Motion de censure contre Attal : LR va-t-il faire tomber le gouvernement sur le déficit ?

ATTAL

Cette semaine, les éditoriaux ne bruissaient que de ça : les députés LR vont-ils déposer une motion de censure contre le gouvernement Attal ? Et si oui, quand ? Printemps post-européennes ou automne budgétaire ?

Car s'il est un point sur lequel tout le monde s'accorde, à la fois au sein de LR et des oppositions, c'est le sujet : le dérapage budgétaire historique, selon les mots du président de la Cour des comptes lui-même, avec un déficit public de 5,5 % du PIB, au lieu des 4,9 % prévus. Un sujet qui pourrait paraître technique mais qui commence à prendre une réelle épaisseur politique. D'abord, il y a le soupçon d'« insincérité » (Éric Ciotti) du gouvernement dans ses prévisions, cet automne. Ensuite, bien sûr, celui d'incompétence, et dans un domaine où MM. Le Maire et Macron se targuent d'être les meilleurs. Enfin, Gabriel Attal est aussi concerné directement, en tant que ministre des Comptes publics jusqu'en juillet 2023. D'où cette première initiative parlementaire lancée par le chef des députés LR Olivier Marleix : une commission d’enquête parlementaire sur les raisons de la « très forte croissance de la dette sous la présidence d’Emmanuel Macron ». D'après Libération, le groupe LR « espère un lancement des travaux fin avril, pile au moment des notations des agences sur la dette tricolore. Et compte bien, parmi les futurs auditionnés, cuisiner tout particulièrement Gabriel Attal. »

Mais voilà, les LR s'en tiendront-ils là ou iront-ils jusqu'au dépôt d'une motion de censure ? De fait, ils seraient prêts à passer à l'acte. D'après Le Monde, « le sujet est assez abouti pour avoir été évoqué lors de la réunion de groupe [...] mardi 2 avril »« Préparez-vous ! », leur auraient même lancé Éric Ciotti, le président du parti, et Olivier Marleix, celui du groupe parlementaire. Ce serait, pour eux, l'occasion de retrouver une forme d'unité et de cohérence, en interne comme vis-à-vis de la majorité et des oppositions. Le sujet est fédérateur en leur sein et les distingue des oppositions LFI et RN, jugées peu crédibles sur la question des dépenses publiques. Ce serait, aussi, une façon de sortir par le haut de leurs compromissions avec la Macronie sur les retraites ou la loi Immigration et de s'ériger enfin en réelle force d'opposition. Mais, premier écueil, une motion de censure requiert 58 signatures. Or, selon Le Monde, il y aurait « plusieurs réfractaires parmi les 61 députés du groupe ». On voit que l'affaire est loin d'être gagnée, et dès les préliminaires... Si elle calait avant même de démarrer, la machine, loin de faire tomber le gouvernement, serait un nouveau signe de la chute de la maison LR elle-même.

C'est un peu la vision de Libé, qui voit dans l'aventure de la motion de censure LR « la promesse d’un désastre de plus », même si elle était votée, avec l'appui des groupes RN, LIOT et NUPES, qui y sont disposés. LR aurait tout à perdre d'une reconduction d'Attal à Matignon, comme Pompidou en 1962, lors de la seule motion de censure ayant fait tomber un gouvernement de toute la Ve République. Si Maxime Tandonnet, dans le JDD, reconnaît que la censure de 1962 s'était retournée contre ses promoteurs, il souligne que la situation est « sensiblement différente » : « Le général de Gaulle, qui venait de sortir la France du bourbier algérien, était immensément populaire, avec des taux de confiance qui atteignaient les 80 % dans le pays. Il venait d’ailleurs de remporter son référendum sur l’élection au suffrage universel du chef de l’État avec plus de 60 % de "oui". » N'est pas de Gaulle qui veut.

Deux facteurs de fond devraient pousser les députés LR à passer à l'acte. D'abord, l'impopularité croissante du couple exécutif. L'effet Attal est moribond : selon le dernier baromètre réalisé du mardi 2 au vendredi 5 avril par YouGov pour Le HuffPost, Emmanuel Macron et Gabriel perdent tous les deux deux points. Macron n'est plus qu'à 25 % et Attal a perdu 6 points en trois mois. Surtout, le déficit et la dette publique deviennent de vrais sujets d'inquiétude pour les Français. D'après un sondage Elabe pour Les Échos, 80 % sont inquiets du niveau de la dette publique, soit 9 points de plus qu'il y a un an. Même les classes moyennes (+23 %) et les classes populaires (+14 %) y sont désormais particulièrement sensibles !

