Nancy : une mère ayant tué ses deux enfants traitée comme une… victime

Capture écran Figaro TV
Capture écran Figaro TV

La cour d’assises de Nancy juge, ces jours-ci, une mère pour double infanticide. Au-delà de l’horreur du drame, un fait peut retenir l’attention : le tribunal traite l’accusée comme une victime.

Remontant à presque trois ans, les faits sont particulièrement éprouvants : un couple d’universitaires vivait une grave crise conjugale sur fond d’alcoolisme et de jalousie. Par ailleurs décrite comme une mère « parfaite », l’accusée a étouffé ses enfants (âgés de 2 ans et de 8 mois) pour se venger de son compagnon qui lui avait annoncé son intention de la quitter.

Lors de l’ouverture du procès, la mère a eu plusieurs crises de larmes et a expliqué vouloir mourir. Un état psychologique que l’on peut aisément comprendre. Mais la presse a également relevé un élément qui a surpris. Les journalistes ont remarqué la présence d'un chien d’assistance judiciaire aux pieds de l’accusée.

Salle d’audience autorisée aux chiens ?

En effet, c’est une nouveauté datant de l’ère Dupond-Moretti. Depuis quelques années, les victimes peuvent demander la présence d’un « chien d’assistance judiciaire » durant le procès. Ce qui peut sembler surprenant au premier abord a cependant des effets psychologiques positifs avérés pour les victimes.

Mais, comme le mentionne spécifiquement la convention entre le ministère et l’association Handi’Chiens, la SPA et France Victimes, ce chien est formé pour « accompagner et soutenir moralement les victimes d’infractions pénales ». Ce chien n’est donc nullement prévu pour les accusés, comme c’est le cas dans l’affaire de Nancy…

Un dangereux précédent

En l’occurrence, dans le procès de Nancy, c’est donc la cour d’assises qui a souverainement accepté de fournir un chien d’assistance judiciaire à l’accusée. Ce faisant, la cour d’assises est allée dans le sens de la défense de la mère infanticide : elle serait bien victime de toute la situation.

Si l’on peut imaginer que l’état psychologique apparent de l’accusée a motivé cette décision, il faut en pointer du doigt les dangers. Cette affaire crée en effet un précédent dangereux : tous les criminels dont l’état psychologique est chancelant pourront se croire légitimes à demander un chien d’assistance judiciaire, renforçant cette stratégie de la défense classique qu’est la victimisation.

Le tout, pris en charge par vos impôts. En effet, comme le stipule la convention déjà citée, le financement de la formation et de la présence du chien est pris en charge par l’administration. On peut le comprendre pour les victimes, moins pour les accusés.

Garder les idées claires

Bien sûr, ce genre d’affaire très personnelle, très intime, très difficile appelle des explications et une défense de l’accusée. Bien sûr, on peut avoir de l’empathie pour la douleur de la mère qui a, malgré tout, perdu ses enfants. Mais ces nuances ne doivent pas ajouter à ce grand mouvement de confusion de la culpabilité qui abîme la Justice depuis quarante ans. Les accusés ont vécu sans chien d’assistance judicaire pendant des siècles, et ni un chien ni quoi que ce soit ne rendront ce procès facile à suivre pour les victimes, pour l’accusée ou même pour le public. Pour fonctionner (à nouveau), la Justice a besoin de principes clairs : le coupable est celui qui a violé la loi. La victime est celui (ou sa famille) qui en a subi les répercussions négatives.

Ce qui s’est passé est dramatique et surtout très grave. Il s’agit d’un double meurtre sur des mineurs extrêmement vulnérables et par la personne qui en est la plus responsable. La mémoire des victimes exige de ne pas relativiser la gravité d’un meurtre sur mineur de moins de 15 ans, ce qui est d’ailleurs considéré comme un des crimes les plus graves par le Code pénal. Le procès se termine vendredi et il paraît plutôt illusoire de retirer le chien du box de l’accusée, désormais. Mais le ministère de la Justice gagnerait à clarifier son usage pour le futur…

Picture of Pierre-Marie Sève
Pierre-Marie Sève
Directeur de l'Institut pour la Justice

Vos commentaires

35 commentaires

  1. Elle veut mourir… mais est toujours là 3 ans après. Quand on connaît l’influence néfaste des juges sur les jurés d’assise, on appréhende le verdict à venir puisque le président semble avoir déjà choisi.
    Comme vous le rappelez dans l’article, il serait grand temps que la justice se rappelle à ce pourquoi elle existe : la défense des victimes

  2. Logiquement c’est le père des enfants assassinés par leur mère qui aurait le plus besoin de soutien. Néanmoins, s’il est alcoolique ou malfaisant lui-même, le soutien d’un chien est inadéquat. Il produit de mauvaises ondes et le chien doit être mis à l’abri de ces influences néfastes. Je plaisante à peine…

  3. Elle tue ses enfants par vengeance, donc bien consciente de ses actes ! Les victimes sont d’abord les enfants et elle mérite condamnation : la prison ! Elle a expliqué vouloir mourir (sic) mais elle n’a pas eu ce courage, ne renversons donc pas les rôles !

  4. Quelle qu’en soit la raison un infanticide est un crime abominable car il s’attaque à des personnes sans défense. Aucune compassion pour ces criminels.

  5. Le chien risque d’aller en prison si l’accusée est reconnue coupable : sa place est-elle prévue ? Que fait la SPA ?

  6. Si l’on doit augmenter le budget de la santé en France , un effort particulier devra être fait en faveur de la psychiatrie qu’il convient de développer : étudiants en médecine , optez pour la psychiatrie

  7. Il est de plus en plus en plus clair dans ce pays que ce sont les coupables que l’on protège et non les victimes . Il serait plus que temps d’inverser les roles et de redonner le vrai sens au mot « justice  » .

  8. Cette affaire vient démontrer l’inversion des valeurs que subit notre pays. Tout cela semble s’inscrire dans un schéma visant à annihiler toute pensée logique. Et après, on vient s’étonner que la France soit la championne en prise d’anxiolytiques.

  9. Est-ce qu’il ne serait pas temps de démanteler les structures judiciaires, et les remplacer par de l’I.A. Je ne me pose plus la question mais propose un changement qui, ma foi, serait très certainement moins dangereux que le reflexion des magistrats.

  10. Je suis stupéfait . Quand j’ai lu la partie sur le « chien psy » , je me suis demandé si on était pas le premier avril, ou si BVoltaire, ne tournait pas au Gorafi.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

ZFE : quand les écolos font la guerre aux pauvres

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois