Montebourg 2022 ?
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Beaucoup ont oublié cet historique du Parti socialiste, ancien candidat à la primaire de la gauche et ex-ministre du Redressement productif de François Hollande. Pourtant se joue, dans les salles de rédaction et dans les coulisses politiques, l’esquisse d’une partition qui, si elle est bien jouée, pourrait donner le la de la campagne de 2022.
L'élection présidentielle est dans deux ans, autant dire demain. Si l’épidémie de Covid-19 a renvoyé les élections municipales au temps de l’Apocalypse, les pièces non soumises aux aléas du réel se mettent en place. Et les abeilles bourdonnent le nom d’Arnaud Montebourg. Elles bourdonnent d’autant plus que le sémillant quinquagénaire a transformé les insectes préférés des Français en ambassadrices de son nom. Libé, le Figaro, Ouest-France… Exit le Montebourg d’appareil, exit l’éléphanteau d’un PS condamné aux oubliettes politiques, le Montebourg nouveau sent bon le terroir et le made in France, il ose parler souverainisme quand, au Château, on peine à se défaire du carcan de la mondialisation. « Macron est-il le mieux placé pour parler de patriotisme économique ? » demande-t-il à raison à Libération.
Il était parti en lâchant d’ultimes salves contre la technocratie européenne et a fait en sorte qu’on s’en souvienne. Son départ du ministère remonte à 2014, après un come-back en forme de carte postale, en 2017, qui le vit arriver troisième derrière Benoît Hamon et Manuel Valls, comme pour prendre acte du décès du PS, il s’en est retourné à ses hobbies. Et ce fut l'entrepreneuriat. Mieux : un entrepreneuriat français, divin, un entrepreneuriat souverainiste. Les abeilles connaissent les frontières, elles. Et elles sont en danger de mort en raison, notamment, des pesticides et toutes ces joyeuses normes sanitaires européennes.
Arnaud Montebourg a conscience qu’il est ce trait d’union entre les bobos et la paysannerie. Il sait que, face au mondialisme périmé qu’incarne Macron, il peut incarner le joker du souverainiste non réac, du patriote ouvert. Pétri dans le système qui a vu émerger Emmanuel Macron, il a de quoi rassurer les décideurs. Il n’est ni Beppe Grillo, ni Marine Le Pen. Pourtant, il a les clés en main pour assécher les uns et les autres. Il a même reçu l’adoubement (momentané) de Jean-Luc Mélenchon.
À vrai dire, Montebourg a tout pour devenir le Macron d’un souverainisme fréquentable et bon ton. Et le pire, c’est que ça pourrait marcher. Les LR n’ont pas les moyens d’inventer un candidat apte à faire « penser printemps » à qui que ce soit, le RN ne paraît pas, pour l’instant, capable de demeurer autre chose que le fossoyeur du second tour et Mélenchon n’est plus si jeune. On jouerait donc au second tour la marinière contre Marine.
Seule demeurerait une alternative : un candidat rassemblant LR, UDI et LREM, en admettant qu’il ne sorte pas trop écorné de la gestion de l’épidémie et que Matignon ne l’aspire pas dans le même trou noir que Lionel Jospin. Édouard Philippe, en somme.
Arnaud Montebourg aurait donc deux ans. Deux ans, c’est demain, mais c’est très long, en politique. Macron a bien réussi à être élu en dix mois. Mais la stratégie de guérilla de Montebourg semble la bonne pour tenir la distance.
À moins que les électeurs ne s’amusent à gratter le vernis. À moins qu’à l’image d’un Sarkozy écrasant sous ses talonnettes l’espoir d’une vraie droite, Emmanuel Macron ait définitivement enterré sous son mandat les illusions d’un homme incarnant le changement. Et si la mode d’imiter sans talent le général de Gaulle était définitivement passée ?
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