Meurtre de Rose : politiques et juges doivent être tenus pour responsables

Ce mardi, Rose, 5 ans, jouait dans un square, à quelques mètres de sa mère. Mais en quelques minutes, la petite fille disparaît. S’en apercevant immédiatement, ses parents s’affolent, crient son nom. Dans l’après-midi même, les voisins organisent une battue, espérant que la petite fille se soit simplement perdue. Mais quelques heures plus tard, la police reçoit l’appel d’un homme étrange. Il dit être en présence de Rose dans son appartement. La police se rend sur place et la retrouve effectivement, morte et cachée dans un sac-poubelle. Les enquêteurs soupçonnent un viol puis une asphyxie.

C’est évidemment d’abord l’horreur du crime et l’innocence de la victime qui entraînent une émotion légitime. Mais au vu des révélations des derniers jours, l’émotion doit être suivie d’une colère et de responsabilisations. En effet, le suspect est encore un récidiviste. Il y a à peine un an, il a violé deux garçons de 10 et 11 ans dans une forêt. Malgré la gravité de ce premier crime, le juge pour enfants l’a placé dans un centre éducatif fermé, à mi-chemin entre la prison et le centre aéré. Pire : contre toute précaution, le suspect a même été relâché, il y a quelques semaines, conformément à la loi… Comment justifier cette situation ubuesque ?

C’est ce qu’a demandé la mère de Rose : « Pour quelle raison l’ont-ils laissé sortir ? » Nous connaissons la raison. Comme la procureur de la République l’a évoqué, c’est la loi, votée par nos représentants nationaux, qui interdit de conserver un mineur en centre éducatif fermé plus d’un an. Et sur les suites, il y a plus inquiétant. Le suspect a 15 ans. Il sera donc jugé par la cour d’assises pour mineurs et la peine encourue sera encore réduite par « l’excuse de minorité ». Il n’encourt donc au maximum que vingt ans de prison et sortira, au plus tard, à 35 ans. Et encore... si l’abolition du discernement n’est pas retenue.

Irresponsabilité de la Justice

Les causes à l’origine de cette situation sont nombreuses : inadaptation de la Justice des mineurs, sa lenteur, orientation totale de la Justice vers la réinsertion des coupables, etc. Mais, elles peuvent être rassemblées sous un principe : l’irresponsabilité, des magistrats mais surtout des pouvoirs publics.

En effet, les magistrats sont d’abord déresponsabilisés dans leur pratique professionnelle puisque, considérés indépendants, ils n’ont aucun compte à rendre sur leurs décisions, même en cas de de faute manifeste. Deuxièmement, ils sont déresponsabilisés sur leur comportement, le Conseil supérieur de la magistrature ne sanctionnant que deux magistrats par an, en moyenne, depuis 1954.

Enfin, ils sont même déresponsabilisés de leurs opinions politiques. Quelles sanctions, par exemple, pour le Syndicat de la magistrature, auteur du « mur des cons », en 2013 ? Aucune, ou quasiment.

Des réformes doivent donc impérativement être engagées. Pourquoi ne pas ouvrir le débat de l’élection des procureurs au suffrage universel, comme aux États-Unis ? Malgré ses dérives potentielles (dans certains États d’extrême gauche), elle peut responsabiliser certains magistrats.

Pourquoi ne pas, non plus, réformer le Conseil supérieur de la magistrature, gangrené par l’entrisme syndical, en imaginant, par exemple, de tirer au sort les magistrats qui le composent ?

Des responsables qui se renvoient la balle

Mais finalement, ce sont d’abord et avant tout les politiques, à l’origine de ce système judiciaire, qui sont les plus déresponsabilisés. En effet, qui rendra des comptes du fait que la France est probablement le pays le plus dangereux de l’Union européenne, selon Eurostat ou Numbeo ? Qui rendra des comptes pour les dizaines de mécanismes de réductions de peines et de sorties anticipées des détenus votés depuis vingt ans ? Ou pour l’augmentation de la quasi-totalité des statistiques de criminalité sur la dernière année ? Qui rendra des comptes à la mère de Rose ?

Chaque drame impliquant des failles de la Justice se termine de la même manière : les responsables se renvoient la balle, en attendant que le grand public oublie, et le drame se reproduit quelques mois plus tard. Aujourd’hui, cela doit cesser.

Picture of Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

58 commentaires

  1. Dans une « Start Up Nation », comme l’a annoncé Macron, tous les métiers doivent être tenus devant leurs responsabilités. Les chirurgiens et médecins spécialistes et généralistes ne peuvent ils pas être attaqués en procédures ? Eh oui, alors pourquoi pas les Psychiatres, psychologues, etc…? Donc au Civil à minima, ce devrait être pour Tous….
    Jusqu’à être obligés de changer de métier en cas de fautes graves, due à crimes….

