« Mon ministère sera celui de l’antiracisme » : mais à qui Dupond-Moretti refile-t-il la Justice, du coup ?
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Il paraît que notre nouveau garde des Sceaux est un orateur redoutable. On s’attendait donc à un discours d’investiture époustouflant, on pensait boire ses paroles. En fait de château d'yquem, on a eu de la piquette politiquement correcte pour midinette. Un morceau de bravoure éculé et surjoué auquel ne manquaient que les violons du Docteur Jivago. Sans doute un oubli des ingénieurs du son.
La vacuité convenue des phrases fortes retenues par la presse est d’ailleurs cruelle : « Je veux garder le meilleur et changer le pire » (Le Parisien). Sûr, c’est mieux que le contraire. Il décrit « le chagrin des victimes dévastées, le désespoir d’hommes injustement condamnés ». C’est vrai que c’est mal. Un peu comme la guerre et le cancer. Quand j’étais en 5e B, une fille était venue lire sur l’estrade sa rédac sur le thème « Quand je serai grande, je serai… » Elle voulait devenir avocat, et il y avait cette idée déjà. C’est beau d'avoir un cœur d’enfant, mais si, de son corps de métier, Dupond-Moretti est vraiment comme on le dit le plus éloquent, je ne veux vexer personne, mais c’est un poil décevant.
« Mon ministère sera celui de l’antiracisme » (L’Obs). Bien. Mais à qui refile-t-il celui de la Justice, du coup ?
Et puis Gala a relevé une « forte émotion » quand « Éric Dupond-Moretti craque en évoquant sa mère » : « [il] pense en particulier à [s]a mère qui a quitté son pays d’origine pour fuir la misère », faisant de lui « un garde des Sceaux de sang mêlé ». À l’écouter, on le croirait à demi-rwandais. Pour Gala et Voici, ça peut à la rigueur passer, mais tu n’as pas un peu forcé le trait, mon chéri ? Car Moretti, c’est évidemment italien, et si j’étais désagréable, je dirais que ces gens-là, jadis, avec de grands airs de supériorité, nous ont méchamment colonisés. À ce train-là, on peut aussi parler du métissage des rois de France depuis Catherine de Médicis, mais tout le monde risque de rigoler.
Et dommage - encore un trait de gamin ? -, ça sent le copiage. Gérald Darmanin a déjà déployé la martingale du fils d’immigré, avec des arguments autrement plus exotiques.
Ayons une pensée pour Jean-Pierre Dupond, ouvrier métallurgiste du Nord, mort prématurément, qui n’a pas été cité par son fils, lequel d’ailleurs, en visionnaire, a très vite jugé son modeste patronyme point trop porteur puisqu’il a jugé bon d’y accoler celui de sa mère. Hier, pour faire chic, on se rajoutait une particule ; aujourd’hui, c’est une consonance étrangère. O tempora, O mores, il fut un temps où, pour accéder à de hautes fonctions, il fallait justifier de quartiers de noblesse ; ce sont, aujourd’hui, d’autres origines que l’on met en avant, tel un bourgeois gentilhomme de la diversité, en les gonflant ridiculement. Un rôle taillé, d’ailleurs, pour la corpulence et la prestance de Dupond-Moretti qui, paraît-il, se pique de théâtre. Las, c’est une autre comédie française que nous joue le garde des Sceaux - adoubé par un Premier ministre que l’on nous jure « de droite » - dont nous sommes les dindons : de la proposition forte qu’il avait faite en 2018 de dissoudre l’École nationale de la magistrature, on ne trouve, par exemple, nulle trace dans son laïus.
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