Nous disons à Richard Ferrand qu’il a définitivement perdu toute autorité morale pour présider l’Assemblée nationale…
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Ce « nous » n’est pas de majesté, qu’on se rassure ! Il n'est que de circonstance. Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale, quatrième personnage de l’État, vient donc d’être mis en examen pour prise illégale d’intérêts dans la fameuse affaire des Mutuelles de Bretagne. Selon la formule consacrée, bien évidemment, Richard Ferrand est présumé innocent. Cela va sans dire, mais on va le dire quand même.
Immédiatement, à l'annonce de cette mise en examen, la Macronie a fait meute. Gilles Le Gendre, gardien du troupeau de La République en marche à l’Assemblée, l’a dit, avec le ton docte de ceux qui ont - pardon, qui sont - la vérité : « Je ne vois pas en quoi le maintien de Richard Ferrand à ses fonctions puisse en rien abîmer l’institution et empêcher son fonctionnement normal. » Et c’est vrai que, sur le plan strict du droit, rien n’impose à un élu mis en examen de démissionner. D’ailleurs, Gilles Le Gendre évoque une « tradition politique » qui « a perverti le sens de cet élément de procédure : la mise en examen, c’est d’abord une disposition pour protéger les droits de la défense dans une procédure judiciaire ». Mettons.
Il y a un mois, on nous expliquait que si le ministre d’État François de Rugy démissionnait, alors qu'il n'était même pas mis en examen, rappelons-le, c’était pour mieux préparer sa défense dans le « Homardgate » et ne pas nuire à l’action du gouvernement. Mettons, encore.
En 2017, François Bayrou, éphémère garde des Sceaux, mis en cause dans une affaire d’emplois fictifs, mais non mis en examen, lui aussi démissionnait pour ne « pas exposer le gouvernement et le président de la République ». Il avait notamment expliqué cette décision par sa volonté de « préserver » la loi de moralisation de la vie publique, son enfant à lui qu’il avait apporté dans la corbeille de mariage avec Emmanuel Macron. On sait ce qu’il advint de cette loi de moralisation. Moralisation, ça faisait ringard, morale à papa – mouche ton nez, dis bonjour à la dame -, alors on transforma cela en loi (en fait, deux lois : une ordinaire, une organique) « pour la confiance dans la vie politique ». Toute une usine à gaz pour, finalement et faire court, interdire à un député d’embaucher sa femme – sa maîtresse, c’est encore possible. Mais mettons, encore et toujours…
Rien n’oblige légalement Richard Ferrand à démissionner. « La justice suit son cours, la vie politique continue dans le cadre qui est le sien », affirme Gille Le Gendre. Il va d’ailleurs être intéressant de voir ce que la Justice, qui est indépendante, comme chacun sait, va faire dans les prochaines semaines. Le procureur de la République va-t-il demander la levée de l’immunité parlementaire du député Ferrand ? Et, dans ce cas, quelle sera la décision du bureau de l’Assemblée nationale ? Ce bureau qui avait décidé, rappelons-le, en novembre 2018, de lever l’immunité parlementaire de Marine Le Pen, accusée d’avoir diffusé, sur Twitter, des photos de victimes de Daech. Le bureau avait alors justifié sa décision en déclarant qu’il ne se prononçait « ni sur la qualification pénale, ni sur la réalité des faits invoqués » mais qu’il ne devait apprécier que « le caractère sérieux, loyal et sincère » de la demande de la Justice, ce qu’il avait estimé être le cas. Il avait donc conclu froidement qu’il autorisait « le juge à délivrer un mandat d’amener à l’encontre de Mme Le Pen ». S’il arrivait la même chose à M. Ferrand, ce serait donc probablement une première d’avoir au perchoir un mis en examen et dont l’immunité parlementaire a été levée.
Concluons sur une citation désormais historique : « Nous disons à François Fillon qu’il a définitivement perdu toute autorité morale pour diriger l’État et parler au nom de la France. » Un tweet daté du 14 avril 2017 et signé Richard Ferrand.
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