Nostalgie, cinquième radio de France ? Les raisons d’un succès

boite de nuit

Le passé aurait-il encore de l’avenir devant lui ? C’est à croire. En effet, Le Parisien de ce matin nous révèle que Radio Nostalgie aurait encore gagné 420.000 nouveaux auditeurs, avec une programmation ne remontant pas tout à fait à la dernière pluie. Résultat ? Elle est aujourd’hui devenue la cinquième radio la plus écoutée de France.

Les titres les plus diffusés ? « Confidence pour confidence », de Jean Schulteiss. « Maniac », de Michael Sembello. « Voyage voyage », de Desireless. « Girls Just Want to Have Fun », de Cindy Lauper. « L’Aventurier », d’Indochine. « Le Coup de folie », de Thierry Pastor. « Chacun fait (c’qui lui plaît) », de Chagrin d’amour. « Partenaire particulier », de Partenaire particulier. « Femme libérée », de Cookie Dingler. « 3e sexe », d’Indochine (encore eux).

Que des chansons de plus de quarante ans. Ce qui nous confirme que la nostalgie du temps passé demeure décidément un créneau plus que porteur. Ou que nous sommes en passe de devenir un pays de vieux ; c’est au choix. Dans cette liste, il n’y a certes pas que des chefs-d’œuvre, loin s’en faut. Mais au moins y trouve-t-on des chansons à peu près dignes de ce nom. Écartons, d’emblée, le cas d’Indochine, sorte d’exception française : les gars sont parmi les rares artistes français à jouer au Stade de France à guichets fermés, alors que leur chanteur, Nicola Sirkis, avec plusieurs décennies au compteur, ne parvient toujours pas à chanter juste. Et ces paroles, mon Dieu… « Bob Morane contre tout chacal. L’aventurier contre tout guerrier », il faudra qu’on nous explique un jour.

Pour le reste, les chanteurs français – et même leurs homologues américains – tenaient alors globalement leur rang. Avec une mention spéciale pour Chagrin d’amour dont le tube, « Chacun fait (c’qui lui plaît) », arrivé à peu près en même temps au Top 50 que François Mitterrand à l’Élysée, fut le premier tube de rap estampillé 100 % bien de chez nous. Une chouette chanson, magnifiquement arrangée et écrite de manière plus qu’adroite : « Pendant qu’Boulogne se désespère/J’ai d’quoi m’remplir un dernier verre/Clac fait le verre en tombant sur le lino/J’m’coupe la main en ramassant les morceaux. » Un instantané de vie nocturne, presque un film noir. Dans ses bons jours, voilà qui aurait pu être signé Serge Gainsbourg.

Depuis, grande est l’impression qu’un petit quelque chose se serait un peu perdu en route. Comme si le niveau baissait en toutes choses, des bancs de l’école jusqu’aux pistes de danse des boîtes de nuit. Inutile de chercher bien loin. Il n’y a pas si longtemps, une chanson était composée de couplets et de refrains. Entre les deux, il y avait un pont, suite d’accords permettant de rebondir des couplets au refrain, justement. Les maisons de disques, désormais dirigées par des avortons issus d’écoles de commerce pour lesquels les musiciens ne sont plus que des empêcheurs de boursicoter en rond, ont décidé de simplifier tout ça.

Le pont ? La première victime, trop complexe. Les couplets ? Deuxième fournée. Le refrain ? Ah oui, le refrain. Mais alors résumé à une simple phrase musicale, limitée à cinq notes et demie qui fera bien l’affaire. Pour le rythme ? Les algorithmes s’en chargeront. Moins d’une dizaine d’aigrefins sont ainsi devenus millionnaires dans le monde en composant à la chaîne des centaines de ces drouilles interchangeables convenant aussi bien à une Rihanna qu’un Maître Gims, à un Damso qu’une Aya Nakamura. Mais la politique du tiroir-caisse a ses propres limites. À quand les chansons sur une seule note ? Certes, James Brown est parvenu à cet exploit avec « Sex Machine ». Mais c’était James Brown et ses musiciens n’avaient rien d’hommes-troncs.

