Nicole Belloubet : un ministre de l’Éducation nationale ne devrait pas dire ça

Nicole Belloubet

Un pas à droite, un pas à gauche, retour au centre et un dernier coup de barre à gauche. Après Jean-Michel Blanquer, Pap Ndiaye, Gabriel Attal et l’éphémère Amélie Oudéa-Castéra, c’est au tour de Nicole Belloubet de faire ses premiers pas rue de Grenelle. Une nomination incohérente - compte tenu du virage à droite impulsé par son prédécesseur et actuel Premier ministre - qui ne manque pas d’interroger. Laïcité, uniforme, autorité… Par ses prises de position passées, Nicole Belloubet semble en effet aux antipodes des dernières réformes mises en place par le gouvernement.

Contre l’uniforme

Dans la cour du 110 rue de Grenelle, en ce 9 février 2024, c’est une Amélie Oudéa-Castéra encore marquée par les polémiques qui auront eu raison de son poste qui cède sa place à une Nicole Belloubet ravie de revenir sur le devant de la scène politique. Dans son court discours de prise de fonction, l’ancien garde des Sceaux (2017-2020) promet de continuer l’œuvre de ses prédécesseurs. « Refondation quotidienne de la République », « autorité », « émancipation par les savoirs »… L’ancien professeur de droit devenu ministre martèle l'un après l’autre les principes qui ont façonné la politique éducative de Gabriel Attal. Se plaçant sous le patronage des révolutionnaires de 1789 - femme de gauche oblige -, Nicole Belloubet promet que son ministère travaillera à « former des citoyens républicains ». Mais comment la croire ?

Il y a neuf ans, alors membre du Conseil constitutionnel, Nicole Belloubet défendait ainsi avec vigueur la réforme du collège impulsée par Najat Vallaud-Belkacem. Une réforme détricotée par les gouvernements successifs depuis 2017… L’année suivante, dans un article au titre volontairement provocateur - Supprimer le ministère de l’Éducation nationale » - exhumé par Marianne, le nouveau ministre ironisait sur les « fariboles sur la restauration de l’autorité ou le port de la blouse ». Soutiendra-t-elle, alors, l’expérimentation sur le port de l’uniforme voulue par son prédécesseur ? Participera-t-elle au rétablissement de l’autorité au sein de l’école ? Difficile d’y croire… À moins qu’elle ne renie ses propres convictions, ce qui, pour un ministre d’Emmanuel Macron, ne serait pas une première. Dans ce même article, publié dans la revue après-demain, Nicole Belloubet appelait également à « sortir du cadre rigide du cours magistral, laisser du temps et de l’autonomie aux jeunes, ménager le droit à l’erreur… » Une litanie de réformes qui rejoint, certes, son engagement en faveur de la politique menée par Vincent Peillon, mais qui apparaît en totale contradiction avec la politique menée jusque-là par Gabriel Attal.

Sur la question de l’autorité, par ailleurs, le bilan de Nicole Belloubet est loin de plaider en sa faveur. Pour rappel, alors garde des Sceaux, sous le premier quinquennat d’Emmanuel Macron, elle engageait une réforme du système des peines judiciaires. C’est à elle que l’on doit, ainsi, l’interdiction des peines de prison de moins d’un mois. Et pour les peines de prison de moins d’un an, le ministre de la Justice appelait les magistrats à les aménager au maximum afin d’éviter aux condamnés de séjourner derrière les barreaux. Cette même volonté de rendre la prison hors la loi la conduira, à l’aube de l’épidémie de Covid, à libérer plus de 6.000 délinquants détenus pour éviter la « propagation du virus ».

Elle n’hésitait pas non plus à s’immiscer dans les affaires en cours d’instruction comme l’affaire Traoré. En 2020 alors que la famille Traoré instrumentalisait la mort de George Floyd aux États-Unis pour médiatiser sa cause, Nicole Belloubet proposait de les rencontrer. Une demande déclinée par les Traoré mais qui en dit long sur sa vision de la séparation des pouvoirs…

Rétablissement d'un délit de blasphème ?

Enfin, sur la question de la laïcité, thème central de l’Éducation nationale, Nicole Belloubet s’est illustrée en 2020 au micro d’Europe 1 à propos de l’affaire Mila, cette jeune fille menacée de mort pour avoir critiqué l’islam. Le garde des Sceaux, s'il condamnait les menaces de mort, déclarait alors que « l’insulte à la religion, c’est évidemment une atteinte à la liberté de conscience, c’est grave ». Une « expression maladroite », dira-t-elle un peu plus tard, mais qui laisse transparaître une certaine ambiguïté sur les questions de religion.

