Mélenchon au Sénégal : un démagogue hors-sol

Capture d'écran
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Jean-Luc Mélenchon s’est rendu à Dakar du 14 au 17 mai. À l'évidence, à des fins d’électoralisme national et d’idéologisme international. Si La France insoumise peut en espérer un gain électoral, on peut douter de l’avenir de sa théorie globale de « la révolution citoyenne » et « l’ère du peuple » portée par ce doctrinaire narcissique en quête de public.

Soutien au parti d’opposition Patriotes africains

Accompagné d’une délégation de LFI, Mélenchon a habilement capté l’attention médiatique en capitalisant sur son soutien précoce et isolé, mais bien calculé, au parti d’opposition Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (PASTEF). Bassirou Diomane Faye a remporté l’élection présidentielle du 24 mars au terme d’une campagne explosive et a nommé le charismatique président du PASTEF Ousmane Sonko (empêché de se présenter) Premier ministre. En effet, l’ancien président Macky Sall, pensant réussir comme d’autres un coup de force institutionnel encouragé par le soutien sélectif de la communauté internationale dont l’État français, a tenté d’en reporter l’échéance pour se donner les meilleures chances. Rompant avec la tradition sénégalaise d’alternance démocratique, cette tentative désespérée de maintien au pouvoir d’un régime très contesté s’est heurtée à un vaste mouvement de protestation populaire. L’invalidation salutaire du report par le Conseil constitutionnel a permis d’éviter un bain de sang. On peut y voir un exemple rare, en Afrique francophone, de régime ultra-présidentiel, de solidité et d’intégrité des institutions publiques face à des intérêts claniques, alliés dociles mais défaillants, soutenus par l’État français, au nom d’une prétendue stabilité, sous le prétexte fallacieux de non-ingérence par respect de la souveraineté locale. Les loups de l’élite technocrate mondialisée ne se mangent pas entre eux.

Comme on l’a vu ces dernières années au Sahel d’où l’État français a été expulsé par des populations qui ont pris leur destin en main, le fameux « sentiment antifrançais » se nourrit d’un soutien politique et financier inconditionnel à des régimes défaillants et prédateurs. Mélenchon, chaleureusement accueilli par Ousmane Sonko, a compris que les peuples africains ne se satisfont plus d’une fausse stabilité et exigent désormais de leurs dirigeants redevables qu’ils assurent leurs besoins essentiels par un taux décent de redistribution. Que le temps des « Printemps africains » est venu, comme on l'annonce à maintes reprises depuis cinq ans dans ces colonnes. Car en Afrique, la mauvaise gouvernance tue plus que les guerres.

Exercice démagogique anti-impérialiste

Temps forts de cette visite de Mélenchon, une conférence de presse conjointe avec le Premier ministre Sonko ; puis une conférence à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar sur le thème des relations entre l’Afrique et l’Europe ; enfin, un long monologue de type macronien à l’école de commerce Sup de Co sur les instabilités politiques et leur impact sur l’Afrique. Un monologue « dédié à la Palestine ». Mélenchon a « une pensée émue pour les massacres qui s’y déroulent ». Il ne cache pas sa « pleine et entière solidarité avec le peuple palestinien », rappelant que le Sénégal a soutenu très tôt l’OLP et Yasser Arafat. Sur la forme, le tribun Mélenchon, « éternel prof » comme il aime à se désigner, est à l’aise dans cet exercice démagogique de rhétorique anti-impérialiste et anticapitaliste, dans un pays de tradition intellectuelle et spirituelle où opère la « magie du verbe ». Il fait face à un public panafricain séduit par son appel au « dégagisme » de dirigeants incapables d’assurer leur quotidien, acquis à son esprit frondeur et amusé par son ton outrancier, plutôt que conquis par ses valeurs et ses idées. Car, sur le fond, le trublion Mélenchon cultive sa différence par des raccourcis simplificateurs sur l’économie de marché pour annoncer « des bifurcations sociétales inéluctables » et appeler à « un mouvement mondial des opinions publiques », seul apte à « fabriquer les rapports de force ». Se prétendant hors système, son appel à une modernité de rupture radicale contredit l’aspiration générale à prendre part à la société de consommation. Pire, son appel à une révolution pseudo-progressiste des mœurs, wokiste et LGBTQ, heurte profondément l’attachement des peuples africains à leurs traditions, qu’il juge obsolètes.

Mélenchon a beau flatter la jeunesse africaine en lui promettant d’être « la principale dynamique mondiale des XXIe et XXIIe siècles » par la loi du nombre et de la créolisation de l’humanité, les Africains connaissent leurs limites et ne sont pas dupes des flatteries. En cela, Mélenchon est hors-sol en Afrique.

Jean-Michel Lavoizard
Jean-Michel Lavoizard
Ancien officier des forces spéciales. dirige une compagnie d’intelligence stratégique active en Afrique depuis 2006

Vos commentaires

32 commentaires

  1. Admirable Mélanchon qui soutient donc un parti d’opposition « Patriotes Africains du Sénégal pour le Travail ».
    Il faut noter car c’est nouveau, comme l’idée de refuser le droit de vote aux allochtones depuis l’affaire de Nouméa. Quelle évolution, il lui est encore possible de se mettre dans la liste de Zemmour, avec les patriotes français de France ?

  2. Comment en 2024, en France, on tolère que des héritiers de Staline et de Trotski puissent se balader en toute liberté et vomir leur haine de mon pays ?

    • Parce que la France est aux mains des héritiers de Robespierre et Saint-Just, qui n’ont rien à envier aux tortionnaires communistes, d’autant plus qu’ils sont leurs maîtres à penser.

  3. Je ne suis pas sûr que nos amis africains apprécieront longtemps les porteurs de flammes défendus par Mélenchon… Laissons le fruit tomber !

    • La collecte des voix créolisées sera bien limitée mais une fois encore la France aura été bafouée aux yeux de cet Afrique à qui elle a tant donnée.

  4. ‘ les Africains connaissent leurs limites et ne sont pas dupes des flatteries.’ ? Après 45 ans d’Afrique je diverge : car comme tous les êtres humains les sub-Sahariens sont poreux aux sentiments : notamment à ceux qui sont infiltrés à l’aide de roubles et de yuans. La rue africaine est manipulée par l’anti-France (de Soros à ‘ wagner’), les gradés par Moscou et les affairistes par Pékin. Mélenchon va faire sa cour mielleuse, idéologique et démagogique au nouveau chef d’état sénégalais réputé gauchisant et anti- France. Et quémander diverses aides pour son parti ?

  5. Il est sûr qu’un Melenchon allant prêcher le wokisme et les bienfaits des LBGT dans pays qui pratique encore l’excision et bannit l’homosexualité… Il a tout compris. Les Senagalais l’ont applaudit parce qu’il crache sur l’Europe et les blancs, mais pour le reste, qu’il ne se fasse pas de,illusions : c’est cause toujours.

  6. En voilà toujours un qui s’éclate au Sénégal. S’il pouvait y rester, ça nous ferait des vacances. Mais les Sénégalais ont sûrement plus de bon sens politique que les Français, et je doute qu’ils le gardent bien longtemps.

  7. « Le voyage de monsieur Mélenchon en Afrique. »
    Ce qui ne passe plus auprès des « masses communistes » en France, peut-être ou peut être entendu par les « masses africaines », ou le communisme n’est qu’un concept abstrait incomparable avec les traditions locales.
    Une fois « Les Monologues du Vaurien » Mélenchon expédiés, le Sénégal, qui n’avait même pas suspendu son souffle, est retourné à ses occupations.
    Ben non Jean-Luc, le Sénégal ce n’est pas toi !

  8. Il est des personnes en France qui se permettent des actions dites politiques qui seraient pas admis dans bien d’autre pays et les mettant en prison. J’aime bien le mot, des populations qui ont pris leur destin en main, alors quant on regarde de près ces réalités on vois bien que la population n’y est pour rien, comme en France où notre destin n’est pas vraiment en nos mains.

  9. Il y a peu de chance que les Sénégalais se laissent rouler dans la farine, par Mélenchon. Sa tentative de récupérer les voix d »Africains en France est un coup d’ épée dans l’eau.

  10. C’est devenu une mode initiée par Macron pour tous ces salopards de politiques de se promener à travers le monde avec l’argent public et pour cracher sur leur pays ! même les locaux départements, agglomérations et région s’y mettent. Il faut croire qu’ils ont tous encore l’argent gratuit qui coule à flots.

    • Je me fais la même réflexion : d’où vient le pognon qui coule à flot ? Serait-ce les fruits de nos laborieuses épargnes, dont quelques 30% sont confisquées ( escroquées) par l’IRPP sournoisement prélevé à la source, les banques complices, et autres taxes diverses et variées ponctionnées sur tout ce qui bouge (ou ne bouge pas) dans le  » bas-peuple », à coups de 0,5 % + 0,5 % + 0,5% , etc….,, hormis leurs voyages en jets privés et leurs exonérations diverses et inventives ?

  11. Finalement il s’est déplacé pour rien , même les africains n’en veulent pas . Et une fois de plus il dénigre et trahit la France .

  12. Je pense qu’il est encore plus dangereux que notre locataire à roulettes.

    N’oublions pas qu’il faillit finir au 2nd tour en 2022. Face au désaveu massif du pitre en place, beaucoup votèrent MLP par rejet. Imaginez si le second tour fût différent.

  13. Comment s’appelle un chef de parti qui va cracher sur son pays en Afrique..? Un traitre..
    Après,..macron en a fait autant très souvent..Partageaient ils la même cellule si ils sont jugés ,un jour,selon leurs merites

      • oui, et alors ??? Il a gardé de son enfance au Maroc un vision  » idéalisée » du  » vivre ensemble », sauf que en France la majorité des gens malgré les métissages, les importations d’ici et d’ailleurs, la majorité veux rester  » maitre en son pays » … et surtout veux que les us et coutumes soient à minima respectés- veux que la sécurité revienne, veux qu’au pays de la haute couture on ne  » s’habitue pas » aux tenues qui effacent les femmes, que les chevelures restent au vent, bref, veux rester Française et pas devenir ce  » meltingpot »qui la dénature, la rend vulgaire, mal emboucher et sale.

    • Soyons justes, Macron n’en a pas fait autant. Il l’a fait avant. Et pas qu’en tant que chef de parti mais en tant que président.

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