Notre-Dame de Paris : et maintenant, les chasubles de Castelbajac !
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À deux semaines des cérémonies de réouverture de Notre-Dame de Paris, le couturier Jean-Charles de Castelbajac a dévoilé les vêtements liturgiques créés pour l’occasion. Mitre, chasubles, aubes : se disant honoré et ému d’une telle commande, il a voulu exprimer à travers ces vêtements et ces accessoires « la verticalité ».
Une croix dorée « contemporaine ». Des éclats colorés dont le flocage « s’inspire d’une technique de streetwear ». Si « les codes de la jeune génération » rimaient avec verticalité, on le saurait. Castelbajac explique au site spécialisé FashionNetwork.com qu’« on a décidé, avec le diocèse, qu'il n'y aurait pas de dessin et que je ferai (sic) un travail simplissime ». Mgr Ulrich n’aime ni Viollet-le-Duc, ni le dessin. Ça commence à faire beaucoup.
Au mieux, ce défilé de mode ecclésiastique, on le trouvera digne de Matisse - ce qui ne sonne pas « jeune génération », les essais de Matisse en art sacré remontant à 1950. « Il ne s'agissait pas de faire des vêtements de luxe, il s'agissait de parler de "lux" [lumière] », explique le couturier, comme si un jeu de mots pouvait tenir lieu de philosophie de l’art.
Imaginez…
N’y avait-il pas d’autres solutions ? Imaginez quelle composition aurait pu être brodée en point de Mossoul ou de chausson, sur le thème du phénix renaissant de ses cendres - traditionnel symbole de la résurrection du Christ et, en l’espèce, de la renaissance de l’édifice. Ou bien, imaginez que le clergé revête quelque ancienne chasuble tirée du trésor de Notre-Dame, dont une récente exposition au Louvre a donné une idée de la richesse. Hélas, les pièces anciennes sont muséifiées et inutilisées, malgré leur caractère vénérable et l’économie qu’elles permettraient de générer au bénéfice d' une Église qui court après le denier du culte. À ce sujet, questionné sur le coût de la réalisation de la paramentique castelbajacienne, le diocèse ne nous a pas répondu; et l'équipe de M. de Castelbajac nous a fait savoir que le couturier n'est pas en mesure de répondre « en raison de son emploi du temps très chargé ».
Cohérences contemporaines
Il y a cent ans, la création d’art sacré connaissait un regain extraordinaire qui se heurta à la résistance d’un clergé trop peu formé à la question. Après la Seconde Guerre, l’Église préféra se tourner vers l’informel, tombant d’une Charybde (l’art sulpicien) en une Scylla (l’art abstrait). Aujourd’hui, elle continue d’être à côté de la plaque, recyclant les années 80 (Buren peut-être, bientôt, maître-verrier de la cathédrale ?) ou 90 (Castelbajac).
En réalisant des ornements « qui parlent aux enfants, aux croyants comme aux athées », le couturier les a faits compatibles avec le mobilier liturgique déjà déploré : les chaises Ikea, le baptistère aux allures de coquetier, l’autel en pain de savon, la chaise cathédrale en forme de cercueil, le reliquaire de la Sainte-Croix façon cible à fléchettes. Enthousiaste, l’architecte de Notre-Dame de Paris, Philippe Villeneuve, a bien résumé l’apport de l’ensemble : « Comme le monolithe du film 2001, l’Odyssée de l’espace, de Stanley Kubrick, [l’autel contemporain] peut tout aussi bien représenter Dieu, l’esprit ou l’intelligence. » Le grand tout, le grand rien, c’est tout un.
Les leçons de la reconstruction de Notre-Dame de Paris sont nombreuses. Retenons-en deux. Primo, les extraordinaires compétences artisanales et « ingénieuriales » mises en œuvre ne tiennent pas lieu de créativité, convoquât-on des designers et des grands couturiers. Deuxio, adopter l’art contemporain n’aboutit qu’à une esthétique vide, dénuée de toute identité, où les chasubles de Castelbajac, réduites à une signalétique crucifère, n’ont pas plus de transcendance que des panneaux routiers.
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2 commentaires
Ils ont les mêmes à la Foirefouille !
Ce Mgr Ulrich est comme son boss. De plus en plus insupportable.