80 % : c'est aussi la part des Français opposés à l'immigration (sondage CSA pour CNews). Avec de tels chiffres, il y a, pour la droite LR comme RN, largement de quoi censurer le gouvernement et bâtir un programme clair pour gagner les élections. D'ailleurs, ce dimanche, le député RN Jean-Philippe Tanguy vient de déclarer que son groupe voterait « évidemment » cette motion de censure.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

77 commentaires

  1. Avec LR tout est paroles et paroles comme chantait Dalida , cette fois ci encore la règle sera respectée .

  2. Quelle confiance peut-on encore accorder à cette formation qui a tout trahi, tout renié ? Ils se disent parti de gouvernement… Ils ont gouvernés et sont coresponsables de la tragique situation dans laquelle se trouve ce pays… Pour moi, personnellement, c’est un parti fini…

  3. L’avenir de la voiture LR est tout tracé : Dès le dépôt de la motion de censure, une de ses roues, sinon deux, vont faire la malle. Comme le scorpion de la fable qui ne peut s’empêcher de piquer, même au prix de sa vie, le LR ne peut échapper à la trahison dont il est pétri.

  4. Trop de « politique » et « calculs  » pour ce faire… LR en sortirais grandis ( puisqu’à son/ leur initiative ). D’autres partis seraient renforcés ( RN et un petit peu LR ) d’autres amoindris etc Ce pourrait être possible, mais à mon sens « trop de politicaille » ( calculs en tous genre ) !

  5. LR doit penser que quelques places peuvent encore leur être octroyées en macronie. Ils feignent de mettre la pression dans ce but. On les a déjà vus à l’oeuvre. Pffft ! C’est au pied du mur qu’on voit le maçon !

  6. Un politicien bourgeois LR en 2024 peut être défini comme quelqu’un qui s’est engagé à une vie plus confortable et mieux organisée que la plupart des autres. Cela signifie avoir un bon revenu, un logement de qualité, des économies solides pour garantir une sécurité financière. Il/elle peut profiter d’avantages fiscaux spécifiques disponibles pour les riches et se considère généralement comme socialement supérieur par rapport aux autres classes.
    Alors ? Eh bien le LR défendra ses intérêts bien avant ceux du peuple. CQFD.

  7. Si ce n’est toi c’est donc ton frère !! Qui sont ces 3 réfractaires à la motion de censure ? Certainement trois futurs ministrables dans le gouvernement de liquidation « faillitaire » de la France.

  8. S’ils ont brandi la menace ils se sont contraints à la déposer. Ne pas le faire et Bellamy aura beau s’agiter, ils seront plus morts que (déjà) morts.

  9. C’est une partie d’échecs que LR engage pour sortir la Macronie du bourbier ils veulent torpiller de l’intérieur mais avec quelles convictions car la dissolution est l’affaire du président . LR et RN ont mangé leur chapeau dernièrement est seraient bien avisés d’assurer leurs arrières

  10. LR …c’est somme toute l’histoire d’une association politique qui feint d’été gaulliste et patriote , qui s’agite dans l’opposition, qui jure qu’elle fera ce qu’elle n’a jamais fait lorsqu’elle est au Pouvoir durant de longues années , et qui a la fin vote macron

  11. Mais le rétro-pédalage n’a t’il pas commencé ? Les LR qui ont toujours été inhibés par la doxa socialiste sont trop couards pour cela ! Je n’y crois pas une seconde.

  12. A part obtenir de très nombreux avantages, rien d’autre à attendre des LR, comme d’habitude, des mots seulement.

  13. Mais les LR, et Ciotti en particulier, ne sont plus crédibles. Non homogènes et comportant dans leur groupe des sous-marins affiliés ailleurs, ils ne savent plus qu’entretenir leur décrépitude car ils savent bien qu’en cas de succès de cette éventuelle motion, c’en est fini de beaucoup d’entre eux.

  14. Si l’on souhaite juguler la dette, il faut commencer par enfermer Macron. Depuis la Covid, il distribue sans compter, sans aucune opposition. Il faut donc l’extraire du système.

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