Pauvre France : c’est parce qu’ils l’aiment qu’ils la quittent !

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Il paraît qu’Edgard Quinet, cette grande figure du XIXe siècle, disait que « le véritable exil n’est pas d’être arraché de son pays, c’est d’y vivre et de n’y plus rien trouver de ce qui le faisait aimer ». Nous sommes aujourd’hui nombreux à nous sentir « en véritable exil » et ceux qui le peuvent – s’ils en ont encore l’âge et les moyens – choisissent de plus en plus souvent d’ajouter l’exil géographique à l’exil intérieur.

Plus proche de nous que M. Quinet, un couple de quadras et leurs trois enfants ayant quitté Paris pour le 9-3, puis le 9-3 pour le Québec, me confiait récemment : « Avant, on quittait la France pour découvrir autre chose, faire un bout de vie ailleurs ; aujourd’hui on s’enfuit ! »

Voilà longtemps qu’on le dit et qu’on se fait honnir pour cela : la France se vide par le haut et se remplit par le bas. Diplômés, entrepreneurs et entreprenants, retraités aisés… Ce sont « ces Français qui s’exilent parce qu’ils ne reconnaissent plus la France », pour reprendre le titre d’un papier du Figaro de mercredi. Une republication, pour être exact, car ce papier est initialement paru le 11 mai et fait partie des plus lus de cette année.

Les « fuyards » sont pourtant des gens bien installés dans l’existence, mais « ils ne reconnaissent plus la France. Celle de leur jeunesse ou celle que leur racontent leurs parents ». Quand le menu quotidien se décline en « agressions, cambriolages, incivilités, trafics, montée du communautarisme, mais aussi "fracture de la société", ou "cancel culture" qui fait table rase de leur passé… », quel choix reste-t-il ? La « soumission » décrite par Houellebecq ou l’exil.

Jérôme Fourquet, directeur du département opinion à l’IFOP, pointe là « l’une des conséquences de la mondialisation ». Les motivations de ces nouveaux exilés sont diverses, dit-il. Elles sont « économiques, fiscales, et puis aussi des questions de qualité de vie, de sécurité, d’identité ». Et de relever que « typiquement, dans certaines destinations touristiques comme Bangkok, Manille, Miami ou Lisbonne, on remarque un vote Zemmour très supérieur à sa moyenne nationale : le vote d’une petite communauté française plus ou moins âgée, expatriée par dépit, qui pense que notre pays fout le camp »...

Dans les destinations de ces exilés d’un nouveau genre, il faut ajouter la Hongrie après qu’Orbán eut déclaré, en 2017 : « Nous laisserons entrer, évidemment, les vrais réfugiés : les Allemands, les Néerlandais, les Français, les Italiens, les politiciens et les journalistes terrorisés. Des chrétiens contraints de fuir leur pays, qui veulent retrouver chez nous l’Europe qu’ils ont perdue chez eux. » Dont acte, nous dit Le Figaro à qui une famille de Français exilés confie : il y a près d’eux « des Italiens, des Néerlandais, des Allemands, des Autrichiens. Quatorze familles étrangères ayant quitté leur pays pour les mêmes raisons. Dont des amis qui se sont fait cambrioler neuf fois en Seine-et-Marne… C’est malheureux, car nous étions les « forces vives » de la France, et vous, vous récupérez des gens qui ne sont intéressés que par les allocs. »

La première à quitter la France est d’ailleurs la communauté juive : selon l’enquête de la Fondapol, « 46 % d’entre eux ont déjà envisagé de quitter la France », et pas à cause d'une menace d'extrême droite que le ministre Dupond-Moretti se plaît à agiter comme un épouvantail dans ses numéros d'effets de manche à l'Assemblée. Ils sont ainsi 3.500 à avoir fait leur alyah, en 2021.

