Nouveaux suicides dans les forces de l’ordre : le mardi noir

Un policier et deux gendarmes ont mis fin à leurs jours en 24 heures. C’est sinistre et incompréhensible, et en même temps, dans la triste continuité de l’année 2022. Ce mardi, une gendarme de 27 ans s’est donné la mort dans son domicile professionnel au sein de la brigade de Montaigu, en Vendée. Le même jour, des gendarmes ont fait une terrible découverte dans leurs locaux à Versailles : Grégory J., 49 ans, s’est suicidé pendant son service en utilisant son arme de fonction. Affecté à l’escadron départemental de sécurité routière (EDSR), il laisse derrière lui sa conjointe et ses deux filles, âgées de 16 et 21 ans. Toujours ce mardi, un policier bordelais s'est suicidé. « La série noire continue », annonce le syndicat Alternative Police Nouvelle-Aquitaine sur Facebook, ce mercredi matin. « On paye aujourd’hui quinze ans de lacune dans l’action sociale de la police », soupire Cédric Vladimir, délégué national de la Fédération professionnelle indépendante de la police (FPIP) et porte-parole de l’association Hors-service, venant en aide aux policiers en détresse. Ils sont onze policiers à avoir mis fin à leur jour, rien que pour le mois de janvier 2022. Des chiffres en hausse constante démontrant au minimum un sérieux malaise.

Pour lutter contre ces drames, une structure existe pourtant au sein de la police nationale, l’ANAS, soit l’Association nationale d’action sociale des personnels de la police nationale et du ministère de l’Intérieur, dont l’une des missions est le bien-être des forces de l’ordre. Lorsqu’on consulte leur site Web (assez daté), on s’aperçoit que les initiatives ne manquent pas : tournois de pétanque, sorties, formations… L’association semble assez vivante et présente une réelle action. Trop peu ? L’ANAS a tristement fait parler d’elle, récemment, puisque certains de ses membres ont été accusés de corruption et de détournement de fonds. Une bien mauvaise publicité pour une cause réelle. « Il faut dire que les policiers sont confrontés à ce qu’il y a de pire dans la nature humaine », insiste Cédric Vladimir, « des problématiques opérationnelles qui se transforment en syndromes post-traumatiques, on ne peut jamais expliquer un tel geste par de simples problèmes professionnels ou personnels, c’est bien souvent une conjuration de facteurs », précise encore celui qui a été dans sa carrière en binôme avec un policier ayant mis fin à ses jours.

Une ambiance politique délétère

On l’a vu, la multiplication des manifestations, ces dernières années, a mis les forces de l’ordre en première ligne de tous les conflits sociaux et sociétaux. « Une situation dure à gérer d’un point de vue RH », selon le syndicaliste policier Alexandre Langlois. « Les heures supplémentaires non payées des forces de l’ordre se comptent en millions, mais aussi d’un point de vue mental », poursuit-il. « Les manifestations des gilets jaunes ont été une séquence très dure pour beaucoup d’entre nous », assure Vladimir. « Lorsqu’on nous demande de déposer les armes dès qu’on franchit le périphérique et qu’on nous ordonne au contraire de faire preuve de violence face aux gilets jaunes, tout cela nous renvoie un effet miroir extrêmement difficile. » Il est vrai qu’à l’époque, de nombreuses voix de policiers s’étaient fait entendre pour lier les revendications des gilets jaunes avec celles de la police. Pendant ce temps, Mélenchon cogne. Les rengaines de La France insoumise contre les forces de l’ordre ? « Cela, on s’en moque un peu », confie un policier. « On a l’habitude d’être instrumentalisés par une certaine ultra-gauche, nous savons qu’au fond, la majorité de nos concitoyens nous soutiennent », affirme cet agent en poste à Paris. Quoi qu’il en soit, et malgré le Beauvau de la sécurité, le mal-être des policiers et des gendarmes s’aggrave. Et ils n’attendent aucune amélioration. « Quand on voit la reconduction de Dupond-Moretti à son poste, on a légèrement l’impression d’être insultés », conclut Vladimir.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

30 commentaires

  1. L’Anas ne peut être aujourd’hui qu’une sorte de voiture-balai qui ramasse les corps, tant ces métiers indispensables liés à l’ordre public sont décriés par une frange de plus en plus importante de la population et, infiniment plus grave, quasiment avec l’assentiment de la hiérarchie et des pouvoirs publics qui ne les soutiennent que du bout des lèvres. Ces métiers, hier de l’ordre de la vocation ou du sacerdoce, ne sont plus aujourd’hui qu’une voie de garage désespérante.

  2. Il faut les aider et leur conseiller la démission comme les soignants et même les vrais enseignants…. en démissionnant ils assisteront à la débandade alors que leur suicide flatte ce pouvoir.

