Mélenchon appelle à « l’action révolutionnaire et subversive » !

mélenchon burkina faso

Seraient-ce les effets de l’âge ? Mélenchon se lâche. Ainsi, ce mardi 18 juillet, alors qu’il tient meeting à Bruxelles, lors du « Sommet des peuples », happening rassemblant les représentants d’Amérique latine et des Caraïbes, le gourou de La France insoumise semble retrouver les accents guerriers de sa jeunesse trotskiste.

La conclusion de sa harangue ? Une quasi-invitation à la guerre civile ; qu’on en juge : « Camarades, j’ai l’âge qui me permet de rappeler l’époque où nous pensions avoir du temps. Et si on échouait à telle élection, on se retrouverait à la suivante. Et nous allions construire, avec l’infinie patience des milieux populaires. Maintenant, camarades, nous n’avons plus le temps. Nous n’avons plus que des délais. Et seule l’action révolutionnaire et subversive qui assure la rupture avec le capitalisme peut nous permettre de tirer l’humanité de l’impasse. » Il ne s’agit plus là de lutte des classes : juste celle du réchauffement climatique et de l’écologie. On a les luttes qu’on peut.


Bref, le coup d’État est pour demain ou ne sera pas. Pour oublié qu’il soit, ce discours n’est pas nouveau. Dans son essai, Vers la guerre civile (Éditions et publications premières, 1969), Serge July et ses co-auteurs, Alain Geismar et Erlyn Morane, n’appelaient pas autre chose de leurs vœux. Le premier a fait de Libération un quotidien maoïste, avant de soutenir la première Guerre du Golfe en 1990 et d’appeler à voter « oui » au traité de Maastricht, deux ans plus tard. Le deuxième est devenu l’un des pontes de l’Éducation nationale. Le troisième semble être parti en vacances sans laisser d’adresse. Tous trois sont rentrés dans le rang, en quelque sorte, au contraire d’un Jean-Luc Mélenchon qui, malgré plus de cinq ans passés au Sénat (2004-2010), semble renouer avec l’activisme de sa folle jeunesse. Pour autant, ce coup d’éclat n’est pas sans poser quelques questions.

Trotskiste un jour, trotskiste toujours…

N'est-il pas lancé dans une fuite en avant ? En bon trotskiste qu’il est, on sait où vont ses références historiques. La Révolution française, là où l’on coupait les têtes à tout va, avant que la réaction thermidorienne ne mette terme à tout ce désordre, tant il était logique que la bourgeoisie d’affaires vienne enfin tirer les marrons du feu et engranger les bénéfices de troubles qu’elle avait discrètement suscités ? Pour lui, et on ne saurait lui donner tort, cette révolution a comme un goût d’inachevé. D’où son admiration sans borne pour celle d’octobre 1917, quand Lénine et Trotski font basculer l’empire de la Sainte Russie, histoire d’assurer l’émancipation des peuples - avec le succès que l’on sait.

Comme toujours, tout se fait en loucedé : on connaît l’appétence trotskiste pour les pseudonymes et la dissimulation, l’infiltration des partis, tel un Lionel Jospin au sein du Parti socialiste et l’action larvée. D’ailleurs, la taupe n’est-elle pas l’animal totem des trotskistes ? Seulement voilà, nous ne sommes plus en 1917 et la classe ouvrière, jadis fer de lance du bolchevisme, a beaucoup déçu ses défenseurs autoproclamés, campant désormais sur d’autres terres électorales : celles de Marine Le Pen.

D’où le virage idéologique et stratégique d’un Jean-Luc Mélenchon, autrefois héraut d’un populisme de gauche théorisé par Chantal Mouffe, philosophe belge de renom. Le prolétariat d’avant ayant trahi la « cause », il s’agissait juste de trouver un autre prolétariat de substitution, celui des banlieues immigrées. Et c’est là que le temps se couvre, sachant que tout l’art de la politique consiste en premier lieu à résoudre ses propres contradictions internes. Ces dernières sont, par exemple, surmontables dans le cas du Rassemblement national, l’amour de la France étant susceptible de réunir, dans l’amour d’une patrie commune, gens de gauche et de droite, riches et pauvres et surtout ceux de la classe moyenne.

Dans le cas de La France insoumise, l’équation est autrement plus complexe, puisque consistant à faire cohabiter néo-féministes et transsexuels d’un côté et musulmans défendant, de l’autre, un modèle sociétal des plus patriarcaux. De l’art de manier de la dynamite avec un seul bras et un pied bot, en équilibre sur une corde surplombant le vide. D’où, sûrement, cette sortie lyrique qui lui permet de laisser de côté ses propres contradictions.