Vu le panorama ambiant, le succès d’une Radio Nostalgie n’a donc rien d’une surprise. De plus en plus de Français, tous âges souvent confondus, se rabattent sur la musique d’hier, se disant peut-être inconsciemment que cet hier était sûrement mieux. Ça se discute. En revanche, il n’est pas improbable que ce soit pire aujourd’hui.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

12 commentaires

  1. J’écoute cette radio depuis que je l’ai découverte, il y a bien longtemps. Sa programmation me rappelle disons , le bon temps, vous mettez derrière ce que vous voulez !
    Du temps de SLC, je pense qu’il était plus difficile de faire chanter une casserole, ‘les casseroles ont les avaient vite reconnues » qu’aujourd’hui avec toute cette informatique, électronique, etc. et maintenant avec les IA, les paroliers vont fleurir, si ce n’est déjà le cas.
    Je n’en dirai pas plus, je pense qu’ici tout le monde à compris ce que devient ce pays, musicalement, pour rester dans le sujet.

  2. Dans le même esprit, j’ai découvert il y a peu une radio qui s’appelle « Radio Bonheur ». Elle émet depuis les Côtes d’Armor et ne passe que 100% de chansons françaises voire quelques airs bretonnants
    Cela me dispense d’écouter par moment RTL ou Europe 1 qui ont un faible pour les chansons anglaises et américaines dont je veux bien admettre la qualité musicale mais qui ne m’intéressent nullement. Mon lieu d’habitation me permettrait sans peine d’écouter la BBC si besoin ou envie….

  3. Merci monsieur Gauthier pour votre article . J’écoute « Nostalgie » depuis des lustres , et j’ai eu l’agréable surprise de découvrir que mes fils ,leurs copains et copines écoutaient également « Nostalgie » ; Ils sont fans des années 80, 90 ! On s’éclate avec « Nostalgie » . Ils n’ont de cesse de nous dire que nous avons eu une chance extraordinaire de vivre ces années là et nous sommes bien d’accord avec eux !

  4. Nostalgie , radio que j ‘ai découverte sur mon autoradio au début des années 80 lors de mes études à Nantes , alors une ville magnifique , aujourd’hui devenue une pétaudière vivrensembliste ,comme la musique !!

  5. Un sondage sur un refrain « C’était bien mieux avant »… remporterait sûrement une majorité d’avis favorables. On parie ??

  6. Comme (presque) toujours, l’ ami Nico tape juste, quoiqu’ affichant sur ce coup une certaine propension à systématiser.
    Entre un blues dépouillé jusqu’au squelette comme Spoonful et une « vraie » chanson avec couprains et reflets style « les millionnaires du dimanche », personnellement j’ai choisi.

  7. Il est vrai que même les jeunes sont obligés de reprendre les chansons des vieux pour concourir dans des émissions comme star académie tellement la production de mélodie est pauvre et je ne voudrais pas être cruel mais ceux qui ont du succès ,l’ont ,comme le borgne est Roi parmi les aveugles. Par défaut ! Même le « réac » Michel Sardou retrouve une seconde jeunesse en entendant ses titres repris par toutes sortes de gamins de toutes origines .

  8. Normal car lorsque l’on entend les inepties d’aujourd’hui et le bruit engendré on a l’impression de vivre en afrique et au Maghreb

  9. La musique, comme les autres arts illustre magnifiquement la décadence de l’Occident. De même que l’on préfère voir (ou revoir) les tableaux de Michel-Ange plutôt que les noirceurs de Soulages, les bustes de Rodin plutôt que les colonnes de Buren, les gares de Metz ou de Limoges plutôt que celles modernes de Duthilleul, les films des années 50-60 plutôt que les nouveaux films ou la caméra a la bougeote et où les acteurs « mangent » la moitié des phrases, le public préfère les chansons d’il y a 60 ou 70ans plutôt que le « boucan » des oeuvres modernes. Nostalgie en bénéficie. France Télévisions a aussi pris ce créneau avec Samedi d’en rire qui, d’hebdomadaire, est devenue quotidienne.

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