Noël : ces gougnafiers qui revendent leurs cadeaux sur Internet…
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Il y a des faits de société qui en disent bien mieux de l’état de notre société qu’un long discours. Notre cher pape François – sorte de punk incontrôlable en CDI vaticanesque, à croire que Dieu, entre autres qualités, puisse avoir le sens de l’humour – vient donc de dénoncer le « consumérisme » ambiant dans lequel l’humanité se vautre chaque année davantage en cette période de Nativité.
L’actualité – qui, elle aussi, ne manque pas de malice – vient donc à la rescousse de ce diable d’homme, fût-il plénipotentiaire de Dieu. Ainsi, plus de trois millions de cadeaux auraient déjà été mis en vente sur eBay et autres sites de vente en ligne, au lendemain de Noël. Soit 13 % de plus qu’il y a deux ans.
Il est vrai que la naissance du Sauveur a perdu, au fil des décennies, de sa dimension religieuse. A minima, il était malgré tout permis d’espérer que cette célébration conserverait celle de la famille et de l’amitié, que le cadeau offert continuerait d’avoir vocation à être conservé et non point revendu sur des réseaux sociaux n’ayant plus de « sociaux » que le nom.
À ces rustres mal élevés, on accordera néanmoins quelques circonstances atténuantes, sachant que nombre de présents ont cette fâcheuse tendance à toujours tomber à côté de la plaque. On vous épargne le baromètre en forme de lyre et autres objets incongrus. Le livre de développement personnel, généralement offert par la plus cintrée de la famille. Le manuel de détox, alors que vous êtes entre cognac et whisky, à la sacro-sainte heure de la messe de minuit. Le dernier prix Goncourt que personne n’a lu ou ne lira, mais qu’il convient de laisser traîner sur la table basse du salon, histoire de grimper de trois marches dans l’échelle sociale. Le superturlu génération X, alors que vous avez déjà celui, à capacité augmentée, de génération Y. Sans oublier les fringues importables – combien de fois faudra-t-il répéter à vos neveux et nièces qu’il y a belle lurette que vous êtes passé du S au XXL ; d’ailleurs, votre belle-mère ne manque jamais une occasion de vous rappeler cette inquiétante surcharge pondérale. C’est que, malgré son grand âge, elle a toujours l’œil, la vilaine…
Autrefois, tout cela prêtait à rire. Et quelques jours plus tard, on faisait des concours de cadeaux défiant le sens commun, histoire de savoir qui avait été gratifié du plus tarte. On en riait même de bon cœur. Aujourd’hui, il paraît que ces trésors se vendent à tout va. Il y en aurait même certains qui se loueraient. De mon temps, on les donnait, le cas échéant ; c’est toute la différence.
Mieux : on les gardait parfois, tels des trophées. Confidence pour confidence, j’ai longtemps chéri une composition florale en forme de partouze tropicale, fleurs ouvertes et zobinaux en position offensive qui, des mois durant, a trôné dans le jardin d’hiver de la demeure familiale. Mais je me serais fait tuer plutôt que de la vendre ; même si l’idée de l’offrir à mon meilleur ennemi m’a souvent traversé l’esprit.
Tout cela pour dire qu’à défaut de prétendre que tout était mieux avant, il demeure un fait de plus en plus avéré que c’est quand même pire maintenant. Remarquez, c’est l’ambiance qui veut ça. On vend bien des enfants tout faits sur Internet, avec même des services après-vente permettant de renvoyer les objets défectueux à l’envoyeuse. Alors, pourquoi pas des machins idiots ?
Sans sombrer dans la nostalgie, qu’il nous soit au moins permis de nous montrer mélancolique, surtout en cette période célébrant un présent sans prix : celui du Christ venu remettre un peu d’ordre dans une humanité souffrante. "Le prix s’oublie, la qualité reste", dit-on dans Les Tontons flingueurs. C’est aussi un peu le cas de notre cher petit Jésus.
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