Complice des multinationales ?

Ce calcul à court terme laisse apparaître d’autres contradictions encore plus graves, telles celles consistant à tenir le Rassemblement national pour mouvement « antirépublicain » alors que le sien, et ce, de longue date, ne l’a jamais été. Ce mardi, Jean-Luc Mélenchon vient de le prouver une fois encore en appelant à renverser le peu d’autorité régalienne subsistant encore en France. Trotskiste un jour, trotskiste toujours.

Il faudra bien qu’un jour ou l’autre, les masques tombent une bonne fois pour toutes. Cette révolution en trompe-l’œil n’est jamais que la complice de ces gens aspirant eux aussi à un monde indifférencié, sans frontières ni identités : celui des multinationales mondialisées. Cette ultime contradiction, Jean-Luc Mélenchon ne semble pas être prêt à la résoudre.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

28 commentaires

  1. Comme chacun peut le constater , les expériences de gouvernements de gauche , d’extrême-gauche , communistes , socialistes ont été un succès phénoménal en URSS , en Amérique Latine , en extrême orient , en Europe de l’Est . Mélenchon et LFI se gargarisent de ces succès que le monde entier envie … Il est illuminé le lider maximo de LFI , tartarin à lier !

  2. Tous ceux d’extrême gauche ,englués dans leur idéologie, ne se rendent pas compte qu ils font parfaitement le jeu du très grand capital, ni que les musulmans qu ils défendent comme des forcenés, ne leur obéiront jamais puisque, grâce à eux’ ils auront accédé au pouvoir

  3. À vrai dire, la conclusion de Mélenchon n’est pas dénuée de bon sens. Le temps presse. Sauf que pour moi il s’agit de déloger Macron et toute sa clique. Je ne crois pas que nous sauverons la France par les urnes. Donc…

  4. Appel à l’insurrection, c’est puni par la loi ! J’oubliai, en France, un délinquant est un « petit ange ». Un citoyen, normal (ni belge, ni suisse aurait dit Coluche) n’est bon qu’à se taire et a payer, surtout. si Mélenchon a décidé qu’il était d’exrèèèèème droiaaaaate !

  5. Il serait vraiment temps que ce dangereux opportuniste réponde de ses actes.
    La justice est-elle à ce point vendue qu’elle ne m’inquiète jamais?

  6. Triste sire que ce Mélenchon. Il m’amusait à un époque mais aujourd’hui je pense que c’est un nuisible empêtré dans ses contradictions. A Bruxelles devant la fine fleur des survivants de la révolution permanente il ne pouvait que faire son show qui n’intéresse plus personne. Mélenchon est un has been il finira dans les poubelles de l’histoire comme tant d’autres révolutionnaires.

  7. La convergence entre les objectifs des multinationales et ceux des trotskystes peut paraître étonnante mais elle n’est pas une contradiction de la pensée mélenchonienne, elle ne résulte pas de l’opposition entre deux éléments de la pensée du leader maximo ou de l’idéologie trotskyste. En fait, cette convergence n’est pas surprenante puisque l’idéologie trotskyste et l’idéologie libérale qui irrigue les staffs des multinationales partagent beaucoup de choses. Cela tient au fait qu’elles ont des racines communes qui se situent dans la philosophie du XVIIIe siècle et dans l’idéologie de la Révolution française. Elles partagent notamment l’idée selon laquelle les groupes humains, les nations en particulier, n’ont aucune importance; pour elles deux, l’unification de l’humanité est un objectif essentiel. Les révolutionnaires libéraux de 1789 ne connaissaient que l’individu et le genre humain, la nation n’étant pour eux qu’une association d’individus partageant la même idéologie individualiste et universaliste. Certaines convergences idéologiques sont plus étonnantes encore. Le gourou de la Nouvelle Droite, plaide pour la destruction totale du capitalisme, comme Mélenchon, et pour la décroissance, comme les Verts. Pour autant est-il un vert trotskyste ? Non bien sûr, puisque le fondement de sa pensée c’est la Révolution conservatrice allemande des années 1920-1930 dont son ami Giorgio Locchi a dit qu’elle est inséparable du nazisme (in « L’essenza del fascismo »; voir à ce sujet l’ouvrage de Stéphane François : « La Nouvelle Droite et ses dissidents »). La convergence entre les objectifs de Mélenchon et ceux de De Benoist n’est pas le signe d’une contradiction propre à la pensée de l’un ou de l’autre.

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