Nicole Belloubet, au-delà d’être un choix incohérent, apparaît donc comme un signal inquiétant envoyé à l’Éducation nationale. L'Éducation n'était-elle pas l'une des nombreuses priorités d'Emmanuel Macron ?

Picture of Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

52 commentaires

  1. Pauvre femme, devenir ministre à presque 69 ans, on voit à ses traits qu’elle a besoin d’un repos mal mérité.

  2. En 7 ans de Macronie, l’éducation nationale aura vue passer 5 ministres !
    Tout ça pour un ministère qui exige une certaine constance.
    À savoir :
    – Jean-Michel Blanquer, vétéran dans la durée,
    – Pap Ndiaye, 2 mois, ouais,
    – Gabriel Attal, 6 mois,
    – Amélie Oudéa-Castéra, 1 mois, l’exploit historique de ce ministère en régime macronien !
    – Et enfin Nicole Belloubet, également ministre de la jeunesse, si si !
    Ah classement Pisa, quel travail pour défendre la qualité de l’éducation à la française dans le monde…

  3. Dormez en paix braves gens, il ne se passera rien d’important, sauf bien sûr un problème avec l’Islam, llequel ssera évidemment réglé en faveur de cette effrayante organisation politico-religieuse.

  4. Macron avait bien dit qu’il allait gouverner autrement…un coup à droite, un coup à gauche, en automobile cela s’appelle une embardée et le platane à l’arrivée.

  5. Elle est belle la start-up nation ! Ou comment faire du neuf avec du vieux ! Après le garde des sceaux, le garde des sots !
    C’est atterrant.

  6. L’Education Nationale n’intéresse pas ceux qui dirigent : avec Jospin, « la gauche plurielle », Sarkozy, Hollande et Macron, elle est morte car réduite à rien. La preuve. 4 ministres en une année….

  7. Avec l’a nomination de Belloubet , le gouvernement nous montre combien il s’en fiche de l’avenir de nos enfants . Je le prends comme une provocation . Un clin d’œil pervers de Macron , Attal n’ayant été qu’un pantin au bout des ficelles de son maître.

  8. Les syndicats et les profs- majoritairement de gauche- vont être ravis de cette nomination, après avoir cloué au pilori A O-C et l’avoir insulté de tous les noms. Enfin une gaucho qui les brossera dans le sens du poil.

  9. Voilà longtemps déjà mais particulièrement depuis ces sept dernières années que traîtrise mensonge incohérence manque de vision et idéologie délétère sont l’alpha et l’oméga de nos politiques. La vérité c’est que nous somme un pays en faillite sous la coupe d’état ou d’institutions dont la caution nous permet encore un peu d’emprunter. Macron n’a plu les moyens de véritables reformes a l’éducation comme ailleurs et au risque d’avoir à subir une fronde de l’éducation il ses coucher devant les syndicats gauchistes il est comme un lapin dans les phares d’une voiture tétanisé ne sachant plus dans quel sens aller ou que faire pour rester en vie.

  10. Tous les choix de Macron sont incohérents. Attal avait pris l’éducation nationale en main après la catastrophe Pap n’Diaye, pour ensuite placer Oudeat Castera, mauvais casting, des entre soi et aujourd’hui une Belloubet ex ministre de la justice qui a ouvert les portes des prisons pendant le covid. L’école va être crucifiée. La macronie est aux abois ne trouvant pas des vrais politiques et recrute des inconnus éphémères ministres d’un en même temps. Attal a sa personnalité et l’entente avec le monarque de théâtre ne va durer qu’un temps. Incroyable niveau d’incompétents ce gouvernement de cirque.

  11. « L’Éducation n’était-elle pas l’une des nombreuses priorités d’Emmanuel Macron ? » Vous croyez toujours aux priorités d’E.Macron ? Seriez-vous de ces innocents qui croient toujours au Père Noël ? Vous savez bien que la personnalité équivoque de Macron est à deux facettes. Coté « face », il affiche, bavarde, coté pile, il fait le contraire c’est-à-dire, rien. Non, pas rien, il agit en sous-main afin de liquéfier la France, afin de la déconstruire. Lorsque l’on découvre toujours des médias qui accordent les plus grandes qualités, les plus grands mérites à Macron et à son régime, on commence par être très méfiants.Le profond déclin de la France peut soutenir notre position. Citez nous un seul domaine qu’il a su redresser .

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

« Quand la gauche sort un drapeau, c’est le drapeau palestinien »
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois