Les ordinateurs savent-ils qu’ils sont intelligents ?
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Noriko Arai est une spécialiste japonaise de l’intelligence artificielle (AI). Elle a voulu tester un de ses programmes d’AI en lui faisant passer l’examen d’entrée à l’université de Tokyo. Il a fait mieux que 80 % des postulants humains sur des exercices qu’on estimait jusqu’ici propres aux hommes comme l’essai (un peu l’équivalent de la dissertation chez nous). Il est même meilleur en mathématique que 99 % des humains. Cela signifie-t-il que l’intelligence artificielle est en passe de dépasser l’intelligence humaine ?
En réalité, les ordinateurs sont encore loin de notre intelligence. En effet, ce même programme capable de battre les hommes sur une dissertation n’est pas capable de répondre à un QCM assez simple. S’il peut rédiger un texte en combinant les millions d’informations et de connaissances stockées dans sa mémoire, il ne comprend pas ce texte et ne peut répondre à des questions portant sur son sens.
Cette expérience montre, en fait, que ce qui est demandé aux étudiants, à l’entrée de cette université (mais on pourrait étendre sans doute la critique à la majorité des universités dans le monde), est plus du bachotage, de la régurgitation de connaissances qu’une réflexion réelle. Nous parlons bien, ici, de l’accès au supérieur. Il ne s’agit pas de mettre la charrue avant les bœufs en prétendant, dès le secondaire, voire dès le primaire, favoriser la réflexion, le sens, en allégeant les contenus d’enseignement. Ces contenus sont nécessaires à la construction de la culture et aussi de la capacité de réflexion. Mais si le supérieur en reste à ces prémices, les hommes se feront battre par les machines et, surtout, la pensée humaine s’appauvrira.
Ce qu’il faut privilégier chez les étudiants, au-delà des connaissances positives, c’est la capacité à s’interroger sur le sens de ces connaissances, sur la signification de leurs recherches, sur la finalité de leur activité. Ce n’est qu’ainsi que le savoir humain progresse.
L’évaluation de ces capacités réflexives est, certes, plus complexe et moins mécanisable que l’évaluation des connaissances. C’est sans doute pour cela que la plupart des examens d’entrée dans les universités ou les écoles supérieures sont fondés sur la manipulation des connaissances. Du moins en grande partie.
En effet, ce programme d’AI n’a finalement pas été reçu à l’université. Cela montre donc qu’il existe des modalités d’évaluation qui permettent de discriminer les futurs étudiants sur leur capacité à appréhender le sens des choses. Car si les ordinateurs maîtrisent ce qu’ils savent, les hommes devraient s’intéresser à ce qu’ils ne savent pas.
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