Pas Marine Le Pen : mais qui, à sa place ?
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On peut s'intéresser, comme observateur passionné de politique, à ce qui ne serait jamais son choix de citoyen.
Robert Ménard a décidé de ne plus soutenir Marine Le Pen pour l'élection présidentielle en considérant que son projet ne serait jamais majoritaire et qu'elle ne pourrait pas être élue en 2022.
Il a formulé cette conviction face à Jean-Jacques Bourdin, dont je n'ai jamais eu à me plaindre : celui-ci, qui va partir, n'était parfois désagréable qu'à l'égard de ceux dont il devait tirer les mots de la bouche (BFM TV).
Son analyse sur le constat est rien moins qu'originale, mais il sait que la difficulté, pour la droite extrême, si elle juge également que Marine Le Pen devrait laisser la place à un candidat plus jeune, moins éprouvé par les luttes partisanes, sera de trouver l'homme ou la femme adéquat.
Il est clair que Marine Le Pen butera toujours, même si elle a accompli de grands progrès techniques dans les entretiens - elle donne moins l'impression de vouloir s'en prendre au journaliste plutôt que de répondre à ses questions -, sur ce « plafond de verre » qui semble se réduire mais demeurera toutefois à un niveau qui lui interdira la victoire.
On a bien compris la stratégie du président de la République, qui joue à la fois sur le péril qu'elle représenterait et sur sa certitude, lors de la joute finale, de toujours la battre et, ainsi, il ne cesse, paradoxalement mais utilement, de la promouvoir en même temps qu'il la décrie.
Elle-même s'inscrit dans ce registre fatal pour elle puisqu'elle se présente comme la principale opposante du Président, ce qui n'est pas faux, mais elle conforte ce dernier dans ses manœuvres. Elle est persuadée qu'elle aura sa chance en 2022 alors que lui a besoin d'elle pour se rassurer en vue de cette échéance.
Marine Le Pen est trop enfermée dans son combat pour accepter ce fait hautement prévisible qu'en 2022, les faiblesses et les limites d'Emmanuel Macron vaincront tout de même le danger qu'elle incarnerait.
On perçoit d'autant plus le handicap de Marine Le Pen quand on relève que la dédiabolisation acharnée à laquelle elle s'est livrée depuis sa mésentente avec son père ne l'a pas fait progresser d'un pouce. La sincérité de ses dénonciations et de ses hommages historiques est toujours déniée et on a le sentiment étrange que diable par ascendance on la voulait et que diable sans ascendance elle doit rester !
Robert Ménard est trop lucide pour n'avoir pas pris la mesure de cette configuration. Et pour n'avoir pas des doutes sur la relève.
Depuis qu'on a la certitude que le Président va se représenter, on a évoqué, pour la droite extrême et aux fins d'une union des droites, aujourd'hui inconcevable, plusieurs figures dont le talent est indiscutable mais le futur politique aussi problématique que celui qu'il prête légitimement à Marine Le Pen.
Le général Pierre de Villiers, Philippe de Villiers, Éric Zemmour, Marion Maréchal, à la rigueur Jean-Marie Bigard, voire ces sensibilités atypiques de gauche François Sureau ou Michel Onfray, seraient évidemment défaits - à supposer leur envie rien moins que certaine - aussi sûrement que Marine Le Pen. Pour que l'une de ces personnalités - et on pourrait y ajouter celle de Robert Ménard qui, malgré ses dénégations, a un tel activisme qu'une candidature à la présidentielle ne lui ferait pas peur - ait une chance, il conviendrait qu'une union des droites puisse s'opérer entre LR et le RN, même si ces deux partis la récusent, en tout cas de la part de leurs instances officielles.
Par conséquent, il me semble que cette union, souhaitée sans doute par beaucoup de citoyens navrés de cette déperdition, est très peu probable et que, d'un côté comme de l'autre, on est aux antipodes d'une telle synthèse. Donc, la recherche d'un homme ou d'une femme providentiel pour combler les vœux de Robert Ménard est non seulement, en l'état, vouée à l'échec mais encore l'un ou l'autre serait-il miraculeusement trouvé que sa défaite politique n'en serait pas moins certaine !
Pourtant, il n'est pas honteux d'évoquer l'union des droites, mais encore faudrait-il un génie politique comme François Mitterrand pour la faire accepter et la mettre en œuvre ! On en est loin car elle supposerait que la droite extrême ne soit plus elle-même et que la droite républicaine cesse de compenser son absence de programme par des pudeurs éthiques qui font le jeu de tous ses adversaires.
Je m'excuse, mais ce n'est pas à la gauche de gouverner les desseins de la droite en instillant dans son esprit une mauvaise conscience factice.
Le propos de Robert Ménard n'est pas inutile. Ni provocateur ni outrancier, il est lucide mais, pour déserter Marine Le Pen, l'excellent maire de Béziers se retrouve en rase campagne.
En effet car qui, à sa place, et pour quel espoir ?
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