Cela inquiète-t-il le gouvernement ? Il ne semble pas. Ces gens-là sont les artisans du monde qui se profile, où il n’y a plus « ni industrie, ni pêche, ni agriculture », comme le souligne Jérôme Fourquet. À la France d’autrefois se substitue « une économie du flux et du tourisme […] Une France de hangars, de camions et de destinations. Amazon et Airbnb, caristes, livreurs et chambre d’hôtes ». Une France pour des bobos aisés qui vivent entre bars à tapas et pistes cyclables, bien loin des quartiers qui n'ont plus de français que le sol.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 13/08/2022 à 7:29.
Marie Delarue
Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

Vos commentaires

71 commentaires

  1. Quel réalisme dans ce texte et j’en suis d’autant plus conscient que je ne vis plus en France depuis très longtemps. Le point le plus important porte sur la perte de notre culture avec tout ce qui l’accompagne, comme le respect des autres, la sécurité qui n’est plus qu’un vague souvenir et qui n’intéresse pas le gouvernement ni macron et encore bien d’autres pertes. L’avenir de la France se fera avec les gaulois ou ne se fera pas parce que nous sommes un peuple de battants qui aime son pays.

  2. Mon grand père a été résistant,mon père a fait 28 mois de service militaire en plein réchauffement de la guerre froide. Moi, je n’ai rien fait. Nous avons été incapables de transmettre l’héritage reçu. J’ai bien tenté d’ouvrir des yeux,je n’ai réussi qu’à etre catalogué facho. Alors maintenant, avec davantage d’ennemis dans mon camp que dans celui d’en face, je rencontre quelque difficulté à me motiver pour attaquer les moulins à vent.

  3. Boutons hors de France les musulmans fanatiques comme Isabelle la catholique, comme Jeanne d’Arc vis-à-vis des anglais !

  4. Remarque préliminaire : toute nation a le gouvernement qu’elle mérite (Joseph de Maistre)

    Un peu d’optimisme, que diable ! 89 députés RN, ça redonne de l’espoir ! Je parie sur bien plus (200 ?) aux prochaines législatives, si ces 89 se montrent à la hauteur de leur tâche. Une fois le mouvement enclenché, les électeurs désinhibés, et une situation qui sera forcément pire qu’aujourd’hui, on peut tout espérer.
    89, ça ne vous dit rien ? La prise de la Bastille !

  5. J’adore les commentaires fielleux sur la lâcheté de ceux qui partent, l’évasion fiscale, que le courage c’est de rester pour aider …. aider à faire quoi ? Nous avons passé 40 ans de notre vie dans des pays difficiles, pour aider au développement, tout en rêvant du jour où, retraités, nous finirions notre vie dans notre belle France, en Provence ; quelle déception ! Nous avons tenu six ans, sidérés devant l’effondrement des valeurs, devant la montée du wokisme, de la déconstruction, de l’insécurité et nous avons largué les amarres. Nous payons plus d’impôts qu’en France donc ce n’est pas pour raison fiscale mais bien parce qu’à notre âge, après avoir passé notre vie à s’occuper des autres, nous pensons avoir gagné le droit de nous occuper de nos dernières années sans crainte de voir notre maison squattée ou de recevoir un coup de couteau pour un regard ! Que les “jeunes” luttent pour nous, nous avons assez lutté pour eux et à une époque où nous n’avions pas tout le modernisme dont ils jouissent !

    • Les « jeunes » sont conditionnés pour ne rien faire car ils reçoivent sur les bancs de l’éducation nationale une instruction woke, cancel culture, contre la famille, contre la patriarcat, pour la théorie du genre, LGBT et donc tout pour qu’ils ne deviennent surtout pas des patriotes mais des mondialistes béats devant leur téléphone mobile.

  6. « Le véritable exil n’est pas de quitter son pays, mais d’y vivre et n’y rien reconnaître qui le faisait aimer » (Edgar Quinet)

  7. Ces « fuyards » sont des déserteurs, qu’ils ne reviennent pas quand les Résistants et les Patriotes auront gagné !

  8. J’adore l’expression  » la France se vide par le haut et se rempli par le bas  » c’est l’image qui nous est renvoyée .

  9. Cette émigration de « conscience nationale », pourrait-on dire, reste malheureusement ( ?! ) un phénomène totalement marginal contrairement à ce que votre article pourrait donner à penser ! Ces communautés d’expatriés, essentiellement pour raisons fiscales ou financières, votent systématiquement, depuis toujours, pour les pouvoirs en place qui ont tous été responsables, les uns après les autres, de la déliquescence de notre pays et de son délabrement actuel !!! Il ne faut, donc, pas confondre les « émigrés du coeur » et ceux « du portefeuille » ou si vous préférez… les serviettes et les torchons !

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