[L’ÉTÉ BV] Piscine olympique : rien n’est trop riche pour les « pauvres »

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Cet article a été publié le 04/04/2024.

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La piscine olympique flambant neuve de Saint-Denis, au nord de Paris, a reçu la visite du président de la République à l’occasion de son inauguration, le 4 avril dernier. Toute la Macronie ourlée s’était donné rendez-vous sous le toit « en vague » de ce bâtiment flambant neuf de 20.000 m2 qui accueillera les épreuves de natation synchronisée, de plongeon et de water-polo, lors des Jeux olympiques de Paris. Et restera à la disposition des heureux habitants de Saint-Denis.

Le chef de l’État est ici dans son élément, plus qu’au Salon de l’agriculture... Autour de lui, que du beau linge : Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France, Tony Estanguet, président de Paris 2024, ou encore Amélie Oudéa-Castéra, le ministre des Sports, les élus locaux, etc. Le chef de l’État s’épanche sur ce « lieu totalement nouveau et qui a été pensé avec audace et construit de manière inédite ». Surtout, cette piscine permettra aux malheureux habitants de Seine-Saint-Denis « d’apprendre à nager », car « il y a encore beaucoup d’injustice en la matière », assure-t-il.

188 millions d'euros

Les élus, eux, nagent dans les subventions. L’État devait engloutir 161 millions d’euros dans le bâtiment : ce sera finalement « 188 millions d’euros, financés essentiellement par l’État (82 millions d’euros), travaux de dépollution du site compris », précise Le Monde. « Une petite trentaine de millions » d’euros ont, eux, financé « la construction de la passerelle qui relie, au-dessus de l’autoroute A1, la piscine au Stade de France ». Lequel avait tout de même coûté 350 à 400 millions... Somptueux, on vous dit.

Alors, tant pis si le budget déjà cossu dérape sérieusement : « La facture est deux fois plus élevée que le devis en phase de candidature », explique Le Monde. « C’est pas grave, c’est l’État qui paye », comme disait un ancien président de la République.

Quand c’est pour la Seine-Saint-Denis, la bourse étatique ne connaît plus la crise. Le département bénéficiera, toujours aux frais de l’État, d’une sorte de « privilège JO ». Comme nous l’écrivions (« La Seine Saint Denis plus égale que le reste de la France devant les JO »), près de 180.000 billets seront tout bonnement offerts aux heureux administrés de ce département auquel la Cour des comptes reproche sa mauvaise gestion. Ce sera le département de France le mieux servi.

Les Français ont encore une fois mis la main à la poche. C’est pour les pauvres, nous disent les élus macronistes. Mais le département que l’INSEE présente comme « le plus pauvre de France » ne l’est plus lorsqu’on prend en compte l’économie parallèle... « Avec l’économie souterraine, la Seine-Saint-Denis est le deuxième département le plus riche de France », assurait le criminologue Xavier Raufer, à BV, en 2021. Tant pis pour les petites communes et leurs piscines qui peinent à survivre dans les départements ruraux.

L'équivalent de onze piscines dans la France rurale

Selon la Cour des comptes, « au terme de leurs travaux, les juridictions financières relèvent que l’offre de ces piscines et centres aquatiques publics sur le territoire répond à un modèle ancien et que leur financement devient complexe au regard de leur déficit, ce qui impose que leurs modalités d’exploitation techniques et financières soient sérieusement améliorées ». La hausse des prix de l’énergie avait engendré, l’an dernier, une flambée de fermetures, ponctuelles ou définitives. « Le coût moyen de construction d’un centre aquatique multifonctionnel [en France, NDLR] est d’environ 25 millions d’euros », précise encore la Cour des comptes. La piscine de Saint-Denis représente donc l’équivalent d’une bonne dizaine de nouvelles piscines (11,5, précisément) dans la France rurale.

Croisons les doigts. Le contribuable devra s’estimer heureux si la piscine olympique n’est pas victime des prochaines révoltes… La Seine-Saint-Denis aura bénéficié d’une bonne partie des 730 millions d’euros dégagés par les assureurs après les émeutes urbaines déclenchées par la mort de Nahel, l’an dernier. Sans compter les subventions de l’État ou de la région et les millions de la politique de la ville. L'État qui laisse mourir ses paysans en fera-t-il, un jour, assez pour la Seine-Saint-Denis ?

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

60 commentaires

  1. Au moins les pompiers sauront où aller pomper l’eau pour éteindre les incendies que ces gentils jeunes auront allumés.

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