Napoléon interdit dans une école de commerce ?

Napoléon

Il y a quelques mois, l’association des étudiants de la prestigieuse école de commerce Audencia a eu l’excellente idée d’inviter Thierry Lentz, directeur de la fondation Napoléon, pour une conférence. Cet échange avait pour objectif de faire (re)découvrir un pan de l’Histoire de France aux élèves. Au-delà de la culture générale, Napoléon détient une place particulière dans l’histoire de notre nation et l’on peut se réjouir que les jeunes générations souhaitent se saisir de ce sujet.

C’était sans compter sur la direction de l’école.

Cette semaine, Thierry Lentz annonça, sur sa page Facebook, que la conférence avait été annulée en raison d’une décision de la direction de ne pas valoriser l’héritage napoléonien en cette période.

Quelles sont les raisons valables pour décommander cet éminent historien ? Pourquoi cette période pose-t-elle problème ? La censure déjà prédominante sur les campus américains doit-elle devenir la norme ici, en France ?

L’américanisation des études supérieures françaises est en marche.

L’héritage napoléonien demeure, deux siècles plus tard, toujours prépondérant dans la vie de nos compatriotes : instauration du Code civil (1804), réforme du mariage, création du baccalauréat (1808) et de la Légion d’honneur (1802)… Pas de quoi rougir face aux censeurs en mal de sensation.

Sauf qu’il y a quelques jours, des militants extrémistes, aux Antilles, ont saccagé des statues de Victor Schœlcher (instigateur, en 1848, de l’abolition de l’esclavage en France) et les tensions raciales s’exacerbent partout dans le monde à la suite de la mort de George Floyd. Quel est le lien ? Napoléon, par la loi du 30 floréal an X (20 mai 1802), rétablit l’esclavage dans les colonies françaises, les militants néo-décolonialistes – en mal de projets farfelus – tentent d’imposer une censure totalitaire si les protagonistes de l’Histoire ne satisfont pas à leur idéologie.

Cette annulation est à mettre dans la droite ligne des différentes tentatives d’intimidation qui pose le problème de la liberté d’expression : blocage de la représentation des Suppliantes d’Eschyle à la Sorbonne, tentative d’annulation de l’exposition sur Toutankhamon par des associations antiracistes au prétexte que les égyptologues cacheraient que ce pharaon était noir...

La dérive est dangereuse et surtout mortifère.

Devant l’indignation de cette annulation, Audencia a publié un communiqué affirmant que la manifestation serait reportée en raison des conditions sanitaires. Espérons que le directeur général de l’école, Christophe Germain, s’assurera du bon déroulement de cette conférence car, comme l’affirme Michel Quint, « le manichéisme en histoire est une sottise ».

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 09/06/2020 à 17:56.
Nicolas Brabis
Nicolas Brabis
Professeur d'histoire

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