Netflix raconte la vie trépidante de Tapie, un vrai biopic à l’américaine

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Quand il est décédé, en octobre 2021, des suites d’un cancer généralisé, les hommages à Bernard Tapie n’ont pas manqué. De gauche comme de droite, les politiques, dans leur ensemble, ont tous tenu à saluer le « personnage », sa « force » et son « courage ». Parmi eux, notamment, Emmanuel Macron, Nicolas Sarkozy, François Hollande, Jean Castex, François Bayrou, Xavier Bertrand, Christophe Castaner, Jack Lang ou encore Christian Estrosi. Des centristes, pour la plupart, qui n’ont jamais fait montre d’un patriotisme exacerbé ni d’un souci démesuré du bien commun… C’est pourquoi, sans doute, il leur seyait si bien de rendre hommage à un homme d’affaires qui revendait ses entreprises en sachant d’avance que celles-ci seraient aussitôt après délocalisées à l’étranger. Et tant pis si les ouvriers concernés, des compatriotes, étaient laissés sur le carreau ; après tout, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs… Dans le même genre, on pense à un autre gouailleur célèbre, Danton, qui aurait lâché, à propos des prisonniers victimes des massacres de septembre 1792 : « Qu’ils deviennent ce qu’ils pourront… »

Aujourd’hui, c’est à Netflix, à l’initiative de Tristan Séguéla et Olivier Demangel, de faire l’éloge de Bernard Tapie, ce golden boy emblématique des années Mitterrand qui virent l’alliance définitive des libertaires soixante-huitards et des libéraux affairistes.

Pas d'affaire Adidas

Véritable biopic à l’américaine en sept épisodes, construit sur le modèle classique de l’ascension et de la chute, Tapie retrace le parcours de ce touche-à-tout du business : monde de l’entreprise, politique, médias… De 1966, avec ses premiers essais dans la chanson, à son incarcération, en 1997, pour l’affaire du match truqué entre l’OM et Valenciennes, l’essentiel de sa carrière est retracé. On nous explique notamment comment, à ses débuts, Bernard Tapie rachetait pour un franc symbolique des entreprises en faillite, rehaussait un peu leur gestion et leur bilan puis les revendait en faisant une plus-value de plusieurs millions sans se soucier des conséquences parfois dramatiques pour les employés. En dépit de la fascination évidente qu’ils éprouvent pour lui, les scénaristes n’ont pas épargné le bonhomme ; mais sur le nombre de casseroles qu’il trimballait, une sélection s’est avérée nécessaire. L’affaire Adidas est ainsi complètement mise sous le boisseau.

Sans trop de difficultés, Laurent Lafitte campe à l’écran un Bernard Tapie grande gueule, bluffeur, faiseur et magouilleur. Seule une pointe d’innocence dans le regard du comédien empêche l’identification totale au personnage. Parfaitement maîtrisée, la mise en scène bénéficie de dialogues aux petits oignons faisant honneur constamment à la verve de Tapie. On se plait à rêver, par moments, de ce qu’aurait donné, il y a quelques années seulement, une interprétation par Didier Bourdon, tant il semblait taillé pour le rôle.

Tapie et les migrants

Netflix oblige – et c’est là que la fiction trahit les faits –, il a bien fallu souscrire au féminisme actuel. Ainsi, Dominique Tapie apparaît comme une inspiratrice et une administratrice indispensable dans les affaires de son époux, ce qu’a récemment démenti l’intéressée au micro d’Europe 1.

Pour notre part, on regrette surtout l’absence d’allusion, en épilogue, au cambriolage dont le couple a été victime, en avril 2021. Lorsque l’ancien ministre, au moment des faits, affirma à l’un de ses agresseurs avoir « toujours défendu les migrants », celui-ci lui répondit, de façon lapidaire : « Va te faire enculer, ce temps-là est mort. » Une telle scène eût été une parfaite conclusion à la séquence de l’affrontement télévisé de 1989 entre Bernard Tapie et Jean-Marie Le Pen, passage durant lequel le golden boy ne manqua pas de se draper de vertu, de rouler des mécaniques et de dispenser des leçons de morale aux électeurs du FN… On voit, maintenant, qui avait eu raison à l’époque.

3 étoiles sur 5

https://www.youtube.com/watch?v=rE_aofISeTw

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 01/10/2023 à 22:42.
Pierre Marcellesi
Pierre Marcellesi
Chroniqueur cinéma à BV, diplômé de l'Ecole supérieure de réalisation audiovisuelle (ESRA) et maîtrise de cinéma à l'Université de Paris Nanterre

Vos commentaires

13 commentaires

  1. « Quand il est décédé en octobre 2021 des suites d’un cancer généralisé, les hommages à Bernard Tapie n’ont pas manqué. » Les traditions sont respectées. Al Capone, mort dans son lit, a eu droit aux mêmes hommages

  2. Tapie le destructeur et escroc. Ce type ne mérite aucun film sur sa vie car combien de personnes en ont fait les frais ?
    Destructeur de l’industrie française, coupable d’avoir contribué au chômage de milliers de personnes dans le seul but de s’enrichir. Un voleur et une grande gueule . Une racaille comme dans le milieu des politiques de nos dernière quarantaine d’années.

  3. Faire un Héros d’un escroc et d’un voyou prouve le niveau moral de notre pays !! Pense t on aux personnes dont il a fichu en l’air leurs vies par ses reprises hasardeuses d’entreprises !!

  4. « Bernard Tapie rachetait pour un franc symbolique des entreprises en faillite (…) puis les revendait en faisant une plus-value de plusieurs millions sans se soucier des conséquences parfois dramatiques pour les employés. » Sur les conseils d’un avocat d’affaire nommé J.L. Borloo…

  5. Waouh ! Que de moraline dans les commentaires…Ce mec (un vrai !) avait tout compris du Système et s’en est servi avec toute son ambition, sa force, et son intelligence, avec quelques infracions bien sûr à la clé…Quant à la série, excellente

  6. Si la France d’aujourd’hui ne trouve que Tapis pour héros, c’est un signe sûr de notre décadence tout aussi véreuse que cet individu.

  7. TAPIE voleur.
    Après papa, le fiston.
    Décidément, les SEGUELA ont une mémoire sélective ! Il n’évoque pas l’affaire ADIDAS; et quid du CREDIT LYONNAIS ? Et s’il évoque le  »rachat » des Sociétés en difficultés pour le franc symbolique, revendues plusieurs millions, je suppose qu’il n’a pas du insister sur les moyens utilisés pour leur  »redressement », basés essentiellement sur d’énormes licenciement qui ont conduit au suicide des dizaines de salariés.
    Ah qu’elle est belle la réussite exemplaire du Roi des Bonimenteurs.
    Décidément, on a les idoles qu’on mérite !
    Aujourd’hui, les prédateurs sont plus discrets, ou sournois (?), mais tout aussi efficaces, ou néfastes (?).

  8. Tapie un sacré personnage, homme d’affaires avec Adidas, Bernard Tapie finance son groupe d’investisseur , président de l’Olympique de Marseille vainqueur de la Ligue des champions en 1993 et immigrationiste Fanatique jusqu’à ce que des migrants l’ont agressé lui et sa femme avant sa disparition en 2021 bref c’est Bernard Tapie !

  9. La liste des « personnalités » qui l’ont encensé est trés intéressante, tous les ennemis du peuple français, en extase devant un gugus qui a été condamné ! C’est dire la référence de tous ces baltringues

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