Nous sommes tous consommateurs de halal (sans toujours le savoir)
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Interrogée mardi 4 Février sur Cnews lors de l’émission Face à l’info, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blacker lance un pavé dans la mare : « l’abattage rituel en mode halal produit une quantité plus large de viande que celle qui est consommée sur le territoire. Le restant est distribué dans les supermarchés et les boucheries. Donc nous mangeons de la viande halal qui n’est pas étiquetée comme tel. »
L’histoire de la certification halal remonte à 1964 lorsqu’un décret dit « d’abattage humanitaire » rend obligatoire l’étourdissement des animaux de charcuterie et de boucherie. Une exception est prévue pour l’abattage rituel halal et casher. Le terme «halal» désigne, dans l’islam, tout ce qui est licite. Pour que la viande soit halal, l’animal doit être égorgé sans avoir été préalablement étourdi. Sa tête doit être tournée vers La Mecque et des paroles sacrées doivent être prononcées au moment de tuer la bête.
Mais ce qui n’était qu’une dérogation en 1964 se généralise. Dans des proportions insoupçonnées. Au point que nous serions tous des consommateurs de halal sans le savoir, soutiens involontaires d’un « djihad économique » comme vient de le décrire Madame Bergeaud-Blackler dans Le Figaro.
Une traçabilité inexistante
Contactée par BV, la chercheuse certifie ses propos : « Les viandes issues de l’abattage rituel peuvent parfaitement se retrouver dans le circuit de distribution conventionnel, grande distribution et boucheries. Rien ne l’empêche. Il est plus simple pour des raisons économiques de ne pas faire de distinction dans l’abattage. » Ainsi à défaut de traçabilité, impossible de savoir ce qui se trouve dans votre assiette. « Le mode d’abattage n’est pas traçabilisé » confirme l’anthropologue. « Cela dépend de la commission européenne qui a toujours refusé de mettre en place un étiquetage du mode d’abattage ». La raison de ce refus ? Elle est « en partie liée à l’industrie de l’abattage elle-même qui ne veut pas se compliquer les choses. Si vous mettez en place une traçabilité, vous devez anticiper les commandes halal au risque de ne pas satisfaire la demande ». Emballé, c’est pesé. Pourquoi se contraindre, perdre du temps et de l’argent à distinguer les viandes selon l’abattage et informer le consommateur. Il ne manquerait plus qu’il donne son avis maintenant !
Des abattoirs 100% halal
Aujourd’hui, 240 abattoirs de boucherie sont agréés par les services du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. « En 2021, 62 % des abattoirs abattent des animaux sans étourdissement ! Et dans certains abattoirs visités récemment par nos auditeurs, la proportion de rituel atteint 80 % pour les ovins et 60 % pour les bovins » lit-on sur le site de l’OABA (Organisation pour l’amélioration du bien-être animal).
« En 2012, lorsque je travaillais plus spécifiquement le sujet, j’avais découvert que tous les abattoirs d’Île de France produisaient uniquement en mode halal » indique Florence Bergeaud-Blackler.
En 2015, dans son livre Bon Appétit (Presses de la Cité), la journaliste Anne de Loisy insiste : « C’est même la conviction d’un grand nombre des professionnels de la filière qui, sous couvert d’anonymat, s’accordent à dire que l’abattage rituel concernerait en fait 8 à 9 ovins sur 10 et au moins 5 bovins sur 10 ».
Et lorsque les parlementaires interpellent le gouvernement français sur la traçabilité de la viande, celui-ci répond : « Les obligations en termes d'étiquetage des viandes ressortent du domaine harmonisé des règles d'information fixées par l'Union européenne ».
Quand, au Parlement européen la Commission est interrogée, celle-ci renvoie la balle aux États membres qui « peuvent déterminer la nécessité de prendre des mesures d'étiquetage et de contrôle appropriées afin de garantir que la viande concernée n'entre pas sur le marché général ». Quant aux courageuses associations de consommateurs, silence radio.
Pendant ce temps-là, le Français, décidé à soutenir ses éleveurs en péril, contemple hagard la vitrine de son boucher. Avec une légère impression d’être le dindon de la farce.
4 commentaires
Il est des villes où il n’y a quasiment plus que des boucheries halal et des restaurants halal. Ces derniers en sont à réinventer des plats français en halal… raclette avec « charcuterie halal », vu dans un restaurant du 95
Il faut rappeler que l’abatage hallal est particulièrement cruel et inhumain, car il s’agit de vider l’animal de son sang alors qu’il est entièrement conscient…
Je mange que du porc
Ce n’est pas vraiment un scoop et rien ne permet de penser que la situation va s’améliorer. En effet demander que la viande halal soit clairement etiquettée dans nos magasins, ce qui est une demande de bon sens allant dans le sens de l’information du consommateur et de la protection du bien-être animal, est considéré comme islamophobe et raciste. Les animaux issus de la filière bio bénéficient d’une meilleure information sur la tracabilité de leur alimentation que les humains.