Pardon, Marie-Antoinette !

Marie-Antoinette

Le scandale de la parodie de Cène a presque éclipsé l’épisode sordide de la décapitation de Marie-Antoinette.

Il y aurait pourtant tant à dire. La trahison, d’abord, parce que les parents ont été honteusement pris en traîtres. L’ouverture des JO est censée être un événement familial, que l’on regarde sur le canapé tous ensemble, petits et grands. Il fallait préciser, alors, que cette « ouverture de JO » n'était pas tout public mais interdite aux moins de 16 ans. Imaginez le choc pour des enfants de 8 ans, forcés de regarder, sans crier gare, cette tête guillotinée. Certains, pour justifier cette scène, claironnent qu’elle fait partie de l’Histoire de France. Certes. Mais les pays organisateurs ont à cœur de montrer les hauts faits de leur Histoire, pas le fond de cuve, ce dont on a honte. Les Américains ne montreront pas Hiroshima ni les Allemands les camps de concentration, surtout pas de cette façon festive, en en tirant gloriole : le feu d’artifice de sang sonnait, et c'était le plus troublant, comme une réjouissance.

Or, si cette extrême gauche, si attachée à l’abolition de la peine de mort, fût-ce pour les pires monstres, était logique, elle déplorerait cette face sombre de la Révolution. D’autant plus lorsqu’elle se traduit par un féminicide, après un procès inique et des accusations mensongères perpétrées par des hommes, qui détestaient Marie-Antoinette parce qu'elle était étrangère. On peut au moins reconnaître à Jean-Luc Mélenchon une certaine cohérence, qui n'a pas apprécié la scène. En revanche, toutes nos féministes institutionnelles ont a-do-ré !

L’un des point communs spécialement inquiétant entre l’extrême gauche et les terroristes islamistes est l’appétence décomplexée pour la décapitation. Pauvre Marie-Antoinette ! Faut-il n’avoir jamais lu Stefan Zweig pour ne ressentir aucune compassion pour celle qui, née Sissi ou Lady Di allergique à l’étiquette - notons, au passage, que son refus des codes inhérents à sa charge ne fut pas pour rien dans la rancune du peuple : ceux qui nous gouvernent, dévorés par la passion obsessionnelle de casser ces codes, devraient s’en souvenir -, est morte non seulement comme une reine mais comme Reine, autrement appelée sainte Régine ou Réjane, martyre gauloise des premiers siècles convertie au christianisme qui fut décapitée. Animée, comme elle l’a écrit dans sa dernière lettre à Madame Élisabeth, sa belle-sœur, par la la foi - « Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine, dans celle de mes pères, dans celle où j’ai été élevée et que j’ai toujours professée » -, l’espérance - « celle de montrer la même fermeté que [son époux] dans les derniers moments » - et la charité à l’endroit des Français : « Que mon fils n’oublie jamais les derniers mots de son père que je lui répète expressément : qu’il ne cherche jamais à venger notre mort ». Le moins que l’on puisse dire est que la France ne lui en sait aucun gré, qui l’a exposée, sanguinolente, chantant « Ah ! ça ira, ça ira, ça ira ! Les aristocrates, on les pendra ! », comme si elle reniait les siens. Sauf à voir en ce choix un involontaire hommage du vice à la vertu : avec sa tête sous le bras, elle fait figure de sainte céphalophore. Et si c’est elle, plutôt que son royal mari, qu’a choisie le metteur en scène, c’est bien qu’il lui reconnaît confusément un charme glamour, adapté à un événement festif.

C’est toute l’élégance à la française, qu’on a assassinée

Si les Français savaient un peu plus d’elle que son surnom - « Madame Déficit » et sa citation apocryphe « Ils n’ont pas de pain ? Qu'ils prennent de la brioche ! » -, par exemple son immense amour maternel et son indicible souffrance à la mort du dauphin, si joliment racontée dans le conte éponyme d’Alphonse Daudet, ils auraient pour elle la même faiblesse qu’ils nourrissent pour la princesse de Galles : comme Kate, Marie-Antoinette n’était pas élégante, elle était l’élégance - comment en témoignent pour la postérité ses innombrables portraits. L’élégance à la française, jusque dans les mœurs : sur l'escalier de l’échafaud, ayant marché par inadvertance sur les pieds du bourreau, Marie-Antoinette lui a demandé pardon.

Finalement, dans un spectacle placé sous le signe de la vulgarité et de la déconstruction, cette décapitation renouvelée de Marie-Antoinette n’est pas si mal trouvée. C’est toute l’élégance à la française qu’on a assassinée, ces mœurs que l’anglais Burke disaient les plus policées d’Europe qu’on a enterrées devant le monde entier. Un monde entier qui, lorsqu’il vient chez nous, n’a rien de plus pressé qu’aller admirer, à Versailles ou au Trianon, cet acmé délicat de grâce et de raffinement imaginé par… Marie-Antoinette.

Qui, au gouvernement, a bien pu valider ça ?

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

105 commentaires

  1. Quelle honte d’avoir programmé un tel spectacle ..certains mériteraient le même destin que notre pauvre Reine .

  2. N’ayant pas ouvert mon poste de télévision de toute cette soirée de macronades, j’apprends par BV la réédition de l’assassinat de la Reine Marie-Antoinette. Ma seule satisfaction serait qu’on identifie les coupables et qu’on exhibe leur tête (en photo bien sûr).

  3. La Tête de Robespierre eut été plus logique , mais c’est sans doute trop demander au metteur en scène .

    • Citoyen ! Quel est ton nom ? Danton ! ( sacrifié par Robespierre et exécuté ). C’est un peu ce que l’on voit en ce moment avec les Anarchistes. Il y en a même qui sont Députés.

  4. Trop d’idées préconçues, injustes, depuis des siècles contre Marie-Antoinette ! Il nous appartient d’oeuvrer à sa réhabilitation. Par exemple me mot « brioche » n’avait pas au XVIIIème siècle le même sens qu’aujourd’hui…. En proposant de la « Brioche » la reine n’a jamais voulu être sarcastique, n’a jamais eu l’intention de se moquer du peuple. Ses propos ont été surexploités dans le sens le plus péjoratif, alors que l’intention était charitable.

  5. Merci Madame Cluzel magnifique article, la lecture de « Crois ou meurs » de Claude Quétel confirme l’ignonimie de cette gauche née lors de la révolution de 89.

  6. Étant donné que je ne regarde JAMAIS quoi que ce soit qui puisse offenser mon âme et obombrer ma cervelle, j’ai donc eu l’avantage de ne pas assister à cette débauche dont je pressentais d’emblée le caractère émétique !..
    Je précise que – contrairement à ceux qui ne regardent pas ces dépravations télévisées – mais qui par ailleurs se précipitent sur internet pour les voir en différé … que je ne pratique pas non plus cette gymnastique ridicule, sachant que regarder sur internet ou à la télévision revient de toutes façons à donner de l’audience aux choses pour lesquelles j’ai une profonde aversion !..
    Un peu de cohérence dans un monde inconséquent !..

    • Donc si je résume bien votre pensée, il suffit de ne pas voir quelque chose de dérangeant pour se convaincre que finalement, elle n’existe pas. C’est la technique de l’autruche, non ?
      C’est précisément sur ce système, en plus de la terreur, que se sont installées sereinement les dictatures en ce bas monde.

  7. Bravo Gabrielle Comment ne pas réagir à cette insulte faite à Marie Antoinette dont à priori le seul tort était d’ètre l’épouse de Louis XVI.Trop c’est trop ces bobos gauchos nous pourrissent notre histoire à la face du monde entier.avec la bénédiction de nos dirigeants au plus haut niveau

  8. On peut également déplorer le manque total de respect, avec cette vision horrifique, pour Samuel Paty et sa famille, pour les victimes de Daech et de tous les égorgements qui ont lieu dans notre pauvre pays ! A croire que ces malades en redemandent !

  9. « Qui au gouvernement a bien pu valider ça ? » Excellente question à laquelle on aimerait avoir une réponse claire et honnête. Quoique pour l’honnêteté de la part de nos instances…

  10. Mais qui en France a assez de culture pour savoir tout ceci de Marie Antoinette et donc s’écarter de la propagande autrefois révoulutionnaire et aujourd’hui LFIste? Ce n’est pas en revendiquant le droit à la paresse ( et donc à la médiocrité) qu’on s’instruit suffisamment pour déjouer les mensonges gauchistes. Mais l’intelligence et la culture n’est pas au pouvoir, c’est le moins qu’on puisse dire. Il n’est que de comparer le cursus universitaire de macron à celui de Wauquiez par exemple pour s’apercevoir que si toute l’oligarchie ne lui avait pas écrit une légende dorée digne de Jacques de Voragine, il serait resté un sombre fonctionnaire dont le classement à l’ENA a été cassé par le Conseil d’Etat! La France fut le phare du monde, c’est maintenant un infâme cloaque!

  11. Thomas Jolly a indiqué que la cérémonie d’ouverture se voulait comme une gifle au RN – ce ne sont pas ses mots – s’il avait remporté les élections de début juillet et j’imagine que le rappel de la décapitation de Marie Antoinette se voulait être une sorte d’invitation à faire une Samuel Paty à Marine Le Pen ou à sa nièce. Pauvre petit Thomas Jolly, il doit se trouver bien bête d’avoir voulu sonner le tocsin contre la peste brune, la peste brune n’est pas arrivée, du moins pas par la porte par laquelle il l’attendait.

  12. « Or si cette extrême-gauche, si attachée à l’abolition de la peine de mort fût-ce pour les pires monstres, était logique, elle déplorerait cette face sombre de la Révolution. » Mais il lui faudrait alors renier sa maman!

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