  3. C’est tristement significatif d’une corporation qui a perdu le sens de l’idéal de son métier (protéger les populations). Il y avait les agriculteurs, il y a maintenant les policiers. A quand les pompiers, les personnels soignants et les enseignants ? Après tout, les prédictions apocalyptiques du GIEC n’incitent pas à l’optimisme. Quelle société idéale, on nous bâtit !

  4. L’état qui ne tient que par ses forces de l’ordre , est dans un état de déliquescence avancée comme celles-ci qui sont abandonnées , pas soutenues , détestées par une partie de la population dont les racailles , elles ne peuvent non plus compter sur leurs organisations syndicales ( police ) qui trônent auprès de leur ministre de tutelle sans jamais monter au créneau , ont à peine un mot pour celui qui s’est donné la mort , la police est comme l’état agonisante .

  5. Je suis parent de policiers, c’est terrible, que propose t’on aux policiers ? une consultation psy, c’est honteux, Ils n’en peuvent plus d’être insultés, dénigrés …non soutenu par leur hiérarchie, alors que la plupart font un travail difficile avec beaucoup d’abnégation. Ecœurant certains commentaires.
    Pensez aux policiers qui découvrent leur collègue, leur ami qui s’est suicidé d’une balle dans la tête, ça a été le cas pour mon fils…… J’ai mal et je suis triste. Lisez actu 17

  6. tant que les policiers ou gendarmes ne refuseront pas d’obéïr aux ordres iniques de ce gouvernement de branquignoles il y aura des suicides car comment être en accord avec soi même quand on doit être dur avec le commun des mortels et gentil avec les racailles alors qu’on s’est engagé à travailler pour la sécurité du peuple ?

  7. Depuis les gilets jaunes et la crise covid . Faire du zèle de leur autorité devant le citoyen lambda en mettant des amendes pour le port du masque dans la rue dans des endroits isolés ou pour un Ausweis que la personne avait plus ou moins remplis au crayon à papier par exemple …
    J’ai du mal à les apprécier maintenant.
    Faible devant la racaille et fort devant les faibles

  8. Ce sont des comportements inappropriés ou des incidents. Quelle tristesse! Le pays est à l’image de ce désastre humain.

  9. Une seule question : POURQUOI ?
    Ce n’est pas ce sinistre de l’intérieur qui va apporter la vraie réponse. A force de tirer à boulets rouges sur les forces de l’ordre par la faute de leur hiérarchie et du gouvernement ces drames se perpétuent quotidiennement sans oublier ceux qui ne se suicident pas mais sont en grand danger moral. Encore un des aspects de cette politique de Polichinelles.

  10. Lorsque les « forces de l’ordre  » cesseront d’accepter d’être utilisées comme « force de répression  » un grand pas sera fait.
    Un officier peut refuser d’exécuter un ordre illégal, mais combien ça va-t-il lui coûter?

  11. Depuis le 1er janvier, 29 Policiers, 9 Gendarmes, 2 policiers municipaux se sont donnés la mort. Vous pouvez consulter la liste sur le site « Profession gendarme »…Triste symbole d’une France en train de se suicider !

    • Un pays où les forces de l’ordre sont à ce point maltraitées, ridiculisées et, surtout, menacées et attaquées ne peut que mal finir.

  12. Ce n’est pas étonnant vu la façon dont on les considère§re et on les traite .
    Paix à leurs âmes …

  13. On se suicide à un rythme effrené dans la police et la gendarmerie. C’est effrayant et extrêmement triste. Tant de détresse est insupportable.
    Concernant ce qui s’est passé avec les GJ, les vrais coupables sont Macron et son homme de main hystérique Castaner.

  14. Et quand ils votent c’est pour qui ? Depuis leur attitude face aux gilets jaunes beaucoup de citoyens ne les respecte plus .Au lieu de massacrer ainsi les manifestants pacifistes ils auraient du se joindre à eux pour les manifs .Leur attitude lors des manifs est intolérable , ce massacre n’aurait pas du avoir lieu .

      • C’est normal.
        Vous devez d’ailleurs trembler parfois pour vos enfants. Cette situation est terrible.

      • pourquoi les policiers n’utilisent pas la « clause de conscience  » pour refuser d’aller taper sur les citoyens qui manifestent tranquillement ? au lieu de défendre le peuple ils le matraquent donc il ne faut pas s’étonner du rejet d’une partie du peuple à leur encontre.

    • Madame, il y à du vrai dans vos propos, je le comprend aisément, mais aussi il peut y avoir de la détresse dans les commissariats.

    • Pour les GJ, ils obéissaient aux ordres face à ce mouvement spontané et populaire pour lequel ils n’avaient pas été préparé.

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