Donald Trump et Kamala Harris, vus par France Inter

Charline Vanhoenacker. Capture écran France Inter YouTube
Charline Vanhoenacker. Capture écran France Inter YouTube

« Un fasciste ». Voilà ce que serait Donald Trump, selon sa rivale à la Maison-Blanche, Kamala Harris. Le mot a été lâché lors d’une interview accordée à la chaîne CNN, le 23 octobre dernier, mais il avait déjà été prononcé, deux jours plus tôt, par une autre grande spécialiste de la politique américaine : Charline Vanhoenacker. « On a d’un côté une féministe, progressiste, humaniste, pro-LGBT, et, de l’autre, un misogyne conservateur, raciste, homophobe, a finement analysé l’humoriste de France Inter. Je dis pas qu’il y en a un qui est mieux que l’autre ! Je me retiens... » Pour la Belge, le choix entre les deux candidats américains se résume ainsi : « la liberté ou le fascisme »…

Cette chronique aussi nuancée qu’objective reflète assez fidèlement le traitement de la campagne américaine sur les médias de service public. En premier lieu sur France Inter. Le candidat républicain y est descendu en flammes à la moindre occasion. Il s’agirait d’un vil populiste au discours « profondément raciste », un affreux bonhomme dont les propos « visent à stigmatiser tous les Noirs » et à restaurer « l’hégémonie d’une population blanche ». Rien que ça ! « Ne nous payons pas de mots, l’enjeu est absolument clair. La question est de savoir si les États-Unis s’apprêtent à basculer vers l’extrême droite », résuma, le 13 octobre 2024, une certaine Sylvie Laurent. La dame étant enseignante à Sciences Po, mais aussi grande habituée des plateaux de Mediapart et Blast, sa neutralité ne fait bien entendu pas l’ombre d’un doute…

Trump, l’antéchrist

Selon les journalistes de France Inter, Donald Trump serait un personnage parfaitement dangereux. Ses discours seraient truffés d’« affabulations monstrueuses », sa vision de l’Amérique serait « absurde, mortifère, cauchemardesque ». « Il était déjà enclin à la dystopie en 2016 et en 2020 mais les observateurs politiques l’affirment : c’est encore pire aujourd’hui », assure la radio publique. La radio qui se gardait bien d’évoquer la sénilité, pourtant manifeste, du démocrate Joe Biden souligne lourdement l’âge du candidat Trump. « Certains s’interrogent sur sa santé mentale », affirme la station, en citant les propos rapportés de deux psychologues « de renom » mais néanmoins anonymes. « Pour eux, la santé mentale du candidat républicain, âgé de 78 ans, ne cesse de décliner. Leur diagnostic : démence probable. »

La quasi-totalité des médias français sont animés d’un anti-trumpisme primaire, mais selon France Inter, il faudrait plutôt s’inquiéter des « réseaux pro-Trump » qui sévissent dans notre pays. Dans une enquête publiée le 12 octobre dernier, la « cellule investigation de Radio France » pointe notamment du doigt l’association « Republican Overseas », coupable d’avoir organisé un dîner à Paris, en novembre 2023, en présence d’Éric Zemmour, Nicolas Dupont-Aignan ou Florian Philippot. Sidérant, en effet. Il y a aussi « Republicans in France », dont le représentant, Philippe Karsenty, a récemment « suscité la controverse » en osant « nier l’origine humaine du réchauffement climatique ». Rendez-vous compte ! Par ailleurs, l’homme est « connu pour avoir publié un livre d’entretien avec l’écrivain d’extrême droite Renaud Camus », mais aussi pour avoir contesté l’honnêteté de France 2 dans sa couverture du conflit israélo-palestinien. Bref, un sale type.

En résumé, les soutiens de Donald Trump sont au mieux des crétins, au pire des salauds. Il en va ainsi d’Elon Musk, le richissime patron du réseau social X, qu’Ali Baddou a présenté, le 13 octobre, comme un « milliardaire raciste ». Même entreprise de diabolisation envers Lara Trump, la belle-fille du candidat honni, dépeinte sur France Inter comme une détestable bonne femme, hargneuse et pro-armes à feu. « Quand je vous disais que le style Trump avait déteint sur elle… », ricane-t-on, sur l’antenne publique.

Sainte Kamala

Du côté des soutiens de Kamala Harris, en revanche, France Inter ne trouve rien à redire. Son mari, par exemple, est décrit comme un être absolument délicieux, un « chic type ». En cas de victoire de la démocrate, « Doug Emhoff deviendra le premier Premier Gentleman des États-Unis », et ça, c’est formidable. Voilà enfin un homme qui incarne cette « masculinité progressiste » chère à l’audiovisuel public, « aux antipodes de celle testostéronée prônée par le camp d’en face ». Par ailleurs, si le sympathique Doug est juif, il l’est de manière suffisamment discrète. Une qualité d’importance pour nos journalistes d’État. Il condamne, ainsi, le pogrom du 7 octobre, « mais sans hausser le ton ». Il a su « garder son calme ». Autrement dit, les islamistes du Hamas n’auront pas sa haine. France Inter applaudit. Cerise sur le gâteau, « Dougie » accompagne parfois Kamala Harris à l’église, « bref, des religions différentes, des origines aussi et une famille recomposée qui semble plus que parfaite »…

Au côté de ce « Daddy cool », Kamala ne démérite pas. Celle qui « est en train de combler son retard sur l'économie », brille aussi aux fourneaux. « Elle casse les œufs avec une main, mixe avec une poigne de fer, émince les oignons comme personne », nous apprend France Inter. La démocrate mitonne une « cuisine de caractère » et, quand elle prépare à manger tous les dimanches soir pour sa famille, elle a, dit-on, le contrôle sur sa vie. « Conclusion : une femme peut évidemment à la fois occuper la cuisine et le Bureau ovale. » Merci à France Inter pour ce militantisme aux petits oignons et bon appétit, bien sûr !

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 31/10/2024 à 10:12.
Jean Kast
Jean Kast
Journaliste indépendant, culture et société

Vos commentaires

24 commentaires

  1. Mare d’entendre les médias nous inonder à longueur de journée d’informations sur les élections américaines, comme si la France était le 51eme état des USA, et comme si l’avenir de notre pays en dépendait.
    Je n’ai aucune sympathie pour M Trump, mais j’en viendrais presque à souhaiter son élection, rien que pour voir les têtes d’enterrement de ces journalistes dont la partialité crève l’écran.

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