Narcotrafic : les mesures chocs que ces deux sénateurs proposent à Retailleau

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Ce week-end de la Toussaint 2024 restera-t-il comme celui de la prise de conscience, du « point de bascule », selon les mots du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, venu à Rennes constater les dégâts et le désarroi de quartiers contrôlés par les narcotrafiquants ? Les jours qui s'achèvent ont en effet été marqués par des fusillades, d'ordinaire constatées à Marseille ou Grenoble, dans « des villes de l'Ouest » réputées tranquilles comme Rennes ou Poitiers. Et des « faits divers» liés au narcotrafic se sont aussi multipliés à Clermont-Ferrand et à Sète. Bruno Retailleau s'est montré martial dans le discours, tout comme son ministre délégué Nicolas Daragon à l'Assemblée, sur l'immigration, qui comporte aussi un volet lié au narcotrafic. Des mots forts, donc, mais les actes ?

Un rapport sénatorial qui dit tout

Si ces ministres en charge de la sécurité des Français veulent réellement agir, ils ont à leur disposition un rapport parlementaire tout chaud issu de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier, créée à l’initiative du groupe Les Républicains, et qui s’est réunie à partir du 21 novembre 2023, rapport rédigé par Jérôme Durain (PS) et Étienne Blanc (LR) et consultable sur le site du Sénat, tout comme les différentes auditions. Samuel Martin avait fait ici même un état des lieux terrifiant des premiers constats, il y a un an.

Darmanin : un bilan négatif

La commission, qui avait auditionné le précédent ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, avait étrillé son action et ses opérations Place nette au « bilan décevant » et qui s’apparentent à « vider l’océan à la petite cuillère », tout comme « l’abandon » des territoires d’outre-mer où transite la drogue en provenance du continent américain. La commission avait aussi fait le constat que l'Union européenne, envahissante dans certains domaines, était, là, étrangement inopérante : « On s’est parfois demandé si l’Europe avait un numéro de téléphone », écrivent les rapporteurs.

Trois grandes préconisations

Les auteurs du rapport présentaient trois grands axes de lutte pour gagner la guerre contre le narcotrafic.

D'abord un changement copernicien dans l'appréhension du phénomène : « Faire preuve de lucidité sur la nature du narcotrafic et le traiter pour ce qu’il est : une menace pour les intérêts fondamentaux de la nation » avec, en ligne de mire, la perspective inquiétante de voir la France, ou tout au moins certains pans de son administration, devenir un narco-État.

Concrètement, il s'agirait de renforcer le renseignement et de « se donner les moyens de la sécurité dans les outre-mer, aujourd’hui sacrifiés, et dans les infrastructures portuaires et aéroportuaires ». Et, bien sûr, d'« endiguer la corruption liée au narcotrafic ».

Ensuite, faire de l'anti-Darmanin et « frapper le "haut du spectre" et ne pas limiter la lutte à des opérations d’ordre public de type "place nette" » mais, entre autres mesures, « taper les trafiquants au portefeuille en systématisant les enquêtes patrimoniales, en instaurant un gel judiciaire de leurs avoirs et en créant une confiscation sans condamnation pénale ». Avec, aussi, un recours « plus fréquent » à la présomption de blanchiment et la création d’une procédure d’injonction pour richesse inexpliquée - une « enquête de patrimoine ». « Si une personne qui a un appartement, une grosse voiture ou des titres en Bourse ne peut pas démontrer qu’il les a acquis légalement, alors son patrimoine est confisqué », comme l'expliquait, sur France Info, le sénateur Étienne Blanc, ce samedi 2 novembre.

Un parquet national antistupéfiants

Enfin, les sénateurs proposaient de « structurer l’action des services en charge de la lutte contre le narcotrafic » en faisant de « l’Office antistupéfiants une véritable "DEA à la française" en lui donnant une pleine autorité sur les services de terrain chargés de la lutte contre le narcotrafic (police, gendarmerie et douane) » et en créant « un parquet national antistupéfiants pour spécialiser et incarner la lutte contre le narcotrafic dans la sphère judiciaire ».

Un projet qui trouverait une majorité

Le constat est clair, il est partagé par des sénateurs de gauche comme de droite ; l'opinion est également en train d'ouvrir les yeux et les mesures sont sur la table. Nul doute qu'une majorité se dégagerait aussi à l'Assemblée nationale, où le RN soutiendrait une loi de fermeté. Et les groupes qui hésiteraient seraient montrés du doigt. Il n'y a plus qu'à... Question de volonté et de courage.

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Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

Vos commentaires

68 commentaires

  1. On peut constater qu’avec sept ans au pouvoir la macronie est restée totalement inefficace et inopérante sur ce problème. On est donc en droit de se demander, si ces proposition sénatoriales passaient victorieusement i’AN, ce qu’il en adviendrait. Ensuite, l’application de ce texte ne serait sans doute pas du goût de tout le monde. Entre des fonctionnaires corrompus et des juges rouges cette initiative aurait toutes ses chances d’être mal appliquée, ou pire, de ne pas l’être.

  2. Je crois qu’aucune autorité ne peut combattre ce fléau, on va vers le narco état. Comment cela finira t’il ? Des morts de tous les côtés, la moitié de la population décimée?

    • Les têtes se trouveraient au Quatar et à Dubaï nous dit on. Qu’attend la France pour envoyer le 13 ème dragon leur régler leur compte ?

      • Pour avoir vécu au émirats arabes unis ; j’ai jamais vu de dealers aux sorties des écoles.
        La peine de mort ou 20 ans ferme avec une expulsion pour les étrangers.
        Est dissuasif

  3. « Question de volonté et de courage », c’est bien le problème depuis au moins 40 ans !
    Les solutions existent pour limiter grandement le trafic mais il prend de l’ampleur faute d’inaction.
    Le moulin à vent Darmanin n’a rien changé, sauf à exposer les policiers pour zéro résultat.
    Seules des actions concrètes, y compris en rétablissant de vraies sanctions envers les consommateurs, pourront y changer quelques choses.

  4. Je répète pour la 50me fois que le seul moyen d’endiguer le phénomène est d’attaquer les CONSOMMATEURS. Tant qu’il y aura de la demande (de gens qui ont des sous), il y aura du trafic. Il n’y a donc que 2 solutions : ou on légalise pour créer une concurrence aux trafiquants ou on poursuit les consommateurs (quels qu’ils soient, et qu’on ne me dise pas qu’on ne les connait pas)

  5. Réforme profonde du code pénal avec suppression des juges d’application des peines, du sursis et des peines de prison à vie avec travaux forcés pour dissuader la délinquance criminelle liée au trafic de drogue qui tue pluriquotidiennement ce qui épargnera les consommateurs et les trafiquants qui ne seront plus victimes mais devront gagner leur vie honnêtement … Ainsi tout le monde y gagnera et la délinquance s’effondrera.
    Ce système a été testé avec succès outre Atlantique avec des prisons qui se vident dans les états qui ont choisi cette voie.

  6. Bonjour, je réitère l’esprit de mon commentaire sur un précédent article, commentaire qui n’est pas passé, je me demande pourquoi…
    Donc, il faut penser à l’autre bout de la lorgnette et attirer l’attention des « consommateurs » sur les dangers d’absorber ces produits: Reportages TV objectifs, articles de fond dans la presse écrite, etc…
    Sauf erreur ou omission de ma part, on trouve très rarement ce genre d’études dans les médias.
    Les interventions d’un sociologue compétent et indépendant seraient les bienvenues.

  7. Il n’y a pas 36 solutions:
    Prison à vie au 3eme délit comme dans 3 états américains.
    Résultat sur un an:
    Chute de 95% de la délinquance
    Les prisons sont vides
    Les condamnés à 2 délits tremblent …
    La peur a changé de camp!

  8. Créer « un parquet national anti-stupéfiants pour spécialiser et incarner la lutte contre le narcotrafic dans la sphère judiciaire « . À condition de ne pas employer des juges islamo-gauchistes…

  9. Quand j’étais militaire je combattait ce phénomène en vogue de la consommation de cannabis. Souvent je me voyais stigmatisé par mes camarades au nom de  »tu as toutes les pourritures du régiment dans ta section » au prétexte qu’eux n’avait pas ce probleme . Une opération chiens renifleur des douanes et de la police, déclenchée par mon chef de corps sur proposition de votre serviteur et de son capitaine avait alors démontré que le mal gangrenait l’ensemble du régiment. Fermez les yeux braves gens . Si on faisait un tour dans les collèges et les lycées, les entreprises, les starts UP si chères à notre président on y trouverait le même problème multiplié pas 100 depuis 1986.

    • Hélas ! Et vous oubliez de mentionner certains (hauts) lieux de pouvoir. Dont les toutous ne savent pas renifler …

  10. Ayant vu sous mes yeux a montreuil , 93 , des jeunes gens de 23 ans tout au plus se pavaner bruyament en Porsche Cayenne ( vehicule vendu autour de 100k€) je conçois tout a fait que des enquetes de patrimoine sur le terrain puissent etre efficaces pour demanteler et dissuader .mais la vraie et unique question est : la haute bourgeoisie possedante qui controle la France n y trouve aucun interet car les revenus de la drogue permettent a des milliers de familles de mafieux etrangers de vivre grassement , et donc , permet a ces memes possedants de canaliser les banlieues a peu de frais .

    • la haute bourgeoisie possédante : Vous parlez des bobos ? des petits marcheurs ? du grand marcheur ? de la gauche pétard et caviar ? de la gauche organisatrice des salles de shoot ? de certains députés ancien dealers ? Quant à la « canalisation des banlieues » le résultat est….. stupéfiant. Le canal a manifestement débordé.

  11. Donc les senateurs proposent d’appliquer les lois ?… trop forts ces gens là au prix où nous les payons…!

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