  2. M. Le procureur l’a dit : « toutes les procédures ont été respectées »…donc…tout pour le mieux dans le meilleur des mondes…Il n’y a plus rien à voir. Surtout pour la petite Rose…dont l’on nous a d’abord dit que l’assassin, récidiviste, ne « présentait aucun trouble psychiatrique », mais avait pourtant quitté, pour « évolution positive », son centre d’internement et…récidivé après moins d’un an…Progrès : la dernière expertise psychiatrique ferait état de « trouble du discernement ». Entre temps, une petite fille de cinq ans a été assassinée de façon sordide et il n’y a, pour elle, absolument aucune possibilité « d’évolution positive »…

  3. J’ai toujours été pour la peine de mort. Pourquoi garder ces inutiles dangereux et qui coûtent un pognon de dingue.
    Out et vite fait bien fait.

  4. Il est plus que temps de dépoussiérer cette justice en longue robe. Revoir le système de nomination des procureurs des juges…
    Enfin, substituer, le résultat aux moyens, et ne plus se planquer derrière les experts qui n’ont que le nom.

  5. L’incohérence est dans les textes qu’il faudrait complètement repenser. Un mineur de 13 à 16 ans suspecté d’un crime peut être emprisonné temporairement de 6 mois à un an maximum. Il peut aussi être placé en centre éducatif fermé pour les mêmes durées. Comme ces dispositions ne tiennent aucun compte de la durée de l’instruction qui peut largement dépasser un an il s’ensuit qu’un individu dangereux peut être remis en liberté sous contrôle judiciaire « renforcé » qu’on peut traduire par obligatoirement insuffisant compte tenu de la faiblesse des moyens mis en œuvre pour exercer ledit contrôle. Il suffirait de rédiger les articles autrement : le placement en détention provisoire ou en centre éducatif fermé est effectif jusqu’au rendu du jugement. Cela éviterait la commission d’un nouveau crime ou délit. Concernant les lenteurs des procédures de justice il serait intéressant de comparer les durées d’instruction moyennes dans les pays voisins pour des affaires similaires afin de trouver les leviers qui permettraient de raccourcir l’instruction des dossiers à moyens constants et à moyens améliorés par le recrutement de greffiers..

  6. Aux Etats-Unis ils sont souvent excessifs mais au moins un violeur ou un mec qui roule avec 2 grammes et qui tue quelqu’un reste en prison vraiment très très longtemps. Ils cumulent eux et en plus je pense qu’ils ignorent notre généreux système de remise de peines. Avec notre super garde des sceaux ce n’est pas demain qu’on fera ses 20 ans ah non si le pourri est gentil en prison il en fait moins de la moitié.. manque de places sans doute ! Ca fait des années qu’on nous promène avec ce prétexte. Qui fera bouger ça ?

  7. « La justice sans la force est impuissante. La force sans la justice est tyrannique. La justice sans force est contredite. La force sans la justice est accusée. Il faut donc mettre ensemble la justice et la force, et pour cela, faire que ce qui est juste soit fort et que ce qui est fort soit juste » Pascal
    Force est de constater que dans ce pays aujourd’hui, il n’y plus ni justice ni force !

  8. Les responsables de la liberté de cet individu que risquent ils ?? Rien :: Et c’est cela le problème !! Quand les juges seront ils choisis par le peuple ???

  9. Pourquoi les media ne nous décrivent pas un peu plus les parents de l’ado. J’aimerai comprendre l’éducation qu’il a reçu. A 15ans, on est encore sous la coupe de ses parents (et même plus pour les « Tanguys »). Ce n’est pas à la justice de « réparer » les manques d’éducation.
    Au fait, cet ado avait-il « bénéficié » des cours d’éducation sexuelle au collège chers à Pape n’daye ?

  10. Le jour où le rejeton d’un « juge » connaitra le sort de la petite Rose, peut-être que la situation changera. Peut-être …

  11. Les politiques et le juges s’abritent derrière une législation inadaptée qu’ils ont eux mêmes conçue.
    quand un travail est mal fait, son concepteur est mis en cause. Pourquoi pas ici?

  12. Ce n’est pas la réforme des retraites qu’il fallait mais celle de la justice et des lois qui ne correspondent plus à l’époque actuelle. Une victime de plus dûe à l’application de lois favorables aux auteurs, les victimes restant les sacrifiées.

  13. Oui, il serait temps que les décideurs dans ces domaines prennent leurs responsabilités.
    Se retrancher derrière des textes éculés est anormal et justement ce sont (ou devraient être) des professionnels là pour les estimer , sinon on peut les remplacer par des machines.
    Et dire qu’on puni un conducteur pour un excès de vitesse et pas ces tueurs par personne interposés.

  14. Les juges ? Bien-sûr, responsables. Les politiciens ? Évidemment, responsables ! Mais au bout du bout, les vrais, seuls et uniques, premiers et derniers responsables : les électeurs !

  15. Tout va bien, nous sommes donc statistiquement tranquilles pour quelques mois. Ne comptez surtout pas sur ces apparatchiks pour remettre en cause quoi que ce soit. Il est à craindre que la justice descende dans la rue.

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