Ordonnances travail : Emmanuel Macron signe-t-il le déclassement social des Français ?

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La semaine dernière a vu la signature en grande pompe, devant les caméras, des ordonnances relatives au droit du travail par le Président Macron, singeant narcissiquement le modèle américain. Tout le monde aura pu constater l’absence d’opposition politique sérieuse sur ce sujet majeur, y compris dans le camp patriote.

Silence d’autant plus condamnable que ces ordonnances portent en elles les germes d’une remise en cause profonde d’un certain État social qui, bien qu’issu du contexte particulier de l’après-Deuxième Guerre mondiale, avait accompagné la reconstruction du pays puis son entrée dans la mondialisation économique en maintenant au profit des travailleurs français un socle de garanties minimales.

En effet, les ordonnances viennent encore fragiliser un peu plus la hiérarchie des normes, principe fondamental de l’ordre public social, en permettant aux accords d’entreprise de déroger et de s’imposer aux accords de branche - y compris dans un sens défavorable - dans un nombre élargi de domaines (durée du travail et recours aux heures supplémentaires, 13e mois, primes d’ancienneté, etc.). Ce phénomène d’inversion de la hiérarchie des normes, amorcé par nos élites politiques il y a une quinzaine d’années, s’inscrit dans un mouvement plus général de libéralisation du marché du travail (à l’efficacité discutable) qui, faisant l’économie d’une réforme équilibrée et réfléchie dans l’intérêt de tous, a pour seul but de satisfaire les intérêts patronaux les plus pressants et de soumettre la France aux contraintes issues de la mondialisation et de l’intégration européenne, sans cesse plus invasive. Il marque néanmoins un net recul de l’État dans le dialogue social, dont il était pourtant devenu un acteur expérimenté.

Autre mesure marquante, la barémisation et le plafonnement des indemnités prud'homales en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. S’il faut reconnaître que les jugements des tribunaux prud’homaux pouvaient parfois être extravagants (car politisés), les cours d’appel assuraient toutefois une fonction régulatrice : il n’est ici question que de "flexibiliser" le marché du travail en fluidifiant les licenciements, au mépris des droits des salariés et des principes juridiques élémentaires (en vertu desquels l’on doit en principe être indemnisé de l’intégralité du préjudice subi).

Une autre mesure, moins médiatisée mais ô combien symbolique, relève quant à elle d’une véritable trahison sociale : c’est celle du changement du périmètre d’appréciation des difficultés d’une entreprise en cas de licenciement économique. Désormais, les difficultés économiques seront appréciées au niveau du territoire national français uniquement, et non plus au niveau mondial, sauf en cas de fraudes. Nouveau dispositif proprement scandaleux quand on connaît la propension des grandes groupes multinationaux à localiser artificiellement de la dette en France, en raison notamment d’une fiscalité contraignante.

Le travailleur français se trouve ainsi, aujourd’hui, pris en tenaille entre un grand patronat antinational, désireux de faire reculer l’ordre public social (primauté des accords d’entreprise, soutien objectif à l’immigration pour exercer une pression à la baisse sur les salaires, etc.), et le dumping social des pays est-européens de l’Union européenne, prime à la délocalisation dans une économie minée par le coût du travail.

Les nationaux et patriotes se doivent de réinvestir le champ social pour faire face à ces défis !

Me Thibaut Durox
Me Thibaut Durox
Juriste - Ancien avocat au Barreau des Hauts de Seine

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